Le Projet, premier jeu de Unexpected Games

Le Projet est le premier jeu d’une nouvelle maison d’édition américaine : Unexpected Games, que l’on pourrait traduire par « des jeux inattendus ».

Et avant de vous présenter Le Projet, il faut d’abord se pencher sur son auteur, et cette nouvelle maison d’édition.

Au commencement, il y a Corey

Corey Konieczka (pour celles et ceux qui lisent cet article à voix haute, on peut prononcer Koneska) était jusqu’en juillet 2019 le game designer vedette de FFG.

Rappelons quelques uns des jeux dont il fut l’auteur, ou le co-auteur. Son tout premier travail chez FFG fut de dépoussiérer un vieux jeu de Derek Carver dont la première édition datait de 1985 chez Games Workshop : Warrior Knight. Travail qu'il accomplit en 2005 avec deux auteurs français : Pierre Cléquin et Bruno Faidutti !

Il signe ensuite Starcraft (avec son patron Christian T. Petersen), puis Battlestar Galactica, Runewars, Les Demeures de l’épouvante, Descent Voyage dans les Ténèbres, Assaut sur l’Empire, Star Wars Rébellion, Discover Terres Inconnues, et Star Wars Bordure Extérieure. Certes, quelques autres collaborateurs et collaboratrices de FFG peuvent partager les crédits de certains de ces jeux, mais c'est quand même une sacrée carte de visite !

Pendant l’été 2019, Asmodee US lui propose de créer tout seul un nouveau studio : ce sera Unexpected Games. Il est juste chargé d’innover, de trouver de nouvelles façons de jouer…

Unexpected Games est créé avec la «bible» suivante :

- Un jeu doit être innovant, dans ses mécaniques, son matériel ou son thème, et c’est encore mieux s'il coche les trois cases.

- Un jeu doit apporter du neuf dans son expérience de créateur, et non pas remplacer un jeu existant. Il ne sert à rien par exemple de faire un nouveau jeu d’exploration de donjons.

- Et enfin, le jeu doit être amusant : il veut que les gens s’amusent, rient, se félicitent, se congratulent…

Le Projet

Le Projet est un jeu multicouche, avec des énigmes et des secrets à dévoiler. Ce qui est en soi un défi pour le pauvre chroniqueur que je suis, puisqu’il va falloir que j’essaye de vous expliquer de quoi il retourne, en essayant d’éviter de vous divulgâcher quoi que ce soit.

C’est donc un jeu de société coopératif, avec une histoire, et un mélange entre stratégie et résolution d’énigmes. 39 missions vont se succéder, regroupées tout d'abord en une campagne de 15 missions, puis 24 autres qui suivent la résolution de la campagne mais dont je ne pourrais hélas pas vous parler.

Le jeu est constitué de trois couches bien distinctes :

L’histoire, racontée à partir d’une BD de 48 pages. Elle commence quand 4 ados achètent un vieux et étrange jeu de société lors d’un vide grenier.

L’action se situe en 1994, et l’auteur s’est inspiré de sa propre enfance et de quelques films marquants comme Les Goonies, Le Vol du Navigateur et autres films pour ados avec du mystère et des adultes inquiétants.

Chaque chapitre/mission de la campagne commencera presque toujours par la lecture d’une ou de plusieurs pages de la BD.

Le jeu, commence généralement quand les héros de la BD décident de faire une partie. Il est temps pour vous d’y jouer aussi.

Le jeu que les ados ont trouvé s’appelle La Clef, et il s’agit d’un jeu dans lequel on joue des espions infiltrant des lieux très sécurisés pour récupérer des codes et les décrypter.

Le jeu est un mélange original et très réussi gestion de main de cartes, de tactique, et de résolution d’énigmes et de casse-tête logiques. Bien que coopératif, joueuses et joueurs ne peuvent pas donner d’indication trop précise sur la valeur de leur main. Coordination et tempo seront aussi importants qu’un bon stock de petites cellules grises, nécessaires pour résoudre les énigmes.

Le Mystère, va se dévoiler au fur et à mesure de la campagne. En effet, l’ancien propriétaire du jeu y a laissé d’étranges messages et autres phrases codées, mais aussi des secrets, matérialisés par des cartes à la signification plus ou moins évidente. Amatrices et amateurs d’énigmes vont se régaler.

