Le coup de coeur du mois : Cowboy Bebop

Un beau matin, à l’officine (je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans…), ces Messieurs Guillaume et Florian conversaient, fous d’enthousiasme à l’idée de tester la boîte que l’on venait d’y recevoir. Qui vivra verra, me dis-je, peu convaincue par les arguments thématiques avancés.

Laissez-moi être franc-jeu avec vous : les animés, je n’y connais rien. Wallou. Queudalle. Et ce n’est pas un monde qui m’attire particulièrement. J’ai aussi ce préjugé sur les jeux à licence : je m’attends souvent à l'habillage cache-misère d’une mécanique au mieux banale, au pire bâclée.

Quelle ne fût pas ma surprise lors de notre Réujouons du soir : je suis immédiatement tombée sous le charme. Monsieur François nous a collé la ramassade lui revenant de droit du fait de ses années de pratique Dominionesque ; de notre côté on a récupéré nos esprits et recollé nos dents, et on est rentrés chez nous.

Fig.1 : Heureusement, ça n'a pas coûté trop cher en carburant 😁

Quelques semaines plus tard, confinée en compagnie de ma boîte, j’ai eu envie d’inaugurer cette nouvelle série du coup de cœur du mois par Cowboy Bebop - Space Serenade, car il devient rare de se faire surprendre par un jeu – je m’en vais donc vous expliquer les raisons de mon admiration.

Pour les explications mécanistiques, je vous renvoie vers l’excellent et très détaillé article de Rafpark, qui semble avoir partagé mon coup de cœur !

Je vais de mon côté passer au cœur de la choucroute : les raisons pour lesquelles ce jeu est entré dans le mien (la troisième va vous étonner !).

Premièrement, l’édition. Des boîtes comme ça, j’en veux tout le temps. Le thermoformage est parfait (#TeamManiaques – mention spéciale au mini trou pour l’aileron du Bebop), on a des standees ET des figs en fonction des préférences (je me sers des standees comme modèles pour la peinture du coup, fort pratique), le moindre détail a été pensé.

Fig.2 : Le sus-nommé mini trou pour l'aileron du Bebop. Je suis apaisée rien qu'en regardant ça.

Le support pour le deck de cartes dégâts par exemple, qui ont le même dos que les cartes du deck commun puisqu’elles viennent le polluer, permet de ne pas avoir à se poser la question de « attends, c’est quoi ce paquet-là déjà ? » - ou pire, la pioche par inadvertance dans le mauvais paquet qui fait perdre 3 minutes de brassage et qui vaut un ou deux regards noirs. Un grand bravo donc à l’équipe de Don’t Panic Games, qui a fait un boulot formidable.

Fig. 3 : La cohérence entre les titres et les effets des cartes dégâts est au poil ! Les cartes moins graves passent directement dans la défausse : on peut s'en débarrasser avant qu'elles ne polluent notre main

Deuxièmement, évidemment, la mécanique. Ben oui. C’est très fluide, ça tourne vite et bien, le jeu marche à 2, à 3 et à 4, avec des ressorts complètements différents en fonction des PNJ disponibles.

Tous les persos sont toujours présents sur le Bebop, mais ceux qui ne sont pas incarnés par un joueur dans les parties à 2 ou 3 sont « corvéables » : on les déplace avec une carte de notre Deck de base, et on peut utiliser leur pouvoir public.

La concurrence pour les bandits n’est pas non plus la même, puisqu’on a toujours 3 planètes : on peut faire la course et à chacun son bandit, ou bien tenter de parasiter ses petits camarades en donnant l’estocade finale et en emportant la gloire. À 4, ce qu’on pourrait également appeler coopération est inévitable, et le sens du tempo est crucial !

Tout cela pour dire que le jeu est très rejouable – j’ai une partie avec chaque personnage sauf Spike à mon actif, et malgré ses allures de jeune premier, j’ai l’impression que ses piochages supplémentaires quasi-compulsifs vont se révéler plus qu’efficaces lors de la prochaine.

