Ça fristouille sur les réseaux sociaux, ça commence à discuter pour avoir trouvé des éléments sur infogreffe & co parce qu’il y a une soi-disante “grande nouvelle” :
Philibert aurait été racheté par Asmodee.
Vous savez quoi, c'est un petit peu vrai !
« Un "petit peu" ? C'est quoi cette expression qui veut tout dire et rien dire ?» diront les suspicieux complotistes. Cette expression montre tout simplement que derrière un fait simple se cache une histoire qui mérite d'être connue pour comprendre vraiment les choses.
Oui, c'est une nouvelle, une vraie nouvelle : Philibert rejoint le groupe Asmodee, le groupe que les inquiets classifient comme le "Grand Dévoreur", "Prince Démon qui dans les ténèbres les liera tous"... Soit ! Mais qu'en est-il du côté des concernés, en fait ?
D'avance, rétorquons aux : « Et puis, c'est normal que Tric Trac en parle ainsi, eux-aussi ils ont été racheté, alors, forcément...» déclaration qui est généralement suivie d'un clin d'oeil entendu dans l'attitude corporelle typique du "nous sachions". Là encore, vous savez quoi, voyons un peu ce que nous pouvons en dire, après avoir posé questions et pratiqué quelques investigations, en nous en tenant aux faits.
Premièrement : Est-ce une "grande nouvelle" ? Dans le microcosme ludique, c'est une grande nouvelle, mais pour l'immense majorité francophone, c'est juste une nouvelle... Un peu comme une donne qui change et qui fait que certains professionnels agiront autrement et que d'autres ne changeront rien à l'affaire ! Et pour les quidams, ça ne changera même rien. Ils continueront de découvrir des jeux ici ou là, et de les acheter ici ou là, parfois sur la toile, parfois non... Bref, ça ne change "in fine" pas grand chose.
Certes, mais comme nous le disions en introduction, dans le microcosme ludique, ce n'est pas sans signification et donc pas non plus sans conséquences. Voyons donc un peu tout ça !
Mais d'abord, un peu d'histoire
Philibert, c'est une équipe et un passé de presque 40 ans. De petite boutique à Strasbourg, celui qui deviendra le géant de la vente en ligne de jeux de société est passé en premier par la case "magasin de modélisme (maquette) et de jouets". L'évolution du marché l'emmènera rapidement à muter vers le "modélisme et le jeux" pour passer ensuite aux "trains et jeux" avant de finir, dans les années 2000, à ne plus être que du jeu comme Philibert l'est maintenant depuis 20 ans. Un sujet qu'ils maîtrisent donc à fond !
Au départ, le site internet était doté d'une micro-application qui permettait de gérer 1000 entrées maximum. Si un 1001ème jeu arrivait, il fallait en supprimer un ! Rigolo de penser cela dans les années 2000 là où cette micro-application ne tiendrait donc pas 8 mois actuellement :)
C'est en 2011 que 5 salariés rachètent la boite à son fondateur et ces 9 dernières années, autour d'un modèle "d'entreprise libérée", ces personnes, chacun avec 10 à 15 ans d'ancienneté, ont développé le site internet en s'entourant actuellement de près de 80 personnes. 80 salariés, ce n'est pas rien, non ? (Bon, en vrai, dans la période de noël, ça monte jusqu'à 130 pratiquement... Mais bon, les lutins du Père Noël, ils sont encore plus, alors !)
Entreprise libérée, c'est pour chanter "ne la laisse pas tomber" ?
Non, pas du tout ! Et d'ailleurs le fondateur de Philibert travaillait déjà à développer l'autonomie de ses salariés autour de la valeur "Confiance".
Et c'est ça, une entreprise libérée : Une entreprise qui, non sans avoir une forme de hiérarchie verticale, prend surtout la voie de la confiance. Qui mieux que le préparateur de commande pour organiser son poste, puisqu'il sait de quoi son quotidien est fait ? Qui mieux que les chargés de clientèle pour savoir comment s'occuper des clients vu qu'ils les ont au bout du fil ou du tchat au quotidien ? Du coup, lorsque l'équipe Philibert s'est retrouvée à plus d'une vingtaine de membres sur plusieurs sites, ils ont formalisé un modèle de gestion avec prise de décision la plus horizontale possible.
