[Carolus Magnus] Du hasard...

[Carolus Magnus]

Carolus Magnus a plus de 50 avis. Je crois que tous évoquent la part de hasard (le mien y compris). Or, c'est faire un procès un peu hatif et superficiel à ce jeu.
CM est un jeu complexe car évolutif. On ne le joue pas de la même manière après 10, 20, 30, 40, 50 ou 60 parties (j'en suis à peu près là).
Je vais vous faire part de ce que j'ai appris au cours de ces parties, expérience qui au fur et à mesure est allée chaque fois plus à l'encontre de ce qui se dit généralement sur ce jeu et de ce que j'en pensais moi-même.
Je prendrai comme base le jeu à 2 car c'est le plus "hasardeux" des 3 configurations. A partir de ces données, je soulignerai en fin de post les différences ou nuances par rapport au jeu à 3 et à 4 joueurs.

1. On pense souvent que des cubes investis sur le terrain sont des cubes qui ne le seront pas à la cour. C'est vrai mais l'inverse l'est également: les cubes posés à la cour sont des cubes qui ne pourront être injectés sur le terrain comme apport offensif ou défensif.
2. On pense souvent que placer à la cour des cubes de couleurs assez largement contrôlables ou récupérables par l'adversaire est inutile. C'est faux entre autres car c'est un excellent moyen de l'empêcher ou de freiner ses possibilités de placer son surplus de couleurs fortes sur le terrain.
3. De même, on oublie également souvent que des cubes de couleurs fortes à soi mis sur le terrain obligeront l'adversaire (si ils sont pertinemment placées bien sûr) à investir également des forces de ses couleurs dominantes sur le terrain rendant ainsi plus précaire ou incertain le contrôle de ces couleurs à la cour.
4. La répartition initiale du terrain est importante car elle donne la tonalité de la partie. Pour schématiser, si des couleurs similaires sont les unes à côté des autres, la gestion à la cour de cette couleur sera importante; par contre, si les couleurs similaires sont réparties de manière espacée ce sont les troupes investies sur le terrain qui auront plus de poids. Pourquoi? Si j'ai une région à 2 châteaux avec 2 cubes de la même couleur: si mon adversaire récupère cette couleur à la cour il ne lui suffit plus que d'investir 1 chevalier pour prendre cette région. Si j'ai la même région de 2 châteaux mais avec 2 cubes de couleurs différentes cette fois-ci: si mon adversaire récupère 1 couleur à la cour, il se doit d'investir encore 3 cubes sur le terrain pour récupérer la région. Les coûts et les implications ne sont pas les mêmes. Il n'est donc pas toujours intéressant car dangereux de construire sur une région qui peut devenir instable ou alors, il faut avoir des cubes d'autres couleurs à investir sur le terrain pour pouvoir créer un contre-poids en équilibrant différentes couleurs, équilibre des forces qui donnera une certaine tranquilité en cas de pénurie sur une couleur particulière.
5. On le voit bien, il n'y a donc pas de couleurs inutiles, il n'y a que de bonnes ou mauvaises utilisations:
-si on tire des couleurs qui nous permettent de récupérer des majorités: pas de problème.
-si on tire des couleurs que nous contrôlons: on peut se renforcer à la cour ou placer sur le terrain.
-si on tire des couleurs que l'adversaire contrôle: on peut lui foutre la pression en investissant à la cour.
Le problème de CM n'est pas les couleurs que donnent les dés, le problème est quoi faire, dans quelles proportions, où et quand?
6. La gestion de ses numéros est fondamentale par rapport au terrain, par rapport à la cour de l'adversaire et par rapport à sa propre cour. Et au-delà de l'ordre du tour et du mouvement de Charlemagne, c'est bien du contrôle de sa main et de son jeu qu'il s'agit (sans même parler de la préparation et de l'anticipation d'un double coup, jouer avant l'autre pour placer par exemple ne serait-ce qu'un seul cube sur une couleur peut être déterminant quant aux implications sur le terrain et/ou à la dépense beaucoup plus élevée que cela impliquerait pour l'adversaire afin de la récupérer, etc., etc., etc.).

