Les Règles du jeu

Les Règles du jeu

La matière même dont est fait un jeu, quand on y pense, a quelque chose de paradoxal. Bien sûr, son essence ne saurait résider ailleurs que dans ses règles, tout le reste, du matériel aux joueurs autour de la table, est contingent et interchangeable. Mais si nous jouons au jeux, ce n’est pas pour le simple plaisir de nous plier à des règles arbitraires et inutiles. Comment se fait-il donc que, de ces règles, puissent naître sensations, émotions, et désir ?


S’il est un phénomène fascinant dans le jeu, pour moi, c’est à coup sûr cette immatérialité insaisissable qui le caractérise. Le jeu a quelque chose de sibyllin, d’ineffable, eu égard à l’ambivalence de sa structure, quelque part entre abstraction pure et pure émotion.

D’un côté, le jeu est une pure abstraction, un ensemble de règles pouvant se fixer sur n’importe-quel support. Comme le rappelait Dominique Ehrhard dans le fameux débat de l’intelligence pure de la tric-trac télé, le jeu est l’une des plus pures formes de création, indépendant de ses formes, hors de la matière, hors de la réalisation. L’idée du jeu, c’est le jeu lui-même*. La boîte et le matériel ne sont là que pour permettre d’exploiter cette idée.
Mais d’un autre côté, j’en parlais dans un précédent article, un jeu n’est pas contenu dans ses seules règles : ce qui constitue son essence est situé au-delà, dans les indistincts domaines du plaisir, de l’émotion, du désir et de l’angoisse ; bref dans la palette floue des pensées et des émotions que le pinceau des règles va balayer chez le joueur. De même que l’art d’une œuvre picturale ne se résume pas à sa réalisation technique (l’un de pires commentaires que l’on puisse faire d’un tableau, c’est de dire : « c’est bien peint »), celui du jeu ne se résume pas à un ensemble de règles.

Les règles constituent le jeu de manière exhaustive et exclusive, et pourtant, elles ne le contiennent pas entièrement. Étonnant, non ? Déroulons donc ensemble cette bobine en apparence paradoxale, pour étudier de plus près les fonctions et les fins des règles, qui ont peut-être beaucoup à nous dire, même une fois sorti le nez de nos chères boîtes de jeu.


Règles graduelles


Imaginons une règle, une seule. Une règle unique dans un univers vide. Cette règle pourrait être : « il est interdit de tourner à gauche entre midi et huit heures quarante-cinq ». Cette règle n’aurait aucun sens. Elle ne répond à aucun besoin, ne s’applique à aucune catégorie en particulier et ne s’inscrit dans aucun cadre identifiable. Cette règle en fait n’existerait pas, et ne peut, de toute façon, exister. Car aucune règle, tacite ou édictée, n’est immanente : elle procède nécessairement d’une volonté et répond à un besoin, dans un cadre et pour des sujets donnés. Elle ne peut s’expliquer que par cela, et cesse d’exister lorsque ces conditions ne sont plus réunies.
Une règle n’a donc aucun sens objectif. Elle ne se définit que dans son rapport au monde, et à l’ensemble des fonctionnements sociaux parmi lesquels elle s’applique et qu’elle entend réguler. L’interdiction de battre une monnaie privée prend tout son sens dans une civilisation utilisant la monnaie. Dans l’Égypte antique, qui a rayonné 3000 ans avec un système de troc, bon, elle aurait été moins utile. De même, on ne peut imaginer cette interdiction sans une autorité supérieure aux volontés centralisatrices : le pouvoir royal. Et l’on ne peut juger de l’utilité de cette loi qu’à l’aune de ce que ce pouvoir voulait en faire : affermir son autorité, en étouffant les velléités d’indépendance monétaire des grands seigneurs.

Les règles ont fait de l’art une routine.