Fig. 4 : Ok 3, 2, 1 Let's JAM !

La troisième raison, et certainement celle qui est derrière la réussite de l’ensemble : la passion que le jeu transporte. Ce panneau BIG SHOT – en soi loin d’être vital, donne une ambiance très « Spectacle » aux déplacements de Vicious dans la seconde partie du jeu : on entendrait presque les roulements de tambours au moment de retourner la carte. Les plateaux-planètes sont grands et épurés. Le plateau du vaisseau Bebop sert à peine le gameplay, mais en termes d’immersion il ajoute un plus énorme ! Alors que je suis très eurogames – du genre à gagner du marron plutôt qu’à couper du bois, je me surprends à apprécier le détail.

Fig 5. Et Vicious a été repéré suuuuuuur.... Ganymède !

Les mécaniques des personnages racontent une histoire. On sent que Spike se la joue tête brûlée qui fonce, puisqu’on passe à travers notre deck à la vitesse de l’éclair. Jet est la brute au grand cœur, qui colle les bourre-pifs et qui soigne les blessures. Ed, c’est la petite maligne, le sarcasme incarné, la petite génie en technologie, rien n’est sérieux et c’est tant mieux : elle enquête comme personne et garde les choses organisées en nous permettant de nettoyer notre deck. Enfin, Faye tient la baraque : c’est elle qui rapporte les Woolongs à la maison, qui permettent d’accéder à de nouvelles cartes pour avoir des équipements toujours plus puissants pour le Bebop.

Fig. 6 : En temps normal, je ronchonnerais sur l'hypersexualisation du personnage féminin. On est sur un manga de 98, donc je garde le sujet pour une autre fois 😁

Tout ça, je vous le dis en ayant regardé l’épisode 1 de l’animé uniquement – et je l’avais griffonné auparavant : ce sont uniquement les impressions que j’ai retirées du jeu, je me plante peut-être ! Mais le fait qu’un jeu me raconte à ce point une histoire et caractérise ses personnages, c’est déjà une réussite en soi.

Ce qui m’amène d’ailleurs à un autre point : la sensation coopérative du jeu. C’est un très joli tour de passe-passe : on incarne chacun des membres d’un équipage soudé, mais la mécanique est compétitive : comment rendre le tout cohérent ? La réponse se trouve dans les cartes : chacun peut jouer les cartes de n’importe quelle couleur (et donc de n’importe quel personnage), qui plus est avec des effets d’équipe : on a donc tendance à faire intervenir des cartes d’autres personnages qui ont un effet d’équipe avec le nôtre, puis de nos cartes qui ont un effet avec les autres personnages… Bref, on tire une vraie satisfaction de faire fonctionner les membres de l’équipe ensemble dans notre deck, alors qu’on est en compétition avec eux autour de la table. Chapeau bas.

Fig 7 : Fidèles à eux mêmes, Jet nous remorque alors que Spike nous met dedans. Merci Spike.

Y’en a un peu plus, je vous le mets quand même ? Il y a deux conditions de fin de partie : Vicious s’échappe, ou Vicious est capturé. Je cite ici la règle du jeu :

« Que Vicious soit capturé ou qu’il réussisse à s’enfuir, il y aura tout de même un vainqueur à la partie. Seulement, dans ce dernier cas, il ne s’agira que d’une petite victoire…et il ne restera plus qu’à réessayer ! »

- Le guide du chasseur de primes

Et là, j’ai envie de dire merci aux auteurs. D’ailleurs, je vais le dire. Merci Johan, merci Florian, d’avoir laissé cette marge-là. Pas de système punitif piapiatesque et calculatoire genre « Il s’est échappé j’ai 8 jetons sur les 15 donc tu marques une pénalité de la taille de la moitié de mon flingue au prorata de l’inflation parce que c’est un peu de ma faute mais quand même plus de ta faute s’il a réussi à partir ». J’aime beaucoup cette notion de « petite victoire » : tu peux, en tant que joueur qui va perdre, faire fuir Vicious à coups de tatanes pour priver ton camarade d’une Victoire avec un grand V. Tu peux, en tant que leader au score, le faire fuir pour éviter que les autres ne te rattrapent. Et tu peux aussi la jouer fair-play, roleplay, beau-joueur, bref : te battre jusqu’au bout, en participant à la capture de Vicious, que ça te soit avantageux ou non. J’aime, en tant que joueuse, avoir cette liberté, cet entre-deux mécanico-narratif, et ne pas être prise par la main !