Le jeu à 2 est le plus "aléatoire" pour 2 raisons:
a- Le maximum de cubes que l'on peut aligner de suite est de 6 en jouant 2 fois de suite (8 cubes à 3 joueurs, jusqu'à 12 cubes à 4 joueurs si les 2 coéquipiers jouent derniers puis premiers).
b- Il est moins facile et rapide de trouver une solution immédiate aux couleurs que domine aisément l'adversaire (idem à 4, à 3 elles peuvent être réparties sur le terrain même si elles ne nous servent pas directement pour équilibrer ou déséquilibrer les forces en présence entre ses deux adversaires). Ceci dit, l'importance de mettre la pression à l'adversaire sur une couleur forte et le dilemne de savoir quand le faire, dans quelles proportions et au détriment de quoi est une donnée qui reste loin d'être facile à gérer et à résoudre quelle que soit la configuration.

A 3 joueurs, on aura donc plus de facilités, plus de latitudes pour utiliser les couleurs de sa réserve quelles qu'elles soient. Mais les possibilités de jouer 2 fois de suite seront moindres.

A 4 joueurs, avec la possibilité de poser jusqu'à 12 cubes de suite, inutile de dire que quels que soient les jets de dés, on pourra forcément changer n'importe quelle majorité et/ou faire chuter n'importe quelle région dans de telles circonstances. Ce sera donc la gestion des numéros plus que les tirages qui seront décisifs (comme toujours en fait, mais de manière encore plus marquée ici). Et les numéros, ce ne sont pas les dés qui les choisissent...

On le voit bien, l'éventail de possibilités que laisse CM à disposition font que le hasard a une part plus que réduite (en tout cas, beaucoup plus réduite que ne le disent de nombreuses personnes). Les variantes qui facilitent trop les choix simplifient en fait le jeu, le caricaturent car elles limitent souvent grossièrement CM à un alignement de pions à la cour et à une vision du jeu à court terme. Jauger ce qu'implique sur un plus long terme d'obliger l'adversaire à jouer des numéros précis ou à investir des pions sur le terrain pour protéger une région nous laissant le terrain plus libre pour en attaquer ultérieurement une autre (et ce ne sont que quelques exemples entre mille...) est autrement plus difficile que de dire: "Merde! Pas de bol! J'avais besoin de 2 cubes pour récupérer cette majorité à la cour et j'en ai tiré qu'un..." ou "Putain! Quel bol! T'avais besoin de 2 cubes de cette couleur pour récupérer la majorité et tu les a tirés..." quand le choix d'un numéro, des menaces bien placées et au bon moment sur le terrain, une région cédée pour en récupérer un peu plus tard une autre mieux placée ou plus adéquate quant aux rapports de force, etc., etc., etc. auraient été plus décisif, intéressant et contrôlable que d'attendre d'avoir des ch'tits cucubes de couleur à aligner les uns à la suite des autres.

Maintenant, il ne s'agit pas de dire qu'il n'y a pas de hasard et il est clair qu'entre joueurs de même niveau ne commettant aucune erreur, le hasard pourra être déterminant. Mais ce n'est pas une caractéristique dont Carolus a le monopole loin de là et je peux vous assurer que même dans ce cas, la lutte aura été épique et acharnée car ce jeu est un des plus diaboliquement équilibré que je connaisse et le seul à ma connaissance où l'on tire autant le dé et où le hasard soit en définitive si peu présent.

Ludiquement.

J'aimerais ajouter quelques réflexions en ce qui concerne les couronnes.

Avoir le luxe de choisir est un avantage indéniable et c'est ce que permettent les couronnes. Néanmoins, pour schématiser, chaque couleur est une couronne potentielle si l'on sait l'utiliser en fonction du contexte. Et même si il y a à ce moment des couleurs meilleures (celles que l'on aurait choisi avec une couronne), il faut savoir faire fructifier sur un plus long terme ce qui n'est pas essentiel à cet instant et surtout analyser les conséquences (par rapport aux numéros restants et à ce qu'a l'autre dans sa réserve) qu'impliquent le fait de ne pas avoir les couleurs que l'on aimerait avoir à ce moment (Carolus encore une fois est un jeu souvent vu de manière trop réductrice comme un jeu tactique mais pour le jouer bien il faut savoir anticiper constamment à plus long terme).