Denis Diderot, Du Goût


Jusque-là, j’enfonce des portes ouvertes, donc je continue. Dans le jeu, ce cadre opérationnel de la règle n’est autre que l’ensemble de ses consœurs : c’est par la structure totale que l’on peut comprendre chaque règle particulière. En effet, le jeu ne correspond à aucune situation naturellement donnée. La société précède à ses règles, qui tentent de l’organiser ; le jeu, lui, n’existe qu’à partir du moment où ses règles ont été établies. Chacune d’entre elles ne répond donc à aucun besoin qui se puisse expliquer autrement qu’en référence à d’autres règles de ce même jeu : une règle de pioche ne veut rien dire, tant que l’on n’a pas défini à quoi servent les cartes. Voilà pourquoi j’avais, deux paragraphes plus haut, imaginé la situation absurde d’une règle seule : pour rendre sensible le fait qu’une règle ne se puisse étudier indépendamment de sa structure.
D’où, entre parenthèses, la complexité et le degré d’aboutissement croissants dans le monde des jeux. Aujourd’hui, n’importe-quel auteur, lorsqu’il commence à penser un nouveau jeu, peut partir d’un certain nombre d’éléments établis comme allant de soi, soit pour les dépasser, soit pour les détourner (soit pour ne rien en faire de spécial si c’est un auteur médiocre) ; en tous les cas il part avec cette trame de fond, sur laquelle il lui est loisible de broder. Mais l’établissement de cette trame n’est pas allé de soi. Et si le Go, à la richesse plus profonde que l’infini, est un petit miracle qui ne repose que sur deux mécanismes de pose et d’encerclement, les Échecs déjà ont une histoire assez mouvementée. Il a fallu imaginer de mettre des pions sur un plateau et de leur donner des règles de déplacements variables, pour pouvoir ensuite tordre ces mêmes règles de déplacements, au départ distribuées selon un schéma unique, et inventer les pièces à longue portée. Les tours, les fous, la reine, changent profondément la face du jeu, et ne sont apparus que plusieurs siècles après les premières versions du jeu.
Plus près de nous, il serait vain aujourd’hui de vilipender le jeu de l’Oie, qui existe probablement depuis le XVIe siècle (!) ; époque à laquelle il avait au moins le mérite d’imaginer d’intégrer les dés, jusque-là réservés aux (bien nommés) jeux de dés, à un plateau, pour créer un système de déplacement novateur et amusant, bien que très linéaire. Plus tard, l’invention des petits chevaux a déjà signé une évolution notable de ce système, en proposant des choix au joueur ; des choix certes limités, mais des choix tout de même. Tout ceci nous semble bien lointain aujourd’hui, à nous les héritiers de ces pionniers ludiques, qui avons dans notre besace toute une batterie de mécanismes, d’objets, de matériaux et de catégories, qui à la manière des axiomes mathématiques nous permettent de construire des systèmes toujours plus inventifs.

Il en va de même, finalement, et dans le monde de l’art, et dans le monde du droit, les deux référents que je prends dans cet article. Dans tous ces domaines, les catégories de pensées se sont peu à peu affinées, inspirées, détournées, en complétant ou en renversant leurs codes. Impossible d’imaginer le monde moderne sans le droit justinien, qui a inspiré tous les juristes du moyen-âge, et, de là, tous leurs successeurs ; impossible d’imaginer le cinéma sans Méliès, la peinture sans le Carravage et la littérature sans Rabelais. Mais le jeu, comme je l’ai dit, a cette particularité qu’il est entièrement règles. Dessinez quelque chose sans aucune règle, sans aucune composition : il vous reste un dessin. Établissez une société sans aucune loi : il reste la société, les gens, leurs désirs et leurs lieux de vie. Ôtez toutes ses règles à Caylus, et vous ne saurez pas quoi faire du plateau et des pions qui vous restent.


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On peut donc supposer que les règles d’un jeu remplacent, dans leur cadre propre, les aspirations normales des hommes dans le cadre sociale : leur vie, leurs désirs, leurs enjeux. Or, si les règles n’étaient que contraintes, tout ceci n’existerait pas : un jeu n’ayant aucune fin en soi, brider les actions des joueurs qui n’ont déjà rien à faire de spécial n’aurait aucun intérêt. Est-ce à dire que les règles ouvrent aussi un espace de liberté ?