Tout cela continue de grandir, et avec l'évolution du marché ludique, Philibert se retrouver leader sur le marché spécialisé du jeu de société, et c'est un peu comme lorsque tu passes du CM2 où "tu es le plus grand de la cour d'école" au "nain dans la cour du collège". Et pour suivre ça, peu-à-peu, les investissements ne sont plus au même niveau non plus, avec des projets sur de la logistique qui demandent des efforts sur 10 ans. Imaginez un peu ce genre d'investissement sur vos deniers personnels, en auto-financement ? Ou uniquement en crédit ?... Pfiouh, c'est chaud quand même non ?
C'est ainsi que depuis 2 ans, 2 ans et demi, Asmodee, ayant peut-être senti les choses aussi (mais c'est ce qu'on demande à des professionnels, réagir à l'avenir et pas simplement au quotidien), a commencé à faire passer le message que si Philibert avait besoin d'un coup de main, Asmodee serait là. Et ça ne coûtait rien d'y réfléchir... Surtout si c'est pour faire entrer un investisseur, puisque nous parlons bien de ça ici, qui s'y connait, plutôt qu'un autre qui n'y connaitrait rien !
Qui plus est, c'est, d'après l'équipe Philibert, "le bon moment" pour pouvoir concrétiser des projets qui, au lieu de prendre 10 ans, n'en prendront peut-être maintenant que 3.
Du coup, corde au cou ?
Non, pas du tout ! Bis repetita ! Tout simplement parce que, suivant cette logique de décision horizontale, les 5 associés ont rencontré chacun des salariés pour discuter et recueilllir les craintes et les espoirs qu'il pouvait y avoir à s'associer avec Asmodee. Est ainsi arrivé une sorte de "cahier des charges" présenté à Asmodee qui l'a accepté intégralement : Liberté d'organisation interne et liberté éditoriale, maîtrise salariale... Et puis... Rester en Alsace ! (Tiens, ça rappelle une autre acquisition, un peu) D'ailleurs, il va falloir que nous y fassions un tour, ça a l'air chouette, l'Alsace !
De fait, et même s'il a fallu quelques mois avant de concrétiser tout ça, avant de l'officialiser aujourd'hui, il faut bien reconnaître la spécificité de Philibert, son ADN qui lui a valu ce succès, envié par certains, critiqué par d'autres (parfois, ce sont les mêmes jaloux qui font les deux) et pourquoi changer, raisonnablement, une organisation particulière au risque de tout flanquer par terre ?
Alors précision : Philibert, il y a les 2 boutiques (en dur et en ligne) mais aussi Meeple Logistics. Il y a un Phili-bar, mais c'est une autre entité. Meeple Logistics, c'est une entreprise de... Logistique (je vois que ça suit à peu près) qui s'occupe de quelques éditeurs et surtout de financements participatifs. Nous somme donc plutôt dans le BtoC : livraisons auprès du consommateur) que dans le Business to Business (livraisons auprès de professionnels, ce que fait Asmodee en tant que distributeur)... Et ce qui amène à comprendre également l'intérêt, pour Asmodee, de compléter une offre avec une partie qui n'était pas encore prise en compte.
Un conte de fée, alors ?
Vous insistez, c'est pas possible ! Non, pas du tout ! Il a donc fallu que je trisse, merci Cyrano ! Par exemple, certains se sont émus sur les rézosocios que le système de fidélité changeait. Catastrophe. Figurez-vous que c'était juste la première étape d'un changement peut-être pas assez communiqué mais qui en annonce une deuxième, plus avantageuse pour tout le monde. En effet, l'ancien système était intéressant pour des clients très fidèles et très réguliers. L'objectif du nouveau système est de permettre également aux clients moins réguliers d'en profiter également. Ouf !
Le service client, face à un nombre d'usagers de plus en plus important, a un vrai challenge à réussir pour garder cette qualité humaine qui est la leur, l'adn dont nous parlions plus haut, mais l'objectif est bien là.
Maintenant, quant à savoir comment vous allez, individuellement, réagir ? Ça, seul l'avenir nous le dira ! Quant à savoir comment les professionnels, éditeurs et autres boutiques, vont réagir et ce que ça aura comme conséquence ? Ça, seul l'avenir nous le dira !
Ce que nous pouvons vous dire, c'est que nous aurons demain une interview avec des membres de l'équipe de Philibert et que nous avons hâte de partager ça avec vous et de leur poser encore ces questions qui nous trottent dans la tête !
Oui, forcément, nous sommes partie prenant de ce microcosme ludique, donc pour nous, et à plus d'un titre d'ailleurs (mais chut, nous n'en dirons pas plus), c'est une grande nouvelle !