Dans la même optique, se placer en position d'attaque dans l'attente d'une couleur est bien mais il faut veiller avant d'entreprendre une telle manoeuvre à ne pas se retrouver en péril (par rapport à la cour du ou des adversaires et aux numéros qu'il reste) si cette couleur venait à ne pas sortir. Il faut toujours se laisser des probabilités d'être décisif mais ne jamais jouer son avenir sur un coup de dé (conserver en main des cubes qui laissent d'autres options avec l'assurance que si la couleur que l'on attendait ne sort pas, il y en aura forcément qui renforceront des options alternatives). Et si je n'obtiens pas la couleur pour attaquer, j'aurais au moins la possibilité de me défendre efficacement (forcément, si je n'ai pas les couleurs pour attaquer...) et de préparer au mieux le moment où j'aurais à nouveau l'opportunité de réattaquer.

Ludiquement.

Excellente analyse de ce jeu méconnu et éternellement dans mon Top 5.
D'ailleurs, on y rejoue ce soir ( à 2).
Le jeu à 3 me semble de très loin le plus difficile car le plus agressif.

palferso dit:
CM est un jeu complexe car évolutif. On ne le joue pas de la même manière après 10, 20, 30, 40, 50 ou 60 parties (j'en suis à peu près là).
Je vais vous faire part de ce que j'ai appris au cours de ces parties, expérience qui au fur et à mesure est allée chaque fois plus à l'encontre de ce qui se dit généralement sur ce jeu et de ce que j'en pensais moi-même.

Oui car l'avis est en général écris après entre 1 et 3 parties. Or ce jeu
nécessite bien plus de parties pour en comprendre les subtilités et sa stratégie. En effet même si j'ai accroché au jeu dès ma première partie je pensais la chance bien plus présente qu'elle ne l'est réellement. Ce tirage de dé n'est pas de la chance mais est nécessaire au principe du jeu. Si l'on choisissait ses couleurs il n'y aurait plus l'intérêt d'adaptation et le jeu se jouerait beaucoup à la cour et non au placement comme tu l'évoques je crois.
palferso dit:
1. On pense souvent que des cubes investis sur le terrain sont des cubes qui ne le seront pas à la cour. C'est vrai mais l'inverse l'est également: les cubes posés à la cour sont des cubes qui ne pourront être injectés sur le terrain comme apport offensif ou défensif.

Oui ça je l'ai bien compris dès que j'ai joué contre toi ! :lol:

palferso dit:
2. On pense souvent que placer à la cour des cubes de couleurs assez largement contrôlables ou récupérables par l'adversaire est inutile. C'est faux entre autres car c'est un excellent moyen de l'empêcher ou de freiner ses possibilités de placer son surplus de couleurs fortes sur le terrain.

Oui ça je le noterais même en gras moi ! Il faut, je pense, faire monter ses couleurs là où l'autre est fort car viendra dans ce cas un moment où tu pourras revenir sur cette couleur même si ce n'est que vers la fin de partie.
Je pense aussi que trop de cube d'une même couleur sur un terrain est dangereux, j'ajoute ça par rapport à la partie de hier soir contre toi où justement un terrain important, que tu possèdais, avait 4 rouge et reposait essentiellement sur cette couleur. Je pense qu'il vaut mieux partager un peu les couleurs sur les zones que l'on possède pour mieux les protéger.

palferso dit:
3. De même, on oublie également souvent que des cubes de couleurs fortes à soi mis sur le terrain obligeront l'adversaire (si ils sont pertinemment placées bien sûr) à investir également des forces de ses couleurs dominantes sur le terrain rendant ainsi plus précaire ou incertain le contrôle de ces couleurs à la cour.


+1

Le gros soucis dans ce jeu est qu'aux premières parties du jeu comme tu le dis, on a un peu l'impression que la victoire repose beaucoup sur le tirage des dés et à la cour. Si tu vises tes couleurs fortes à la cour et que tu négliges les plus faibles et que l'autre joueur te distance à la cour dans tes couleurs. Tu perdras pleins de tours pour remonter alors au lieu de ça tu n'utilises pas tes cubes de cette couleur et finalement chaque fois que tu pioches un cube de cette couleur tu dis "pas de bol" :) Il est ainsi je pense très important de développer équilibré à la cour.

