Finalement les sénateurs ne sont pas entendus
C’est par une coïncidence de calendriers que nous avions découvert que sortait quasi simultanément deux jeux très proches chez deux éditeurs francophones différents et signé du même auteur Carl Chudyk.
“Uchronia” de l’éditeur Français Iello et “La Gloire de Rome” de l’éditeur Canadien Filosofia semblaient partager une étonnante paternité avec le jeu initial “Glory to Rome” de Carl Chudyk publié initialement chez l’éditeur américain Cambridge Games.
Après croisement des infos, il est apparu que Filosofia annonçait son jeu comme étant une traduction de “Glory to Rome” avec des aménagements et que “Uchronia” était une nouvelle version de “Glory to Rome” améliorée par son auteur même.
Du simple point de vue du joueur, cette curieuse collision pourrait paraître au final bénéfique avec deux propositions et deux développements différents d’un même jeu de base. De quoi tester et jauger, estimer les qualités, défauts et différences. Les uns préférant telle option, d’autres pas. Des discutions avaient déjà commencées ici-même dans les forums. Une position qui, vous le comprendrez aisément, est loin d’être appréciée des éditeurs qui s’en seraient bien dispensés.
Seulement la question qui restait en suspend était celle des droits. Un jeu est toujours l’objet d’un contrat entre un éditeur et un ou des auteurs.
Ce contrat de base peut être ensuite décliné afin de céder les droits pour des traductions dans d’autres pays.
Le détenteur des droits est l’éditeur qui “achète” le jeu à l’auteur en contrepartie d’un versement d’un droit d’auteur correspondant en général à un dosage entre une avance d’argent et un pourcentage sur les ventes. Le terme de droit d’auteur est d’ailleurs sujet à caution en France pour les auteurs de jeu mais ceci est un autre débat.
Il apparait donc étrange de voir simultanément deux jeux qui revendiquent leur même provenance (même si l’argumentaire de développement des produits diffèrent) dans une même langue, dans les mains de deux éditeurs différents.
Questionnés, les deux éditeurs francophones nous ont assuré de leur bon droits respectifs. Dont acte. Ce qui ne faisait que rendre la situation plus opaque.
C’est Cambridge Games qui avance son pion dans cette affaire en annonçant chez nos confrères anglophones de BGG sa décision de porter l’affaire en justice.
Selon eux, ils sont les seuls dépositaires légaux des droits du jeu “Glory to Rome” dont ils auraient cédés les droits de traductions à plusieurs maisons d’éditions dont Filosofia pour l’édition en langue française.
L’utilisation des références à “Glory to Rome” et les règles utilisées par l’éditeur Iello dans le jeu “Uchronia” seraient donc , d’après eux, abusives et illégales.
Cambridge Games explique sur le site américain sa version des faits de cette étrange histoire dont certains aspects restent néanmoins assez flous.
Le jeu “Glory to Rome” bien qu’uniquement crédité à Carl Chudyk est d’après Cambridge un jeu créé à quatre mains voire plus dont le deuxième auteur est Ed Carter, un des responsable de Cambridge. Maison d’édition qui fut créé avec… Carl Chudyk.
“Glory to Rome” est un de leurs premiers jeux édités. D’après Ed Carter, c’est son choix de ne pas être crédité comme auteur et de privilégier Carl comme tel. Il existerait néanmoins un document cosigné des deux “amis” détaillant le rôle de chacun dans la création et le travail d’éditeur. Des métiers différents qui se mêlent souvent dans le cas de petites structures.
Bien que Ed Carter s’en défende parfois, il semblerait que leur collaboration soit devenue plus conflictuelle au court du temps. Chacun prenant une route distincte mais avec des enfants communs.
Carl Chudyk a fait part à son ex associé de son désir de ne plus participer aux affaires de la maison d’édition et les deux hommes semblent s’être mis d’accord sur le fait que Carl Chudyk pouvait réutiliser des mécanismes du jeu “Glory to Rome” dans une nouvelle création différente.
Et cette création est donc “Uchronia”.
Il est vrai que le jeu est différent mais au jeu des sept erreurs, il faut bien reconnaître que les similitudes pèsent bien plus lourd que les différences et Iello a présenté son jeu comme "une version améliorée, finie de “Glory to Rome” ce qui, on peut le comprendre agace Cambridge et les éditeurs qui en ont acheté les droits.
Si la justice entre en jeu, le débat portera sur l’identité des jeux. “Uchronia” est il un jeu suffisamment différent de “Glory to Rome” ?
D’autre part, Iello a posé la question sur nos forum de la légitimité des droits de Cambridge sur le jeu.
Se sera donc à la justice de trancher à moins qu’un accord ne se fasse. Ce qui n’en prend pas le chemin à l’heure qu’il est.