Contraintes libres


Ça n’aura échappé à personne : la principale fin d’une règle n’est pas d’interdire mais de permettre. Bien sûr elle le fait souvent en négatif ; mais de la contrainte naît la créativité. Un jeu dans lequel on peut faire n’importe-quoi n’est pas un jeu ; même les amusements d’enfants obéissent à des règles tacites et parfois mystérieuses, à commencer par le fait que chacun puisse être quelqu’un d’autre que ce qu’il est en réalité. Au contraire, empêchez un joueur de faire ce qu’il a l’habitude de faire, et il sera forcé de renouveler son jeu et ses réflexions. Reiner Knizia, notamment, est passé maître dans l’art d’ajouter la petite règle qui fait tout le sel du jeu : Rheinländer, par exemple, est un jeu de majorité dans lequel les joueurs marquent des points selon la taille de leurs domaines… chaque fois qu’ils en perdent la majorité ! Cette simple règle, en contraignant la manière de scorer (il ne va pas de soi que chaque domaine rapporte ses points à un moment donné), ouvre de nombreux choix et de nombreuses stratégies qui auraient été gommées sans cela : on doit faire montre de beaucoup de doigté, pour créer des domaines assez vastes pour nous rapporter beaucoup, mais pas si gros qu’ils ne découragent les autres de venir nous les contester. Sans cette règle-là, on aurait cherché à créer les plus gros blocs possibles sans se poser de questions (en tout cas, pas les mêmes).


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C’est aussi un jeu dans lequel on peut fonder des comtés directement dans le fleuve. C’est idiot mais ça ouvre le jeu, tactiquement parlant.


De la même manière qu’interdire le meurtre permet la vie en société, les règles du jeu doivent donner la possibilité du jeu en dessinant sa forme. Dans leur enchevêtrement, elles prennent ainsi la forme d’un compas tendant à être le plus ouvert possible, dans le champ initial qu’il s’est donné : un jeu travaillant la logique et la frustration n’aura bien évidemment pas les mêmes contraintes qu’un autre œuvrant sur le stress et la réactivité des joueurs.
Idéalement, aucune règle d’un jeu ne devrait être uniquement limitative ; et c’est peut-être ce qui rend certains jeux si « purs » à nos yeux que de n’avoir que les règles indispensables à l’ouverture du compas, sans avoir besoin de recourir à des bornes.

L’Art naît de contraintes, vit de luttes, meurt de liberté.

André Gide, Nouveaux Prétextes


Le parallèle social est déjà fait, mais on peut, du jeu de société, glisser vers d’autres arts : le cinéma, la peinture, la littérature ont constamment fait évoluer leurs codes, chaque fois pour aller vers plus de liberté, plus de créativité, plus de folie. Mais il ne faut pas oublier, lorsqu’on fait exploser des lignes, que le vide absolu ne mène nulle part : tout art a besoin d’une forme dans laquelle s’incarner, de contraintes pour se donner vie, de difficultés pour avoir de la force. De la même façon qu’un bon jeu est un jeu qui pose de nouveaux problèmes aux joueurs, en les forçant à réagir de manière inhabituelle, par le corps ou par l’esprit, une belle œuvre d’art est sans doute une œuvre qui pose, et qui se pose, de nouveaux problèmes, hors des cadres que l’on a déjà explorés, mais non point hors de tout cadre : une œuvre véritable est celle qui a su forger et parcourir son propre cadre.
C’est la forme artistique qui permet le plein épanouissement de tout discipline, et les oulipiens n’ont pas trouvé quelque chose de si absurde qu’il n’en a l’air, lorsqu’ils ont décidé de se donner arbitrairement des contraintes d’écriture qui les forceraient à l’inventivité.


