exploration ludique : deal american dream

C’est dans la peau d’un gangster, où sa réputation est entièrement à faire, que vous accepterez de vous plonger en jouant à DEAL American Dream. Un jeu politiquement incorrect où la production de drogue et sa distribution feront partie intégrante de vos objectifs. Tout ceci dans un jeu qui marie avec subtilité deux autres jeux : Risk et Disque Monde Ankh Morpok (enfin selon moi). Êtes-vous prêt à devenir le prochain parrain de la drogue au pays de l’oncle Sam ?

Auteurs : Tristan Frobert et Vincet Turri

Illustrations : Guillaume Querré

Pour 3 à 6 joueurs

à partir de 12 ans

Pour des parties de 60 minutes

Type : conquête

Rien de tel qu’une explication de règles, accompagnée d’une présentation du matériel pour mieux se plonger dans l’ambiance et voir de quoi il retourne. Une fois le plateau déplié au centre de la table, vous pourrez découvrir le monde dans lequel vous allez évoluer : les États unis, ainsi qu’une partie de l’Amérique du Sud. Une jauge allant de 0 à 15 vous servira à marquer vos points de respect. Points de respect qui sont l’épicentre du jeu, car c’est en obtenant en premier 10 points de respect que vous remporterez la partie. Pour une partie plus longue, vous pourrez opter pour 12 ou 15 points. La seconde jauge servira pour les combats, allant de 1 à 10, avec un marquage à 3 et 6 points pour les lieutenants et le boss. Dessous différentes icônes qui accueilleront les piles de cartes armes et évènement ainsi que leurs défausses respectives.

Cette carte est divisée en territoires, de 3 couleurs possibles : bleu pour les cases de conso, rouge pour les cases de prod, et enfin gris pour les territoires neutres. De plus différentes lignes maritimes vous permettront de rejoindre des cases éloignées à l’aide de ports bien utiles.

Après avoir choisi le clan que vous désirez représenter, chacun disposant d’un pouvoir différent et se plaçant sur un endroit spécifique sur le plateau, vous recevrez une carte cible au hasard sur laquelle sera indiquée un autre boss de clan (donc un autre joueur) que vous devrez abattre en échange de 5 points de respect. De plus, vous recevrez 5 cartes arme, ayant une puissance allant de 1 à 8, allant de la banane au char d’assaut. En bas de ces cartes, des silhouettes sont dessinées, il faudra posséder le nombre donné de troupes pour pouvoir l’utiliser, ou du moins pour espérer faire des dégâts dans les rangs adverses.

Vous voici parez, la partie peut alors commencer ! Chaque tour d’un joueur se déroule en 4 phases :

  • Phase 1 : les ressources. Pour chaque territoire conso (les bleus), que vous contrôlez, où se trouve donc au moins une de vos troupes, vous recevez 1M$. Pour chaque territoire prod (les rouges), que vous possédez vous pouvez recevoir 1 came ou 1 soldat. Ces valeurs passant à 3 au lieu de 1 lorsqu’il s’agit d’une capitale (les territoires bordés de banc, au nombre de 4 dans le jeu). En outre durant cette phase vous pourrez également vendre votre came, en suivant cette échelle (par territoire), le premier cube est vendu 4M$, le second 2M$, et le troisième 1M$, si vous vendez donc 3 cames en même temps sur le même territoire vous recevrez 7M$.
  • Phase 2 : recrutement. Ici c’est simple, avec l’argent que vous possédez vous pouvez recruter de nouvelles troupes, les soldats valent 1M$ et les lieutenants 6M$. Il n’y a pas de limite, si ce n’est celui de l’argent que vous possédez. Ces nouvelles recrues devant obligatoirement aller sur un territoire conso ou prod, pas sur un gris.
  • Phase 3 : actions. Durant cette phase vous pourrez déplacer tout en partie de vos troupes et vos cames. Les soldats se déplacent de 1 case, comme les boss, tandis que les lieutenants se déplacent de 2 cases (en une seule fois). Bien entendu pour se déplacer les territoires doivent être adjacents, être vides ou être votre propriété, si vous passez dans par territoire ennemi un combat s’engage (j’en parlerais un peu plus loin). Les pions came ne se déplacent que d’une seule case, entre deux territoires que vous possédez seulement.
  • Phase 4 : Deal. Lors de cette phase, vous pourrez échanger de la came et des armes avec les autres clans, en échange de jolis billets verts ou d’autres cartes. Vous pourrez aussi défausser la totalité de votre main (et pas une partie seulement), pour en refaire une à 5 cartes. Chaque clan détermine la valeur de son échange à sa guise, la seule contrainte est que les deux partis soient d’accord.

