Rencontre perpendiculaire : Nina Seul

Rencontre insolite. Rencontre perpendiculaire. Nadine Seul a été la responsable du festival international des jeux de Cannes durant plus de 30 ans. C’est naturellement qu’elle a amené le jeu chez elle. Mère de famille, c’est naturellement que ses enfants sont devenus des joueurs. Parmi eux, Nina. Si nous nous intéressons à Nina Seul aujourd’hui, c’est parce qu’elle a poussé le jeu dans plusieurs sens du terme. Nina est joueuse, et Nina est comédienne. Dans la vie, elle joue et elle… joue.

Jeu.

Le mot « jeu » est un mot complexe. Le dictionnaire en donne plus de 15 définitions. Jeu vient du latin Jocus signifiant « plaisanterie » ou « badinage ». Chez Tric Trac nous savons que jouer est tout sauf une plaisanterie. Bon, parfois on peut tout à fait badiner en jouant… Mais « jeu » est aussi utilisé pour qualifier l’activité des acteurs. L’art de raconter des histoires.

Questions

En vivant à Cannes, en ayant une maman impliquée dans le festival du film et le festival des jeux, lequel de ces deux « festivals » a fait, d’après vos souvenirs, son entrée dans votre vie en premier ?

C’est sans aucun doute le festival des jeux qui a fait son entrée dans ma vie le premier ! La première fois que j’ai joué, c’était autour d’un plateau et non SUR un plateau. J’avais à peine 5 ans lorsque ma mère a commencé à travailler sur le festival des jeux, c’est un âge génial pour commencer à découvrir le monde du jeu qui ne se cantonne pas au jeu de l’oie ou aux petits chevaux pour un enfant !

Chaque année à la période du festival c’était la fête, des tonnes de nouveaux jeux à découvrir et à tester à la maison ou bien au palais des festivals pendant l’évènement… Le festival du film est venu bien plus tard dans ma vie, dans un tout autre genre.

Quel type de joueuse êtes-vous ? Quel genre de jeu pratiquez-vous ?

Je suis une touche-à-tout du jeu de société, attirée à la fois pas les party games, ces jeux d’apéro ultra simples qui vont me permettre de passer un bon moment et de rire avec les copains ou en famille par exemple autour de Time’s up, jungle speed, Twin it, un jeu de dessins comme Esquissé… ou Les loups Garous de Thiercelieux qui est associé pour moi aux nuits d’été sans fin ou après avoir refait le monde on attaque une partie et qui socialement est très intéressant, car on découvre des facettes insoupçonnées de notre entourage…

J’aime également beaucoup des jeux de communication comme Concept ou Dixit dont je suis tombée sous le charme dès la première partie ; un jeu de société plein de poésie qui vous emmène dans un monde onirique et laisse libre cours à l’imagination du conteur. Je suis très sensible aux illustrations des jeux et là avec Dixit c’est magique !

Les jeux de cartes populaires et de bistrots (belote, Rami, poker : pour l’amour du bluff).

Mais j’aime aussi Les jeux de réflexion , tels Abalone : un jeu beau et sensuel, Othello : un magnifique jeu abstrait , les échecs appris avec ma mère puis poursuivis à l’école que j’ai souvent pratiqués lors des longues attentes entre deux répétitions ou scènes au théâtre avec mes camarades comédiens.

Dans tous ces jeux, ce que j’apprécie tout particulièrement, au-delà de la qualité du jeu, ce sont les relations qui vont s’instaurer entre moi et mes partenaires de jeu.

Pour votre métier, vous vivez aux USA, avez-vous constaté une différence de pratique ludique ?