Règles souples et règles d’or


Puisqu’elle ne servent que les relations entre les joueurs, les règles d’un jeu peuvent être souples ; à tel point d’ailleurs que certains jeux sont même fondés sur l’évolution et l’invention de leurs propres règles. Le jeu d’Éleusis, ou Zendo, reposent par exemple sur l’invention de règles que les joueurs doivent deviner ; et j’ai ouï parler d’un jeu dont les règles pouvaient évoluer selon les votes des joueurs au cours de la partie, mais j’ai oublié son nom. Si quelqu’un pouvait me le rappeler, ça serait trop super.

Post-Scriptum : il s’agit de Nomic. Merci Sylla pour la réponse. Merci aussi Charles Acétylène, Triste-Sire Léodagan et Fredolalune, pour m’avoir soufflé deux autres jeux intéressants : Cuba et Democrazy.

Sinon, en plus léger, il y a Crazy Time, dans lequel les joueurs ajoutent une nouvelle règle à chaque manche.


Sans aller jusque-là, il est évidemment possible de créer toutes les variantes que l’on souhaite pour un même jeu, sabrer les règles qui nous paraissent inutiles et en rajouter d’autres qui nous semblent abonder dans le sens du jeu. Le jeu est un espace social en miniature, et à ce titre, tout ce qui touche au contrat social le touche également : la société, ici réduite au nombre des joueurs autour de la table, est libre de décider des règles au nom desquelles elle va se réguler. En cas de désaccord, une norme supérieure (la règle telle qu’elle est écrite) permet de trancher, mais autrement, il n’est pas d’autorité plus forte que l’unanimité. Même l’instance auctoriale s’efface une fois que le jeu quitte ses mains, et certains auteurs le reconnaissent directement : Bruno Cathala, par exemple, n’a de cesse de dire que la meilleure façon de jouer à ses jeux, c’est de s’y faire plaisir ; et s’il faut pour cela arranger les règles d’une autre manière que celle dont il les a pensées, tant mieux !
Et de fait : comme je l’ai dit, une règle n’a aucune valeur objective. Elle ne mérite d’être suivie que tant qu’elle remplit son rôle, c’est-à-dire, dans le jeu, qu’elle permet, jointe à d’autres règles, une ouverture stratégique et sensible satisfaisant les désirs des joueurs. Si cette ouverture ne leur convient pas, la raison d’être de la règle cesse d’exister, et il est naturel qu’elle finisse par sauter, tacitement ou bien ouvertement. Je ne reprendrai pas, pour filer la métaphore sociale, l’exemple éculé des femmes qui portent pantalon malgré l’interdiction toujours enregistrée dans les textes ; mais on peut voir sans peine certaines restrictions ludiques tomber d’elles-mêmes dans les cercles de joueurs à qui elles semblent superflues. Et le meilleur exemple que j’aie en tête, c’est celui de tous ces jeux pour lesquels il est inutile de compter des points : Contrario, Petits Meurtres, Dixit (bon, là je le fais quand même, mais juste à cause des petits lapins)… Tous ces jeux d’ambiance, bien que leurs règles incluent un décompte, s’en passent aisément : la règle de calcul des points n’aide en aucun cas à élargir le spectre du jeu, voire au contraire peut tendre à le corseter (il serait vraiment ridicule, à Dixit, de voter sciemment pour une mauvaise carte, juste pour ne pas favoriser le joueur en tête aux points). Alors, entre gens de bonne compagnie, on joue naturellement sans les points (ou sans en tenir compte) et sans se poser de question, et c’est très bien comme ça.

Toute règle a sa raison, qui est en l’esprit, et quand, en observant la règle, on doit s’écarter de sa raison, c’est à celle-ci qu’il faut se conformer. En toutes choses donc, suis la règle, ou mieux encore la raison de la règle, si tu la connais.

Joseph Joubert, Pensées


On peut donc retailler dans le gras des règles sans aucun problème éthique. Mais la condition universelle à cela est que toute modification soit admise par tous les joueurs autour de la table. Pas forcément que tous l’approuvent, pas plus qu’il n’est nécessaire que tous les citoyens d’une même société n’approuvent toutes leurs lois avec enthousiasme, mais que tous acceptent de bonne grâce de s’y plier, au nom du contrat social. Si l’un des joueurs désapprouve violemment une proposition de variante, qui à son sens tue le jeu, il n’y a pas de jeu possible avec lui : il faut soit qu’il quitte la table, soit que l’ensemble de ses partenaires de jeu acceptent de revenir à la règle d’origine (ou à toute autre variante susceptible de faire consensus).


