Demandez nos jeux à votre détaillant

[Argo]

Demandez nos jeux à votre détaillant

Vous avez probablement déjà lu cette phrase, ici ou ailleurs : 'Demandez nos jeux à votre détaillant'.

Et la plupart d’entre-vous se sont naturellement dit 'Pas nécessaire, mon détaillant rentre toutes les nouveautés, donc il aura ce jeu quand je passerai le voir'.

Et jusque il y a peu, c'était effectivement généralement correct: la plupart des détaillants suivent activement les nouveautés, et travaillent activement à pouvoir vous les proposer en rayons dès leur sortie. Du coup, toute nouvelle sortie en Français se retrouvait sur les rayons de quasiment tous les détaillants.

Je dis jusque il y a peu, car nous avons vu ces derniers temps beaucoup de changements dans le petit milieu du jeu de société, et il me semble utile de revenir ici sur ces changements.

Les détaillants ne peuvent à l'heure actuelle matériellement plus vous présenter d'office toutes les nouveautés qui sortent.

Non seulement le nombre de nouveaux jeux disponibles rien qu'en français chaque année à quasiment triplé ces trois dernières années, mais il est tel que plus aucune boutique de jeux n'a assez d'espace pour mettre en rayon ne fut-ce que un exemplaire de chaque jeu sorti cette année.

Et pour les boutiques web, ou l'espace de rayonnage est 'infini' (en fait il est limité par leur entrepôt, mais sans commune mesure avec un détaillant traditionnel) la limite n'est pas l'espace mais les finances.

Alors attention, c'est ce qu'on appelle un 'bon problème à avoir': les joueurs n'ont jamais eu autant de jeux à leur disposition, et les types de jeux existants se diversifient de plus en plus.

Là ou il y a quelques années on avait une nette distinction entre quelques grandes catégories de jeux, on trouve aujourd'hui des jeux de tous types. Le monde du jeu est devenu aussi riche que celui du livre ou de la presse magazine, chaque joueur est aujourd'hui assuré de trouver un jeu qui corresponde à sa personnalité, à ses envies ludiques et à son groupe de joueurs!

Mais cette prolifération à des conséquences, et d’autres changements dans le milieu du jeu viennent s’y ajouter.

Premièrement, il y a la montée du financement participatif, qui amène des modes de communication différents de ceux de l’édition ‘traditionnelle’. Pour une édition ‘traditionnelle’, on lance la communication une fois que le jeu est presque disponible, pour soutenir sa sortie en boutiques et dans le catalogue du distributeur. Avec le participatif, il y a une communication avant le lancement du projet, pour amorcer la pompe, beaucoup de communication durant le projet, et tous les éléments du jeu sont exposés et détaillés durant la campagne, qui précède la sortie du jeu de plusieurs mois, parfois même plus d’un an. Quand le jeu est ensuite fabriqué et disponible, il faut de nouveau communiquer dessus avec une situation un peu paradoxale ou le ‘nouveau produit’ qui est disponible maintenant est en fait déjà un ‘vieux produit’ pour lequel une grosse campagne de comm’ à été faite lors du financement.

Couplé à l’augmentation du nombre de jeux, il devient très difficile de le remettre sous les projecteurs quand il devient disponible, d’autant plus que les vidéos, nouvelles et autres ont déjà été faites lors de la campagne.

Et le 'nouveau' jeu est perçu par le détaillant comme un 'vieux' jeu car il en a déjà entendu parler il y a des mois.

Deuxièmement, il y a de gros changements dans le secteur de la distribution. Les gros distributeurs deviennent très gros, et de nombreux nouveaux acteurs sont apparus pour offrir des alternatives, et offrir des fonctionnements différents. Et on trouve de tout, du distributeur ‘low cost’ qui prend peu de marge mais n’offre que des prestations purement logistiques et du dépôt vente, au distributeur ‘high end’ qui prend une plus grosse marge mais achète des tirages complets en achat ferme, ou achète carrément les éditeurs pour en faire des studios de création sous leur label.

Ici encore c’est sain et globalement positif d’avoir des changements et du développement dans le secteur de la distribution, mais il y a des effets de bord.

Le plus visible est que les ‘gros’ distributeurs ont un catalogue plus étoffé que les ‘petits’.

Comme un détaillant doit commander au moins pour un montant donné pour obtenir un envoi sans frais de port, il lui est plus facile de préparer une commande dans un gros catalogue, et les produits issus de plus petits distributeurs seront commandés moins souvent - le temps d’accumuler assez de produits à commander pour justifier la commande.

De plus selon le montant total commandé, le détaillant obtient une remise commerciale proportionnelle, parfois liée à un engagement de reprendre certaines gammes complète du catalogue du distributeur. (Ecoutez l’excellente émission de la radio des jeux consacrée aux détaillants pour plus de détails à ce sujet.)