En France beaucoup de mes amis jouent, aux États Unis, les hasards de la vie m’ont fait rencontrer Guy-Roger Duvert, un compositeur de musiques de films, qui est également réalisateur et… auteur de jeu. Il a même présenté en avant-première au FIJ son jeu « Virtual Revolution » et l’adaptation cinématographique qu’il en a faite ! C’est mon voisin à Hollywood et nous avons nos soirées jeux régulières où on affectionne particulièrement les « gros jeux » aux thèmes forts et immersifs. Notre jeu du moment c’est Terraforming Mars. On ne s’en lasse pas ! Chaque partie est différente. Avec ses plus de 200 cartes différentes et toutes les combinaisons qu’il offre, c’est un jeu vraiment addictif. C’est un jeu formidable, aux règles fluides et au matériel très chouette.

Je ne suis pas passée à côté du phénomène des escape games traditionnelles ou en réalité virtuelle qui sont également très populaires aux USA. J’en ai d’ailleurs testé plusieurs très sympa dans des univers immersifs complètement fous ! The Void est un espace dédié à la réalité virtuelle avec plusieurs escape games, j’ai testé l’univers de Star Wars et celui de Nicodemus inspiré par l’univers de Lovecraft.

Des comédiens (Vin Diesel, Dwayne “The Rock” Johnson) assument publiquement leur passé de joueurs de jeu de rôle, Matt Damon and Ben Affleck ont pratiqué Donjon & Dragon sur un plateau de tournage grace à Kevin Smith… Avez-vous déjà pratiqué le Jeu de rôle ?

C’est interessant car LA série ultra populaire et médiatisée du moment « Stanger Things » a énormement médiatisé Donjon et Dragon, via le biais des héros qui passent leur temps à y jouer et qui utilisent meme certaines startegies du jeu pour vaincre les forces maléfiques qui menacent leur ville ! D’ailleurs l’eidteur de jeux Hasbro a sorti en mai dernier une version du jeu inspiré par la série avec les cartes des personnages et une campagne « La chasse à la Thessalhydre » que jouaient les héros dans la première saison.

Je ne m’y suis pas encore mise, mais c’est prévu !!

Avez vous déjà initié vos partenaires de jeu aux jeux (de société) ?

Oui, lors des longues attentes sur le plateau ou entre les répétitions au théâtre !

Quelles influences voyez-vous, ressentez-vous entre l’activité jeu de société et celle du jeu d’acteur ? Utilisez-vous vos talents de comédienne quand vous jouez à un jeu de société ?

Oui, c’est certain que mon métier de comédienne influe que ma pratique ludique. Ou bien est-ce le contraire.

Dans les deux cas, on se met dans la peau d’un personnage avec un objectif, des alliances, des enjeux des émotions. Dans les deux cas, on sort d’une réalité pour se retrouver dans un autre monde gouverné par d’autres règles et motivations dont le vecteur est le personnage. Nous créons en jouant une nouvelle histoire dont le but est de (se) divertir !

Par exemple, lorsque je suis le meneur de jeu dans les Loups Garous de Thiercelieux, je m’implique totalement dans l’histoire afin de rendre le jeu attrayant et de permettre aux autres joueurs d’intégrer pleinement l’histoire et leur rôle.

Les jeux modernes font de plus en plus appel à la narration. Les joueurs veulent une histoire. Cette tendance ne rapprochait-elle pas les deux mondes dans lesquels vous évoluez ?

Oui, la tendance aux jeux narratifs me semble rapprocher l’univers du jeu de société à celui du théâtre et du cinéma.

Dans l’un et l’autre univers on se retrouve pour partager une histoire, une aventure qui va nous emmener dans des univers alternatifs et fantasmés au gré des différents scénarios. Tout le monde cherche à s’évader par le jeu ou bien en allant voir un film, un spectacle, c’est le but recherché.. D’ailleurs depuis que nous sommes tout petits on demande à ce que l’on nous raconte des histoires, donc bien évidemment pourquoi cela changerait en entrant dans l’âge adulte ?

Un auteur de jeux peut-il être considéré comme un metteur en scène ?