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Un exemple typique de jeu aux règles nombreuses, confuses et contradictoires, où les aides de jeu ont d’ailleurs infesté le plateau au point de le rendre illisible.


Tout ça pour dire quoi, en définitive ? Pour expliquer, peut-être, mon amour pour le jeu. Il y a quelque chose de grisant dans le jeu, dans tous ces enchevêtrements de règles qui chaque fois dessinent des mondes. Je ne suis pas de ceux qui perfectionneraient cent ans durant leur seule pratique du Go : ce qui me plaît dans le jeu, ce sont les jeux. Découvrir sans cesse de nouveaux systèmes, sans cesse de nouvelles idées, toujours de petites variations dans les codes établis qui renversent la structure et qui donnent chaque fois une nouvelle perspective sur cet univers, une nouvelle façon d’explorer ses richesses. Il y a d’ailleurs beaucoup de jeux que j’apprécie et que je ne possède point, voire auxquels je n’ai pas joué, car le simple fait de m’en faire expliquer les règles, et de l’avoir vu jouer (la TTTélé est pour cela un formidable outil) repaît déjà mes appétits de découvertes. Et tout cela pourquoi ? Pour ce que, comme je l’ai dit, la règle, en créant de la contrainte, ouvre sur la liberté. Et c’est cette liberté que j’aime à parcourir.


* Il faudrait peut-être nuancer cette idée dans le cas de jeux d’adresse, comme Badaboum ou Riff Raff. Encore que… En tout cas, mon affirmation était directe et schématique pour servir mon propos, mais il y aurait matière à réflexion, peut-être pour un prochain article.


Je remercie encore tous ceux qui prennent le temps desuivre un peu mes élucubrations. Vous êtes nombreux à me lire et à me commenter, et ça, nom d’un meeple, ça fait plaisir ! Pour ceux qui ne les auraient pas lus, et que celui-ci aurait rendus curieux, mes précédents articles sont ici.

Merci et bonne lecture.

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Merci pour cette déambulation philosophique, avec l'exploration de nouveaux concepts autour du jeu, ou des mêmes concepts sous un nouvel angle.

Est-ce dans la nature de la philosophie de se limiter au questionnement et de ne jamais parvenir à aucune conclusion, même provisoire ?

A contrario, la science tente toujours d'apporter des réponses, au risque de faire fausse route. Mais le progrès de la connaissance se construit souvent par les corrections successives d'erreurs antérieures.

Je parle ici de sciences humaines, bien que le rapprochement du jeu et de l'art puisse laisser craindre qu'une telle vision soit peut-être sans issue.

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Le jeu que tu recherche doit être Cuba de Michael Rieneck ;)

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Je me suis force a créer enfin un compte pour saluer ce travail rédactionnel (même si cela fait bien longtemps que j'aurai du le faire pour celui de M. Phal et du Dr Mops). Réflexion intéressante de la liberté naissant de la contrainte : prenons un jeu comme concept qui par souci de conformité a établi un système de point qui ne sera vraisemblablement jamais utilisé alors que contrairement a dixit, plus onirique, il se prête quand même bien a un esprit de compétition : pour ma part j'y joue avec la contrainte suivante que chaque joueur tire une carte et devra faire deviner chaque mot dans l'ordre croissant de difficulté (bien entendu le joueur qui devine un mot reprend la main). Cette contrainte de suivre une carte de bout en bout servant a la fois de décompte de point (a la fin le joueur ayant fait deviner le plus de carte gagne), a garantir la rejouabilité (lorsqu'un mot a été lu sur une carte, fait deviné ou non, on a le sentiment de l'avoir déjà fait) et permet d'aider les plus timides a faire deviner les mots compliqués. Que du bonheur :)

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Content que l'ouverture des news à tout le monde puisse générer indirectement des articles de la sorte. Une belle réflexion de Petitmuel riche d'enseignements.