Comme le dis Palferso, il ne faut surtout pas négliger le placement des p'tits cubes sur les terrains ce soit en attaque mais aussi en défense ! Penser à protéger ses territoires est hyper important ! Placer quelques p'tits cubes aussi sur le terrain adverse meme s'il n'est pas prenable à ce tour-ci est aussi important, car justement on force l'adversaire à jouer des cubes dans ce terrain, ainsi il se fragilise à la cour !

Dernier point et non négligeable, il faut bien jouer ses numéros et je pense que cela est le plus dur à maitriser. Je ne ferais pas de conseil sur ce point hormis qu'il faut essayer de faire en sorte de jouer 2 fois de suite à des moments importants de la partie. Il faut aussi protéger ses territoires avec les numéros, quand l'adversaire peut prendre notre terrain, tout simplement en jouant le numéro en fonction du nombre de case que charlemagne doit se déplacer pour se poser sur ce terrain.

Bon personnellement j'en ai encore beaucoup à apprendre de ce jeu que Palferso, mon maître Jedi, maitrise vraiment bien.
C'est ça qui est super intéressant justement, c'est que l'on sent son progrès à chaque partie jouée ou presque... :pouicok:

++ Loic

Merci pour votre participation! :D

béarn dit:Le jeu à 3 me semble de très loin le plus difficile car le plus agressif.

Oui et non. Il n'est pas plus difficile mais il offre plus de possibilités d'utiliser les cubes de couleurs qu'un adversaire domine ou peut récupérer relativement tranquillement (les utiliser sur le terrain pour créer des tensions entre ses deux adversaires). Mais d'un autre côté, on peut le voir comme une facilité suplémentaire car à deux joueurs (et par extension à 4), la majeure difficulté comme je le souligne et comme le confirme également Loic, c'est de savoir mettre la pression à l'adversaire sur ses couleurs fortes (quand, dans quelles proportions, quelles possibilités on abandonne pour soi, les implications par rapport à soi et par rapport à l'autre, etc.). Dans le fond, plus que "plus difficile", le jeu à 3 est en fait très différent. Quant au côté agressif, Carolus est un jeu extrèmement agressif et impitoyable quelle que soit la configuration. :pouicgun:
loic_425 dit:Je pense aussi que trop de cube d'une même couleur sur un terrain est dangereux


Oui, tout à fait. C'est ce que j'évoque dans le point 4 sur la lecture de la répartition du terrain. En ce qui concerne notre partie d'hier, j'ai commis l'erreur d'investir des troupes d'une couleur qui était déjà présente initialement de manière relativement importante sur la région alors que j'aurais dû travailler mes couleurs plus finement et plus tôt pour chercher à en équilibrer au moins deux sur le terrain afin de ne pas dépendre d'une seule couleur (comme je le prône pourtant dans mon post initial... :roll: ).

Il manque une troisième partie à mon petit speech qui devrait arriver bientôt. :D :bonnetpouic:
Ludiquement.

Cher palferso.. (comment le dire de manière diplomatique ? :roll: ).. il y a trop de texte à lire. :kingboulet:

Alors moi je dis : j'ai apprécié mes premières parties de Carolus Magnus où à chaque fois le vainqueur a gagné parce qu'il a vu plus loin que les autres (et je ne dis pas ça parce que c'est moi qui ai gagné.. ). Le "hasard" du dé et donc de la pioche de la réserve oblige à revoir sa stratégie. C'est la richesse du jeu qui ne serait que calculatoire autrement.

Je pondère mes propos en disant qu'ils sont très vrais à 3 ou 4, tandis qu'ils le sont quelque peu moins à 2 (qui me semble plus une partie "d'entraînement").

Kinder dit:Cher palferso.. (comment le dire de manière diplomatique ? :roll: ).. il y a trop de texte à lire. :kingboulet:


Oui je sais c'est mon défaut. :oops: J'essaie de vivre avec... :D D'un autre côté, parler d'un jeu aussi complexe sur lequel il y a en plus autant d'idées préconçues fausses est difficile à faire en deux lignes. Ceci dit, j'essaierai de faire une petite récapitulation une fois que j'aurais envoyé la troisième partie de mon laius.