Le rapprochement peut absolument être fait dans la mesure où il va créer un univers dans lequel des personnages vont évoluer dans le cadre d’une histoire. En fait, je vois plus l’auteur d’un jeu comme un auteur de pièce de théâtre ou de film : il donne les bases, la direction, les possibilités, les enjeux, le décor. Mais après, contrairement à un metteur en scène, il ne va plus avoir d’emprise sur ses personnages qui seront lancés en roue libre et maitres de leur décision ou bien jouets du hasard.

Le rôle du metteur en scène au théâtre ou du réalisateur au cinéma se rapproche plus du rôle de « la main de Dieu », dans la mesure où il va imposer à ses acteurs ce qu’ils vont ressentir, leurs décisions et la direction que va prendre leur vie. Ici les acteurs vont être un outil du metteur en scène et seront au service de l’histoire.

Dans le cadre du jeu de société, les acteurs/joueurs sont finalement plus libres et maitres de leur partie. L’auteur est bien le créateur, mais une fois que la partie est lancée les joueurs vont s’en affranchir.

Merci Madame Nina d'avoir répondu a ces quelques questions, nous permettant ainsi d'apercevoir à la fois les liens forts présents entre toutes ces utilisations du mot "jeu" tout mettant en évidence ce qui fait peut-être de la pratique ludique un terrain de "jeu" particulier, un terrain où le joueur est, malgré des règles à suivre, si libre.

Cet entretien a été réalisé par mail.

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Pourquoi perpendiculaire?
L’article n’est pas inintéressant mais le choix du titre me laisse perplexe.

Cher Monsieur MacNamara,

La perpendicularité (du latin per-pendiculum, « fil à plomb ») est le caractère de deux entités géométriques qui se coupent à angle droit. En l’occurence, les deux activités de Madame Nina ne sont pas, pour moi, en parallèle, ce qui est souvent utilisé dans ce genre d’article. Pour moi, ces deux activités se rejoignent en un point précis… et c’est ce point qui nous intéresse. D’où la perpendicularité. :slight_smile:

2 « J'aime »

Merci pour l’éclaircissement. J’avais compris que c’était vos cheminements (à Nina Seul et vous-même) qui étaient perpendiculaires, et je ne comprenais pas en quoi.
j’ajoute que deux activités parallèles ne se rencontreront jamais :slight_smile:

même dans un trou noir ?

5 « J'aime »

ok mais dans quel cas aurait il pu se former un angle obtus ?

Dans un trou noir, il n’y a plus de règles… en fin des fois si …

Un prof de math, de première, nous avait dit que deux droites parallèles se rejoignaient à l’infini. Cela simplifiait des démonstrations mais pouvait embrouiller des esprits…
Merci Monsieur Phal pour cette interview, très intéressante et bien vue sur cet aspect double ‘‘jeu’’ très français.

J’aurais bien aimé aussi avoir une rencontre, Seul et si belle …

Elle joue seule?
Oui bon…

Merci pour cet bel et intéressant article. Et puis le titre est parfait :slight_smile:

A renouveler. Excellent article sur le thème du jeu qui permet d’ouvrir une nouvelle fenêtre pour le site Tric Trac (à quand le retour des articles du Docteur Mops sur l’histoire des jeux ?). En réponse à un forum sur l’avenir de TT, ce sont les jeux, mais pas que.

Manque une photo autour du jeu, vu qu’il y en a une autour du jeu…

bizarre, il m’ait jamais venu a l’idée de dire que j’avais rencontré mr phal juste parce qu’on a pu avoir 1 ou 2 echanges sur le forum.

Je confirme que 2 droites // se coupent à l’infini. Le concept d’infini ne pouvant arriver, ce cas de figure n’arrivera donc pas.

“Rencontre perpendiculaire : Nina Seul” + photo charmante = j’ai cru à un article sur un site de rencontre, j’imagine que c’était l’effet recherché :stuck_out_tongue:

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