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Merci pour ces lignes au combien riche en réflexion. Le jeu que tu recherches ne serait il pas democrazy?

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Toujours aussi excellent cher camarade !

Le jeu que tu cherches s'appelle Nomic (http://fr.wikipedia.org/wiki/Nomic).

(poil à l'alambic)

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J'aurais dit Democrazy.

Je découvre ta plume Petimuel, et je la découvre fort agréable.

Mes encouragements pour tes futus traits!

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@TS Léodagan Oui Democrazy ça marche aussi, mais il pompe le principe conçu dans Nomic à la fin des années 70/début années 80.

Très bon article, bravo !

J'ai craint, je l'avoue, ne jamais voir poindre mes amis oulipiens :) ouf !

De nos jours, le collectif OUBAPO fait aussi de très belles choses sur ce volet.

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Et c'est Sylla qui remporte la palme (en même temps c'est lui qui m'avait parlé dudit jeu) : c'était bien Nomic que je cherchais. Merci à tous les challengers qui m'ont suggéré des pistes ! L'article est édité avec vos propositions. Il faudra que je m'y penche d'un peu plus près pour pouvoir les détailler.

Lapinesco : oups ! J'ai édité mon horrible bévue sur "oulipiens" ! Merci. :)

Et je ne connaissais pas l'OuBaPo non plus, il va falloir que je regarde ça sérieusement ! De nouvelles découvertes pataphysiques en perspective, sans doute.

Hal Chimist : variante adoptée ! Merci !

@Kerquist : Je ne crois pas qu'il faille ainsi renvoyer dos à dos la philosophie et les sciences, si humaines soient-elles. Toutes ont comme défaut, et comme vertu à la fois, de toujours conclure et de ne jamais fermer.

En outre, je dirai que les secondes sont incluses dans la première : la philophie se nourrit des sciences, dures ou non, pour construire ses schémas et soutenir ses interprétations. Parfois elle va à l'encontre de leurs conclusions, parfois elle les relativise, parfois elle abonde dans leur sens. Il y a autant de philosophie que de sciences, finalement.

Du reste, je ne suis pas moi-même philosophe, loin s'en faut ; ne juge donc pas la philosophie à l'aune de ce que j'écris ^^ D'autant qu'il s'agit en l'occurrence de petits articles sans grande prétention.

Ceci dit, il me semble que cet article-ci est plus ferme que celui sur le "cœur" des jeux, et qu'il pose certains éléments absolue (ie. non relatifs). Certes, je n'ai pas fait de petit paragraphe final "résumons les acquis de la réflexion", mais je crois qu'ils sont là quand même.

En tous les cas, je te promets que le prochain article sera plus concluant. Oh oui !

@Petimuel Très bon article, je l'ai déja dit.

Je me permets de revenir sur un point tout de même, en fait plus qu'un point, sur un groupe de mots, et ce groupe le voilà : "impossible d'imaginer le cinéma sans Méliès".

Je suis un grand admirateur de Méliès, je pense avoir vu ce qu'il était possible de voir de lui, et j'ai pleuré fort devant l'hommage merdique de Scorsese avec Hugo Cabret.

Tout cela pour dire que le problème n'est pas là (dans le fait que j'apprécie ou pas la ref), non c'est plutôt de le voir cité en référence (ta référence ciné en l'occurrence) pour justifier les piliers, les fondateurs (j'extrapole peut etre un peu ton idée, tu me dis) d'un art.

On peut en discuter, mais Méliès avait sa propre vision du "cinéma", il a produit une oeuvre interessante, tombée dans l'oubli (réhabilitée depuis quelques années, et c'est tant mieux), a été le premier à construire un studio (mais quid de tout ça pour la suite) mais de là à le citer dans ton article, j'y trouve un décalage.