Comme les finances du détaillant et ses rayonnages ne sont pas extensibles à l’infini, il doit inévitablement ‘arbitrer’, c’est à dire décider quels produits commander pour sa boutique.

C’est la qu’il peut jouer son rôle de commercant : sélectionner des produits qu’il à envie de vendre et de conseiller, et affiner sa proposition commerciale en fonction de son public, et de l’image qu’il veut que sa boutique renvoie.

Il est aussi important de souligner ici que pour votre détaillant, sélectionner les jeux qu’il va proposer en rayons est un exercice assez difficile et périlleux. En effet il achète les jeux de manière ferme au distributeur. S’il se plante, il ne peut pas retourner les invendus à l’éditeur, il devra les garder en rayon, et au pire les solder après un certain temps.

Cependant les points expliqués ci-dessus (taille de catalogue et remises) viennent influencer ses décisions, au bénéfice des catalogues des plus gros distributeurs.

Ces évolutions conjuguées font que votre détaillant ne peut simplement plus proposer toutes les nouveautés en rayon, seulement une sélection. Sa sélection.

Si un jeu vous intéresse, il est dorénavant très important de le faire savoir à votre détaillant. Vous êtes son client, et il est intéressé par vos envies!

Pour la première fois cette année, j’ai eu des retours de mon distributeur et d’autres éditeurs distribués par d’autres distributeurs qui m’ont dit ‘ah ce jeu là toutes les boutiques ne l’ont pas rentré, seulement une partie des boutiques’.

La raison invoquée : leurs clients ne leur avaient pas demandé ces jeux, ils ne peuvent plus tout suivre alors ils ont ‘arbitré’.

Ma première réaction à été la surprise, étant moi aussi habitué à ce que les nouveautés Françaises soient d’office présentes dans toutes les boutiques de l’hexagone à leur sortie.

Mais en se renseignant plus avant et en prenant la peine d’analyser le marché, il devient évident cette époque est révolue.

Je pense qu’on peut dire que 2016 à été à ce niveau un tournant dans l’évolution du marché du jeu de société, il y aura un ‘avant’ et un ‘après’. L’explosion de nouveautés et la consolidation des distributeurs ont ici un effet tangible et qui ne sera pas passager.

Et c’est ici que vous avez un rôle très important à jouer, et dont l’importance va aller croissant dans le futur proche : Demandez nos jeux à votre détaillant!

Et je ne parle pas que pour Flatlined Games, c’est valable pour tous les éditeurs indépendants! Si vous appréciez nos jeux, faites-le savoir à votre détaillant, et il sera ravi d’en tenir compte dans ses commandes. Et nous serons ravis de continuer à vous proposer des jeux toujours plus diversifiés.

(Et demandez Argo à votre détaillant, c’est un excellent jeu ;-) )

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Je pense que le problème est pris à l’envers dans cet article. Il faut d’abord faire des bons jeux et ceux-ci se retrouveront dans les boutiques et ce, quelque soit leur mode de distribution.

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Justement, ce n’est plus suffisant ! Un jeu excellent, bien publié et vendu au bon prix peut maintenant passer sous le radar. Alors oui, il finira par se retrouver en boutiques, mais seulement après que les joueurs aient eu l’occasion d’y jouer et d’en parler, et de le demander à leur boutique. Et vu la prolifération de titres d’une part, et la pression sur les détaillants pour rentrer tout le catalogue d’un distributeur d’autre part, plus rien n’est garanti ni automatique !

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Je voudrais bien connaitre la définition d’un “bon jeu”…

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Prenons l’exemple de l’excellent KINGDOMINO par exemple. De mon point de vue parce que le jeu a le bon mix (auteur communicant, cible inter-générationnelle, principe mécanique connu mais innovant dans son approche), il aurait pu être vendu par à peu près n’importe qui comme distributeur et aurait été un succès. Le souci c’est que le goulot est très étroit et que seuls quelques jeux arrivent chaque année à être sous les feux de la rampe. A nous de nous remettre en cause plutôt que de demander à nos clients de faire le boulot. Ils achètent nos jeux, c’est déjà pas si mal…

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Pour moi “un bon jeu” c’est un jeu qui trouve son public.

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Et du coup, pour trouver son public, le jeu ne doit-il pas déjà être en boutique ? C’est un peu le serpent qui se mord la queue non ?

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Histoire de mettre tout le monde d’accord, je pense qu’il y a un peu des deux : le marché se rétrécit et les boutiques doivent faire des choix alors que, paradoxalement, il y a de plus en plus de jeux. Cependant, un très bon jeu aura toujours plus de chance de percer, quelque soit la taille du distributeur / éditeur.
Alors certes, on sent tout le poids des grosses machines mais un petit éditeur peut encore s’en sortir s’il se défonce. Après, il y a ceux qui considèrent l’édition comme un hobby.