Maintenant que vous connaissez les 4 phases qui composent un tour de jeu, il sera plus aisé de vous parler des subtilités et autres points de règle. Revenons au combat. Première précision importante le boss ne peut attaquer spontanément un autre territoire que si celui-ci dispose de son boss également. Par conte l’inverse est possible. Lors des phases de combat, les joueurs vont se servir de la jauge présente sur le plateau pour comptabiliser leurs dégâts. Chaque joueur impliqué va donc choisir simultanément 1 carte de sa main et l’abattre. Le clan ayant joué la carte la plus faible subit en dégât la différence de force qui sépare les deux cartes. Fait important il faut posséder assez de troupes engagées dans le combat (représenté par un pictogramme en bas de la carte), pour pouvoir infliger des dégâts. Chaque dégât fait perdre 1 point à la valeur de la troupe, à reporter sur la jauge. Une troupe détruite est retirée du plateau, l’application des dégâts commence toujours par les soldats (1 dégât suffit), puis les lieutenants (il faut 3 dégâts) et enfin le boss (à qui il faut 6 dégâts pour être éliminé). Si le boss est tué, le joueur perd immédiatement. Une fois les cartes jouées, les deux joueurs reprennent une main à 5 cartes, et après avoir regardé leurs cartes, l’attaquant décide s’il poursuit ou non le combat. Si ce n’est pas le cas, il recule. Il ne peut jamais y avoir deux clans sur un même territoire (il n’est pas possible de dealer cette possibilité, même si ça pourrait être sympa à 6 joueurs). Pour les capitales c’est un peu différent, elles possèdent toutes d’office, un clan local, qui dispose d’une valeur de 10 troupes. Pour les combats, les cartes seront directement piochées dans la pioche, au hasard, autant vous dire qu’il faudra les attaquer avec un nombre conséquent de troupes. Il existe 6 armes spéciales dans le jeu, une par clan, qui permet à celui qui le représente d’utiliser un pouvoir si jamais il possède dans sa main cette carte.

Pour atteindre les 10 points, les joueurs vont pouvoir abattre leur boss ennemi (désigné par la carte), en échange de 5 points, mais aussi prendre le contrôle de certains territoires marqués, ces points pouvant être perdus. A chaque fois qu’un territoire est acquis, une carte évènement sera tirée. Il existe quatre styles d’évènements : les généraux, ceux touchant un clan, les évènements permanents (marqués d’un sablier) et les évènements instantanés. Enfin, chacun aura à sa disposition une carte avec des objectifs secrets, qui leur permettra de leur donner des objectifs et ainsi influencer leur jeu. Les points n’étant remportés que lorsque la carte est montrée à tous. Une fois obtenus et révélés, les points ne peuvent être repris.

Vous avez maintenant toutes les cartes en main pour mieux voir de quoi il retourne.