Pourquoi, principalement par le fait que d'autres ont eu un poids beaucoup plus important sur la création, l'affinage des codes de cet art nouveau.

Bien entendu je pense à DW Griffith qui a mis en place tellement de choses que le citer ici me semble plus approprié (que l'on préfère ou pas Méliès), voir, un chouille plus tard Eisenstein qui à travers ses films ses écrits est incontournable comme fondateur (ou au moins Koulechov si l'ami Serguei te semble "tardif").

Si tu souhaitais pointer une date "historique" (et que donc mes pti jeunes des années 10/20 sont trop tardifs, l'aspect frères Lumières, voir Charles Pathé sont plus significatifs, non ? (encore une fois que l'on soit en phase avec ce qu'ils ont contribué à faconner ou pas).

Enfin, et je termine la dessus, si c'est la mise en valeur d'un des premiers films de "science-fiction", pkoi pas mais à quel point ceci est incontournable ? et pkoi pas le premier montage alterné ? le premier gros plan ? la première oeuvre de fiction (ce bon arroseur arrosé des frères Lumières justement, en 1895) ?

Un peu en vrac, mais voila pourquoi malgré tout l'amour que j'ai pour ses films, toute la tristesse que j'ai quand je vois le manque de reconnaissance sur sa fin de vie, je trouve qu'il est finalement assez facile d'imaginer le cinéma sans Méliès, je le vois plus comme un magicien trublion bidouilleur d'images, par contre un cinéma sans les 2 que j'ai cité (DWG et SE), voir plus tardif sans Ford, Hitchcock, Chaplin, Godard, Ozu, Renoir, Rossellini, etc. là j'ai du mal :)

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@Lapinesco : C'est pas faux. Je souscris à tous tes arguments. J'aurais pu citer Eisenstein ou les frères Lumière ; j'ai tout de même choisi Méliès pour rendre hommage à son côté explorateur trublion, inventeur enthousiaste, essayeur de bric et de broc qui ont, je crois, beaucoup fait pour défricher le champ du potentiel cinématographique, en terme de mise en scène. Je ne suis pas spécialiste du cinéma, je peux donc me tromper ; mais j'ai l'impression que son influence, directe ou non, a tout de même été grande, pour construire le clavier du cinéma fantastique.

Je l'ai cité enfin parce que je garde un souvenir ému de ses notes qui dansent sur une portée volante (ou des câbles électriques, je ne suis plus sûr), et surtout de son extraordinaire Palais des 1001 Nuits, à la fois naïf et fou, qui reste le meilleur souvenir que j'emporte de la très belle expo sur les 1001 Nuits qui se tint à Paris l'an dernier. Je l'ai cité sur un coup de cœur, parce qu'il a un côté magique et décalé ; et je reconnais en disant cela que, par ce décalage même, il n'était peut-être pas le meilleur exemple à produire. Ah, tant pis, je le laisse !

Bien sur laisse le, loin de moi l'idée de vouloir virer Melies de ton article :)

Comme toi je suis un admirateur de son univers, de son inventivité et de son "originalité".


Après, Il a surtout défriché par son approche "magicien", ses trucages et effets de pellicules étaient novateurs, mais n'ont pas fait ecole car sans doute trop marqués "foire" (je caricature un peu, comme toi j'y vois une poésie énorme) et finalement assez classique justement dans le traitement des codes cinématographiques. Il est vrai que l'on était jamais bien loin du theatre filmé, donc question déchiffrage du potentiel, bof selon moi, sa force, était comme tu le soulignes ensuite dans la mise en place d'univers/tableau fantastiques.
Mais niveau influence, où aller la chercher postérieurement ? J'ai envie de dire un peu dans les films d'aventures des années 30 et 50 (beaucoup de ce que l'on qualifierait aujourd'hui de série B). Si l'on prend une autre référence, qui elle pour le coup a fait date dans cette "ambiance là, mais pas que", Nosferatu de Murnau, et la on voit que la filiation avec Melies est fine, très fine même...

mais trêve de digression, vive Melies, regardons ses films encore et encore :)