Fig 8 : Allez Spike, arrête de faire la gueule, viens manger.

Bon, j’avais commencé en disant que je n’y connaissais rien en animé. Si vous m’avez lue attentivement, vous savez que j’ai commencé à regarder, finalement. On dirait que mon préjugé sur les jeux à licences n’était bien que ça : un préjugé. Parfois vrai et parfois pas. Comme dirait ce grand philosophe du 21e siècle qu’on ne nomme plus : « Entre avoir des principes et être un sale c*n, la ligne est très fine ».

Alors merci à M’sieur Guillaume et M’sieur Florian qui m’ont permis de rester du bon côté de la ligne, du moins pour l’instant.

Disclaimer, je n’ai pas eu l’occasion de tester le mode solo, je mettrai cet article à jour si j’y viens dans le futur.

Les photos de cet article ont été réalisées par le talentueux Florian Belmonte. Contactez-nous pour vos besoins photos sur vos jeux !

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28 « J'aime »

Oui, il est vraiment très bien ce ptit jeu !

Oui, mais… as-tu vu le film de 2001, Madame Mathilde ?! :slight_smile: Un p’tit bijou de cinoche !!
https://www.youtube.com/watch?v=zJHWmSa6a30

QueuWAH ! A regarder avant, après, ou en parallèle de la série ?

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Plutôt en parallèle

Sur Wikipedia
https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_%C3%A9pisodes_de_Cowboy_Bebop
Le film Cowboy Bebop: Knockin’ on Heaven’s Door peut être inclus dans la continuité, placé entre les sessions 22 et 23.

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Excellente idée que de prendre le temps de nous partager un coup de coeur. Face à la production pléthorique et à toutes les présentations qui passent ici, j’aime me dire qu’en fin d’année il sera possible de regarder 12 jeux qui ont marqué la rédaction de manière plus personnelle. :slight_smile:

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Il peut en effet se regarder indépendamment de la série ; en tous cas, ça ne m’a pas gêné outre mesure ! :slight_smile:

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Très bon article !! et super bien rédigé, mine de rien. Si si…

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Merci pour ce bel article. Fan de la série, ce jeu sera mien dès que le confinement sera levé.

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Pendant ou après, c’est affaire de goût mais je dirais à voir plutôt après (chronologiquement c’est pendant, mais un film au milieu d’épisodes courts ça casse toujours un peu le rythme… et sans pouvoir entrer plus dans les détails le voir après est aussi très agréable). En tous cas c’est très bon !

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C’est vrai que c’est un bel article, et à propos d’un bel article (et avec de bien belles photos !)
Je l’ai tellement attendu ce jeu, prêt à me ruer dessus dès sa sortie qui tardait, qui tardait, que lorsque j’ai enfin feuilleté les règles mises à disposition par l’éditeur je me suis senti bizarrement… déçu. Je ne sais pas comment le dire autrement, et je ne me l’explique pas vraiment parce que les mécaniques sont propres et l’habillage superbe ; peut-être que je l’avait trop idéalisé, ou qu’entre son annonce et sa sortie j’ai craqué pour trop de deckbuildings…
J’attends la réouverture de mon café ludique pour y goûter enfin, et le grand amateur de Cowboy Bebop que je suis croise fort les doigts pour qu’on lui donne tort, et finalement s’y amuser autant que vous !

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Merci ! Il ne me reste plus qu’à attendre la fin du bagne ludique… euh le déconfinement quoi, pour aller piller mon crémier.

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