Après les remarques d'ordre général et la paranthèse sur les couronnes, j'aimerais pour conclure apporter quelques précisions sur les variantes.
Si on prend en compte ce que j'ai écrit antérieurement, les 2 seules variantes qui se justifient donc éventuellement à Carolus Magnus sont celles de Solipsiste que je retranscris de mémoire:

1- Si l'on a au moins une couronne, on doit se conformer au tirage. Si l'on n'a pas de couronne, on peut relancer tous les dés mais on devra alors se conformer au résultat quel qu'il soit.
Cette variante oblige à estimer finement les possibilités de mise en valeur des couleurs que l'on a avant de prendre le risque de retirer les dés et d'écoper éventuellement d'un tirage ponctuellement moins intéressant.

2- Chaque joueur ne peut avoir au maximum qu'une couronne par lancer de dé. Si il y a plus d'une couronne, le joueur relance le dé jusqu'à obtenir une couleur naturelle. Dans tous les autres cas, on doit conserver le résultat donné par les dés.
Cette variante vise à limiter les possibilités d'avoir une latitude de choix trop grande si l'on tire plus d'une couronne. On peut même imaginer une variante encore plus radicale qui interdirait toute couronne, chacun devant trouver des solutions à ce que lui donnent les dés.

Il faut bien comprendre et accepter que les dés à CM sont des variables qu'il faut savoir adapter à sa stratégie (dédicace spéciale :wink: ). Et le jeu laisse constamment un grand nombre de possibilités pour utiliser pertinemment à court et/ou à plus long terme ses tirages quels qu'ils soient. Le tout est de trouver la bonne ou la meilleure utilisation (ce qui est moins facile que de pester contre les dés...). Et encore une fois, ce n'est pas le dé qui choisit les numéros, qui bouge Charlemagne, qui joue les couleurs et qui les place. Trouver le ou les moyens de contrôler efficacement les aléas du dé est un des défis majeurs et un des plus passionnants que l'on a à relever à CM et il serait dommage de s'en priver en utilisant des variantes qui limitent le jeu à un schéma de déroulement restrictif et répétitif. Malgré les deux seules qui me semblent à présent viables et que j'ai décrites ci-dessus, je n'utilise plus aucune variante au jour d'aujourd'hui pour jouer à Carolus Magnus.

Ludiquement.

Bon, puisque Palferso insiste tant, je vais moi aussi y aller de mon refrain sur Carolus Magnus. :wink:
J’ai bien peur que mon discours soit aussi aride que le sien, et malheureusement réservé aux inconditionnels du jeu… :kingboulet:
Mais bon.


En guise d’intro
Carolus magnus est un jeu unique dans son fonctionnement (la forme) mais aussi dans son concept (le fond) :
Dans la forme, il n’y a pas besoin de faire un dessin, c’est clairement du jamais vu.
Dans le fond, je pense aussi qu’on est en face d’un concept inédit : entre autres, pour gagner une région, je dois contrôler les couleurs présentes dans cette région, notamment en investissant mes cubes de couleur à la cour. Or, je ne suis pas maître des couleurs de ma réserve puisqu’elles dépendent du tirage! C'est ce qui fait dire qu'il y a du hasard...

Comment alors contrôler un jeu dans lequel je n’ai pas le contrôle sur les couleurs des paladins qui font gagner les régions ?!?
La réponse est assez complexe : je dois gérer une donnée variable (le tirage des trois paladins), ce qui va peser sur ma façon de jouer. Mais les paladins arrivent dans une réserve et non directement à la cour. Comme j’ai déjà 4 paladins en réserve, les nouveaux venus peuvent aussi bien prendre directement le chemin de la cour que rester tous en réserve…
En même temps, je dispose d’un magnifique outil de réglage : mon disque de phase d’ouverture, qui va non seulement décider de ma position dans le tour de jeu mais également du déplacement maximum de Charles.
La clé principale du jeu est bien là : je n’ai pas le contrôle des couleurs qui entrent en réserve, MAIS en combinant ordre de jeu, mouvement de Charles ET entrée de 3 couleurs de mon choix dans ma cour (accessoirement sur le plateau), je peux structurer mon tour de jeu et viser un objectif à court terme. Objectif qui est lui-même plus ou moins dicté par la configuration actuelle du jeu (qui maitrise quoi, où se trouve Charles, où peut-il aller, en quoi suis-je menacé,…). En ce sens, Carolus Magnus n’est ni un jeu tactique, ni un jeu stratégique, mais plutôt un jeu « pragmatique » (ce qui n’est pas la même chose qu’opportuniste).