J’ai littéralement été bluffé par le matériel de ce proto. Aussi bien par sa qualité matériel que son style graphique qui se démarque parfaitement des productions habituelles, avec ses aplats de noir qui n’auront aucun mal à nous plonger dans un monde sombre que n’aurait pas démenti Franck Miller et son comic Sin City. Chaque joueur dispose d’un matériel conséquent à sa couleur, qui ressort énormément sur ce fond noir et blanc, dont une aide de jeu personnalisé bien utile. Mention spéciale aux personnages qui disposent chacun d’une personnalité qui transparait dans son rendu du graphique, sans qu’aucun ne fasse doublon (dommage il n’y ai pas de femmes, même si j’ai oui dire qu’elles seraient présentes dans une future extension). C’est très réussi. Tout est bien lisible, facilement repérable et différentiables d’un coup d’œil. Il y a un vrai travail derrière ainsi qu’une prise de risque que je ne pouvais que mettre en avant. Bravo aux artistes !

Je ne pourrais vous cacher que lors de mes premières parties j’ai irrémédiablement pensé à Risk, mais aussi à Disque Monde (Ankh-Morpok), en jouant à Deal. Même style de plateau avec des territoires, des troupes qui se déplacent en masse, des recrutements, tout était là pour me faire penser à cette référence ludique militaire. Assassiné, avoir une cible, des objectifs et toujours des territoires ont fait que l’ombre du jeu tiré de l’œuvre de Terry Pratchet, Disque Monde, n’était pas loin. Pour autant la partie avançant, cette impression disparaissait petit à petit. Appuyé par des graphismes originaux, et une expérience de jeu tournant beaucoup autour de la négociation, Deal prenait petit à petit un tout autre chemin, pour emprunter sa propre voie.

On négocie de la came à droite, on envahit un territoire à gauche, pendant qu’un autre bénéficie d’un évènement pour l’aider à s’avancer dans les territoires, tandis que le suivant planifie déjà votre mort. Il y a un peu de tout ceci dans un tour de jeu. Sans oublier les duels non dénués de bluff et de coup bas, où personne n’est à l’abri d’un retournement de situation. Tout ceci est très dynamique, et l’on a pas le temps de s’ennuyer autour de la table.

Chaque clan dispose d’un pouvoir différent, de quoi varier les plaisirs. De plus selon le nombre de joueurs et leur tempérament, toutes les parties seront bien différentes. Car nous n’avons pas tous la même manier de jouer, de négocier et de gérer sa came et son argent, ce qui va forcément créer des variantes plutôt sympathiques qui vont inexorablement rallongées la durée de vie. Surtout qu’une partie n’est pas très longue au final, étant donné le style de jeu, et arriver jusqu’à 10 points de respect ne semble pas si impossible que cela. Actuellement il est juste dommage que certaines cartes objectif soient plus compliquées que d’autre, surtout que le hasard n’est pas non plus totalement absent, par le biais des deux pioches, armes et évènements, même si tous restent tout de même très contrôlables. C’est à mes yeux un point à travailler en plus du fait que l’élimination d’un joueur soit définitive et donc assez punitive. Une manière de ramener ces joueurs dans la partie pour enquiquiner les autres pourrait être un plus agréable et amusant, qui je pense pourrait véritablement plaire aux joueurs, sans que cela ne nuise au thème du jeu, en ramenant les joueurs sous la forme de dealer infiltré ou de policiers.

Je suis donc ressorti de mes parties avec une très bonne impression, je ne me suis pas ennuyé, tout est assez fluide et donne envie de s’y replonger dès que l’occasion se présente, car il faut bien l’admettre Deal propose un thème et une expérience de jeu assez unique. Et que vous aimiez ou non Risk (par exemple), je ne saurais que trop vous conseiller de l’essayer, car il y a de fortes chances pour que vous ne soyez pas déçus, bien au contraire. Une excellente découverte qui a su s’inspirer de ses prédécesseurs pour offrir une expérience de jeu renouvelé, original et prenante.

Le jeu sera en financement participatif sur Kickstarter à partir du 27 mai. Plus d’informations sur sa page Facebook.