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Je suis un peu surpris par ce texte qui ressemble à un appel à l’aide.
Pour fréquenter plusieurs boutiques de jeux, de type un peu différent (en gros “gamer” et “famille”), les clients font déjà cette démarche de demander un jeu spécifique. Et souvent c’est plutôt “on en a plus” que “j’en ai pas commandé”. Pour le moment j’ai une exception, c’est pour le jeu Bubblee Pop que j’ai recommandé à une petite boutique spécialisé “enfant et famille” (et qui pour le coup a un nombre de référence très limités hors “enfants”) et dont le jeu me paraissait pouvoir rencontrer un certain succès auprès de sa clientèle.

On trouve même des mauvais jeux en boutique, c’est dire ! :slight_smile:

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Tu n’as pas compris mon propos: Ce que je dis en substance c’est que pour un jeu comme kingdomino il y en a 30 autres sur le marché, qui s’adressent à un public plus restreint. ca ne veut pas dire qu’ils sont moins bon ou meilleurs ou plus ou moins méritants, ils s’addressent à des publics différents.
Et pour ces jeux là, le joueur doit savoir que s’il ne les demande pas à son détaillant, il ne les rentrera très probablement pas.
De la même manière que ton libraire propose un assortiment de magazines, et si tu aimes particulièrement la philatélie ou le mécanique, il ne rentrera le ou les magazines dédiés que si tu lui en fais la demande.

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(Et des jeux de la qualité et du niveau de Kingdomino, il n’en sort pas 10 par an :wink: )

Tu as l’effet ‘tiers de remise’ Asmodée quand même, ou une fois qu’un détaillant a pris toutes les références obligatoires pour obtenir un niveau de remise donné, il ne lui reste plus beaucoup de cash à répartir pour le reste.

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Ces exceptions vont se multiplier, du moins je le pense :slight_smile:

La concurrence est clairement devenue terrible et force les éditeurs à trouver de nouveaux modèles. Les joueurs ont changé, les boutiques ont changé et les éditeurs changent. Il suffit d observer l’évolution du rayonnage et du public des boutiques depuis 20 ans (du Jdr à Dooble).

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Tu as oublié de préciser que l’eau ça mouille et que le soleil il chauffe :stuck_out_tongue: :stuck_out_tongue: :stuck_out_tongue:

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Ben je le précise pcq pas mal de monde refuse de voir que les choses e ont changé et avec les fonctions des différents acteurs.

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Intéressant ! Je pose juste un petit drapeau pour suivre le sujet.

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tu n’avais juste qu’a cliquer dans le petit rond pres du titre …

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Petit point de vue de l’autre coté du comptoir, ce qui est mon cas en tant que gérant d’une petite boutique de province. Pour présenter un peu ma situation, sur l’année 2016 j’ai référencé un peu moins de 900 titres différents. (Selon les chiffres que l’on entend ici et là, cela correspond à peu près au nombre de sortie annuelle. Dans les 2 cas je compte les extensions). Parmi ces 900 références, une bonne partie sont des classiques et sont le moteur de ma boutique en terme de vente, bref cela laisse peut de place aux nouveautés, environs 120 pour 2016 pour ma petite boutique.
Alors oui, je sélectionne en fonction de ma clientèle, des jeux que j’ai pu tester en salon, qui m’ont été présenté par les commerciaux qui vienne me voir ou lors de journée pro, et des infos qu’on peu avoir sur internet. Mais surtout, j’en zap, d’autant plus que les sorties sont de plus en plus concentré sur de courtes périodes (essen, cannes). et que le principale outil de communication des éditeurs est le mail, vite perdu dans la masse ou dans la corbeille.

Certains jeux sont inratables portés par de grosse opération de com, mais beaucoup se retrouve noyé dans tout ça. Bien sur, si je rate un “bon jeu” au moment de sa sortie, mon commercial va certainement m’alerter sur cette “nouveautés bientôt en rupture qu’il faut rentrer”, mais les recommandations des clients vont m’inciter encore plus à référencer tel ou tel jeu. L’article est à mon sens très juste sur ce point, il est beaucoup plus dur d’exister pour les petits éditeurs distribué par de petit distributeur fasse à de grosse machine qui, elle, nous impose de référencer leurs nouveautés et dont nous avons les commerciaux au téléphone toute les semaines.

Et effectivement, aucun de mes clients ne m’as demandé Argo, et je ne l’ai pas encore rentré.

Ceci dit arriver sur les étagères ne fait pas tout, il faut pouvoir encore y rester et faire ses preuves pour conserver ces quelques centimètre carré car une nouveauté qui arrive chasse inévitablement un autre jeu. Et là commence le deuxième dilemme du gérant de boutique, “quel jeu ne plus référencer?”

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