Pour un peu plus de détails

Une fois lu le ou les pages de la BD, on va se lancer dans une partie de La Clef, en préparant le plateau de jeu en fonction des indications de la carte mission :

Le plateau de jeu, préparé selon les instructions de la première mission.

Joueurs et joueuses vont choisir un personnage, récupérer son pion et piocher 4 cartes ressources. Les cartes ressources sont de trois couleurs différentes, et numérotées de 1 à 12. Puis, à tour de rôle, chacun effectuera une ou deux actions. On pourra également utiliser l’action spéciale de son personnage en défaussant deux cartes ressources.

A la fin de son tour, on doit obligatoirement refaire sa main de 4 cartes.

Les 4 personnages disponibles, et leur avatars dans le jeu La Clef. On notera leur pouvoir spécial différent.

Les actions disponibles sont au nombre de 4 :

Courir : permet de se déplacer de 3 salles maximum.

Espionner : permet de choisir une salle et de révéler jusqu’à deux pions Indice s’y trouvant.

Recueillir : permet de récupérer jusqu’à deux pions Indice de la salle où se trouve votre personnage.

Regrouper : choisissez une des trois autres actions, et défaussez les cartes ressources et les pions s’y trouvant.

Pour effectuer une action, il faudra "payer" chaque action avec une de ses cartes ressources que l’on va poser sur la carte Action souhaitée. La première carte ressource posée sur un paquet Action n’a aucune importance, mais les suivantes devront obligatoirement être de valeur plus élevée que la précédente. On peut donc se retrouver avec des actions bloquées par une carte de valeur trop élevée. Il est temps alors de choisir l’action Regrouper, qui permet de choisir n’importe quelle carte Action et défausser toutes les cartes ressources se trouvant dessus afin de les défausser.

Certains glyphes dévoilés sur le plateau sont présents dans l'énigme : une fois récupérés par un personnage, ils permettront de dévoiler le symbole sur la console.

Les indices recueillis vont être de différents types :

- Les glyphes qui vont vous aider à décoder la question posée sur la carte mission : à chaque fois qu’un glyphe recueilli est identique à un des symboles de la console de mission, on peut en relever le ou les volets.

- Les pièges, qui vont déclencher des effets peu agréables : du gaz qui va vous obliger à défausser une carte de votre main, des mesures de contre espionnage, qui vont bloquer une carte action jusqu’au déclenchement de l’action Regrouper, et même des caméras de surveillance, qui vont rester en place pendant toute la durée de la partie.

Une course contre la montre

On pourrait penser à la lecture de ce qui précède que le jeu ressemble à une promenade de santé pour des joueuses et joueurs un tant soit peu organisés. Hélas, une fois la pioche épuisée, ce qui peut arriver très vite, surtout si vous abusez de vos actions spéciales, on va mélanger la défausse pour créer une nouvelle pioche, mais en y intégrant 4 nouvelles cartes : les cartes temps. Désormais, quand on piochera une de ces cartes, elle devra être défaussée immédiatement. Et si la défausse contient trois icônes de temps, alors la partie est perdue pour toute l’équipe !

Il faudra donc se hâter de résoudre la mission, sachant que l'on n'est pas obligé d'avoir dévoilé tous les glyphes pour émettre une hypothèse.

Le Projet, mission accomplie ?

Force est de reconnaitre que nous nous trouvons là face à un OLNI* comme on en voit peu : un bon jeu coopératif dont les fins de parties haletantes rappellent parfois les meilleurs souvenirs de Pandémie, des énigmes amusantes à résoudre, et qui vous donneront parfois du fil à retordre, une histoire bien ficelée, quelques « Effets Whaou » qui attraperont même les plus blasés (celui qui suit la troisième mission en est un bon exemple), et enfin un petit côté Legacy non destructif.

Certes, son côté familial assumé risque de le voir qualifié de trop simple par certaines amatrices et amateurs de jeux experts. Mais le vent de fraicheur qu’il apporte dans une production ludique parfois un peu trop sage et classique fait vraiment plaisir à voir, et à jouer.

Et pour quelques renseignements de plus

Le Projet est un jeu de Corey Konieczka, illustré par Andrew Rust-Mills (pour la BD) et Chan Chau (Pour la couverture). Il est édité par Unexpected Games, et la version française est due à Edge.

