Si le jeu “minimaliste” (ou minimal game design) a connu son moment de projecteurs avec la découverte des premiers arrivées, des ténors du genre, il est maintenant plus installé dans le paysage ludique, même si l’aspect nouveauté est moins présent. Dans quelques semaines, et en avant-première au Festival International des Jeux à Cannes prochainement, vous trouverez dans vos boutiques Twelve Heroes édité par Catch Up Games. Ils l’ont même, ayant foi en leur jeu, proposé en “print & play” aux courageux du cours de technologie.
Quoiqu'il en soit, le jeu de Takashi Sakaue (Art of War) et Masato Uesugi (Welcome to the Dungeon), illustré par Tomasz Jedruszek est un jeu minimaliste puisque vous n'aurez qu'un paquet de 12 cartes chacun, 6 tuiles entre vous et quelques jetons, ici la nourriture, seule ressource du jeu. Précisons de suite que c'est un jeu pour deux joueurs uniquement.
Comment faire bouillir la marmite alors ?
Sur chacune de vos cartes, en plus de l'illustration, vous trouverez trois informations : Dans la partie inférieure, la capacité de la carte et son coût de recrutement (en nourriture). En haut à gauche, sa force. Oui, il va y avoir baston pour prendre l'ascendant sur votre adversaire sur des portions du royaume : 3 fermes à 2 PV où un marqueur contrôle suffit pour en prendre possession ; 2 mines à 3 PV où il vous faudra deux marqueurs en premier et la prestigieuse cité à 4 PV et ses trois emplacements à contrôler. Sur ces 6 territoires, 3 sont visibles entre les joueurs et le premier à avoir 7 PV l'emporte.
Après avoir mélangé votre deck et pioché trois cartes, les tours s'enchaîneront autour de 4 phases que le joueur actif réalisera dans l'ordre.
Premièrement, vérifions le contrôle des régions. Si vous avez des héros avec une force cumulée supérieur à votre adversaire dans une de celles-ci, vous posez un marqueur de contrôle à votre couleur. Si votre ligne de cube est déjà remplie, vous récupérez alors la tuile et ses précieux PVs, révélant éventuellement celle qui est en dessous. Vos héros partent à la défausse (le repos du guerrier, certainement), les héros adverses retournent au campement (très frustrés et plein de hargne pour retourner au combat se venger... certainement aussi !
Vient la phase presque centrale du jeu, celle qu'il faut avoir pensée et réfléchie : la maintenance. Chaque héros déployé dans une région doit être nourri d'une des nourritures présentes dans la région... sinon, il se carapate... ou meurt, suivant votre degré de thématisation. Bref, il est défaussé. Et bim, perte sèche dans vos armées, fallait mieux gérer l'intendance... et on a perdu des guerres pour moins que ça, mon bon monsieur.
La phase de revenu s'en vient ensuite pour souffler un peu. Vous récupèrerez deux nourritures que vous poserez dans votre campement, endroit imaginaire sur la table devant vous... un peu comme votre QG, quoi ! En plus de ça, vous piocherez une nouvelle carte. Vous pourrez en cumulez jusqu'à 5 dans votre main.
Dernière phase et deuxième phase centrale, voici venu le temps de commander. Avec trois actions à réaliser à votre choix plein et entier, y compris en répétant plusieurs fois la même. Vous pouvez dépenser une action pour prendre une nourriture de plus ; Recruter un héros en payant son coût depuis votre réserve dans votre campement ; Déployer un héros signifie l'envoyer dans une région... et un des sels du jeu vient de la décision qui l'accompagne : "Est-ce que je l'envoie avec de la nourriture dans cette région pour que je puisse fournir à l'effort de guerre sur plus d'un tour ? Pour combien de tours ? Je voudrais bien pouvoir en garder un peu pour recruter un autre héros ?... argh.... que faire ?" d'autant que, pour une action de déploiement, vous pouvez envoyer un héros dans chacune des trois régions ; Enfin, il reste possible pour les tacticiens pendards, de déplacer un héros d'une région vers une région voisine... une fois encore avec ou sans nourriture.
Et pan, et de 7 !
Voilà comment, avec brio et 12 cartes seulement en main, on se prend à gérer une économie de guerre. En effet, payer pour recruter un mercenaire qui va faire un p'tit combat et s'en retourne chez lui, ça peut à la rigueur s'entendre pour prendre une petite fermette à 2 PV vite gagnée, sinon c'est vite la ruine ! Et encore, si cette ferme vous fait perdre de vue la capitale, c'est encore pire !
Ainsi donc, prévoir le long terme pour mener une guerre à outrance demande une intendance serrée : Toujours avoir de la réserve, être capable d'acheminer vos vivres jusqu'au lieu des combats, garder en main ses cartes pour ne pas dévoiler trop tôt leur pouvoir afin que l'adversaire ne s'y prépare pas telle une embuscade, ne pas attaquer trop tôt mais ne pas non plus se laisser déborder sinon tout part à vau-l'eau rapidement. Tout ça une fois encore avec un simple deck de 12 cartes. Et Catch Up Games, ne faisant pas les choses à moitié, propose dans cette version 4 paquets pré-construits pour s'initier peu-à-peu aux différents pouvoirs. Mais vous pourrez ensuite jouer par draft pour tenter des compositions personnalisées ou utiliser la popularité d'une région pour emporter les égalités, ce qui change encore une fois toute la dynamique des mouvements et de la guerre à mener.
Mener ses héros à la guerre n'est pas le plus difficile, le plus difficile reste encore de maintenir la pression et ne pas craquer le premier ! Et là, vous serez le vrai héros des 12 ! Une belle réussite que ce Twelve Heroes !