Vous avez dit pragmatique ?
Et oui, pragmatique… Et pour plusieurs raisons :
-votre tour de jeu est grandement dicté par la configuration actuelle des régions et des cours : on est donc bien dans la réaction, et dans l’efficacité immédiate ou à court terme (c'est-à-dire au maximum à + 2 tours).
-Il y a une donnée essentielle dont personne ne parle (à ma connaissance) : je rentre 3 paladins dans une réserve qui en contient 4. A mon tour de jeu, je mets 3 paladins de ma réserve dans ma cour. En 2 tours, je peux donc renouveler plus de 80 % de ma réserve ! Je dois donc être capable d’envisager la résolution du tour en cours mais aussi du tour suivant. Jouer à plus long terme (c'est-à-dire préparer ses actions au-delà de 2 tours) est donc très incertain.

Carolus Magnus, ou Contrainte Maximus ?
La clé du jeu étant la combinaison optimum choix des couleurs / ordre de jeu / mouvement de Charles, c’est en limitant les possibilités d’optimisation de l’adversaire que vous gagnerez la partie. C'est-à-dire en le soumettant à des menaces telles que ses choix seront réduits :
-dans le choix des couleurs sur lesquelles miser à la cour (par exemple si vous menacez votre adversaire de devenir majoritaire dans une région stratégique)
-dans le mouvement de l’empereur, ce qui est encore plus grave. Parce que c’est bien d’obtenir la majorité chez votre adversaire dans une région où il possède plusieurs chateaux. Mais ce qui est mieux, c’est de pouvoir vous y rendre pour prendre ces chateaux…

Voilà pour l'essentiel. :bonnetpouic:

Excellent article. Je souscris à plusieurs remarques et j'ai appris quelques trucs intéressants que je vais mettre en pratique à ma prochaine partie. Carolus Magnus est un jeu que j'adore et que je maîtrise mal... Voila probablement pourquoi il me fascine tant.

Parmis les variantes, il ne faudrait pas oublier celle que Bruno faduitti suggère, i.e. celle de la couronne collée... un dé n'est pas tiré et est considéré comme une couronne automatique.

Romain dit:Parmis les variantes, il ne faudrait pas oublier celle que Bruno faduitti suggère, i.e. celle de la couronne collée... un dé n'est pas tiré et est considéré comme une couronne automatique.


C'est une mauvaise variante et elle n'est pas de B.Faidutti (elle est plus connue sous le nom de mi-figue, mi-raisin).
Pour plus de précisions sur Carolus en général et les variantes en particulier, vous pouvez consulter ce lien:
//www.trictrac.net/forum/sujet/carolus-magnus-le-retour-des-variantes

palferso dit:C'est une mauvaise variante et elle n'est pas de B.Faidutti (elle est plus connue sous le nom de mi-figue, mi-raisin).
Pour plus de précisions sur Carolus en général et les variantes en particulier, vous pouvez consulter ce lien:
//www.trictrac.net/forum/sujet/carolus-magnus-le-retour-des-variantes


Moi je l'aime bien, mais je peux comprendre qu'un joueur qui prétend qu'il n'y a pas de mauvaise couleur à obtenir aime mieux voir le hasard guider sa stratégie. Je ne sais pas de qui est la variante , mais je sais que Bruno Faidutti la suggère sur son site.

Romain dit:Je ne sais pas de qui est la variante , mais je sais que Bruno Faidutti la suggère sur son site.

Il me semble qu'elle est de Colovini himself !
On la retrouve en tout cas dans la traduction des règles de base...

Romain dit:Moi je l'aime bien, mais je peux comprendre qu'un joueur qui prétend qu'il n'y a pas de mauvaise couleur à obtenir aime mieux voir le hasard guider sa stratégie.

Bien. Tu n'as sûrement pas lu ou mal lu ce post et/ou celui sur les variantes. Je vais donc essayer de réexpliquer le plus brièvement possible pourquoi la mi-figue est une mauvaise variante:
elle limite souvent le jeu à un bétonnage systématique des couleurs à la cour et peut mener à des situations de blocage (chacun se donne les moyens de se bétonner dans son coin et les parties deviennent répétitives et parfois longuettes).
Ce n'est pas le hasard au sens où on l'entend généralement qui guide la stratégie à Carolus. Il faut intégrer et accepter que perdre des couleurs et/ou des régions est quelque chose qui peut (doit) arriver. Si je ne peux lutter sur un front par manque d'une certaine couleur, j'ai forcément de quoi ouvrir ou consolider d'autres fronts: on a tous le même nombre de cubes dans nos réserves et si je n'ai pas ou peu d'une couleur, j'en ai forcément plus dans les autres. C'est pragmatique comme dirait Damaloch. :wink: Savoir que des régions peuvent être perdues avant que le dé ne le décide et savoir les "abandonner" avec anticipation (c'est à dire faire en sorte que l'adversaire ait à travailler le plus possible pour la récupérer) pour se donner le temps d'en attaquer d'autres est une des nombreux points à appréhender et à assimiler à Carolus (et ce n'est qu'un exemple entre beaucoup d'autres). Ce n'est donc pas le hasard qui décide comme tu l'évoques superficiellement, c'est un peu plus complexe et intéressant que ça. Quant aux variantes, beaucoup interdisent ou réduisent justement ces optiques de jeu différentes (savoir placer sur le terrain, savoir abandonner des régions ou des couleurs, savoir se mettre en danger sur un ou plusieurs secteurs pour être plus incisif sur d'autres, etc.). C'est le cas entre autres de la mi-figue. Maintenant, j'ai joué un moment avec et j'en suis pas mort... :wink: Et si elle te plaît et bien ma foi, c'est l'essentiel! :D
damaloch dit:
Romain dit:Je ne sais pas de qui est la variante , mais je sais que Bruno Faidutti la suggère sur son site.

Il me semble qu'elle est de Colovini himself !
On la retrouve en tout cas dans la traduction des règles de base...


Je ne crois pas qu'elle soit de Colovini. De plus, elle n'apparait pas dans les règles officielles fournies avec la boîte.

Ludiquement.

palferso dit:Bien. Tu n'as sûrement pas lu ou mal lu ce post et/ou celui sur les variantes.


Croies-tu? Personnellement, je pense l'avoir bien lu, mais j'ai une opinion différente de la tienne.

Peut-être parce que je n'ai jamais joué à deux.

À trois ou à quatre joueurs, il y a souvent des couleurs qui ne nous intéressent pas. Par exemple, à trois, s'il y a eu une lutte entre les deux autres pour prendre le contrôle d'une couleur et qu'ils ont déjà 7 cubes de plus que toi dans cette couleur à la cour, tirer cette couleur au dé sera décevant pour toi. Tu peux toujours les mettre sur un territoire pour créer de l'action entre tes deux adversaires, mais cela ne t'aidera pas directement. À quatre, chaque partenaire a tendance à se spécialiser dans deux ou trois couleurs pour sa cour, il ne sert pas à grand chose de mettre une couleur à sa cour lorsque c'est son partenaire qui contrôle la couleur. Tirer au dé une couleur qui est contrôlée par les adversaires et dont le partenaire est en meilleur posture pour prendre éventuellement le contrôle est décevant. On ne peut pas la mettre sur les territoires sans renforcer les positions des adversaires et les mettre à sa cour est comme un coup d'épée dans l'eau.

Mais plus j'y pense, plus je crois qu'à deux joueurs toutes les couleurs ont leur importance. En tout cas, cela me donne le goût de l'essayer pour voir ce qui en est avec cette configuration. C'est déjà mon jeu préféré à trois et j'aime y jouer à quatre, voilà qu'il faut que je l'essaie à deux. Merci :pouicok: :D

Romain dit:En tout cas, cela me donne le goût de l'essayer pour voir ce qui en est avec cette configuration. C'est déjà mon jeu préféré à trois et j'aime y jouer à quatre, voilà qu'il faut que je l'essaie à deux. Merci :pouicok: :D


Si nos divergences d'opinion te donnent envie de découvrir le jeu dans une configuration que tu ne connaissais pas, de tenter d'autres choses et bien alors encore une fois: vive le débat constructif! :D
Ludiquement.