Vous le trouverez dans toutes les bonnes boutiques pour la somme de 59,90€ environ. Ce n’est certes pas donné, mais rapporté aux 39 missions du jeu…

*OLNI : Ojet Ludique Non Identifié : se dit d'un jeu qui propose une expérience ludique très originale, qui dispose d'un matériel surprenant, de conditions de jeux inhabituelles, ou même les trois à la fois.

Tric Trac

Petit bonus : Unexpected games vient juste d’annoncer leur deuxième jeu : Voices in my Head, dans lequel on pourra jouer les différentes facettes de la personnalité de Guy, pendant son procès au tribunal. On va préparer une brève d’ici la fin de la semaine, et j'ai déjà hâte de l'essayer.

17 « J'aime »

la DA est somptueuse ! vraiment !

1 « J'aime »

Wahow, les montres calculettes, ça donne envie.

2 « J'aime »

Tout à fait raccord avec le début des années 90 !

1 « J'aime »

Voilà qui a l’air très intéressant !

Juste une remarque, Monsieur François, car ça fait plusieurs fois que je le note : on ne met que très rarement une virgule avant “et” en français. Donc ici, par exemple : “Il est édité par Unexpected Games, et la version française est due à Edge.” pas de virgule.

Super alléchant!!! Le style, le nombre d’enquêtes, les dessins, l’innovation, l’histoire!! Bravo!!! ET le 2 ème jeu est très intriguant aussi!!!

1 « J'aime »

Merci. Je vais essayer d’y faire attention.

Tant qu’on y est, waouh s’écrit avec un H à la fin :wink: Sinon, c’est une production de l’industrie agroalimentaire qui ne mérite pas vraiment la pub :slight_smile:

1 « J'aime »

J’en avais une, casio comme ça :rofl:

Désolé j’ai fait un placement de virgule qui ne sera pas du goût de tout le monde (et j’aime les virgules avant un et : ça permet des respirations et je trouve ça élégant. Il paraît même qu’on peut en trouver dans des œuvres littéraires de qualité)

1 « J'aime »

Je me souviens avoir commencé à regarder les vidéos GameNight! dans lesquelles Nikki, Deborah, Aaron et Lincoln jouent à la version anglaise du jeu (The Initiative). Bien sûr, c’est déconseillé si vous voulez y jouer car certains indices et autres “twists” y sont révélés. C’est une des raisons pour lesquelles j’ai arrêté de les regarder.

Mais il y avait d’autres raisons. D’une part, j’ai senti une forme de désintérêt de ma part face à un mode de jeu qui me semblait un peu trop répétitif (ce n’est peut-être qu’une impression liée au fait qu’un spectateur ne s’implique pas de la même manière qu’un acteur). D’autre part, j’ai trouvé les premières “énigmes” trop faciles (c’est-à-dire que le message à décoder était plutôt facile à deviner dès les premiers glyphes trouvés, récupérés et traduits dans la plaquette à fenêtres). Enfin, je me souviens avoir conclu que le jeu était meilleur en y jouant à quatre plutôt qu’à deux (alors que ce dernier nombre de joueurs est probablement celui qui me concernerait si je cédais à mon envie de l’acquérir).

Quel est votre avis, Monsieur François ? Le jeu est-il répétitif et pourrait-il être joué à deux personnes avec autant de plaisir qu’en le jouant à quatre ?

@mammieyannick: “très rarement” est largement exagéré (cf. https://unmondesansfautes.blogspot.com/2015/01/le-et-et-la-virgule-je-taime-moi-non.html), donc François ne vous précipitez pas à supprimer toutes vos virgules avant “et”, qui sont parfois indispensables, et parfois ajoutent un confort de lecture sans être proprement fautives (comme ici-même)

Bonjour Mr François,

Est ce que le nombre de joueurs a une influence sur l’expérience de jeu ou est ce que c’est aussi bien à 1, 2 ou 3-4 joueurs?

Merci, mais j’avais bien en tête ces cas particuliers, d’où le rarement. Et j’avais pris garde que ces exceptions ne s’appliquaient pas dans le cas qui nous intéresse.

Par contre, un seul ‘m’ à mamieyannick :wink: