Critique de Peak Oil

[Peak Oil]

Les ressources de notre planète ne sont pas inépuisables, nous le savons tous. Et le pétrole est le premier touché. Pour autant cela n’empêche pas les grosses compagnies de le puiser jusqu’à la dernière goutte, en s’enrichissant au passage. Vous trouvez cela assez ignoble ou injuste ? Et bien sachez que dans Peak Oil vous allez justement jouer ces juteuses sociétés. Prêt à vous enrichir en écrasant les autres et en épuisant la planète ? Rassurez-vous ce n’est qu’un jeu. Mais surement que pour les industriels ça l’est aussi …

Main mise sur les start-ups

La prise en main des règles n’est pas forcément chose aisée, du coup je vais essayer de vous décrire celles-ci du mieux que je peux en étant concis. Votre but sera d’être le plus riche, logique vu le thème du jeu, mais vous ne manipulerez aucune monnaie durant le jeu. Une fois le plateau mis en place avec les éléments qui l’accompagnent et que chaque joueur a récupéré son matériel de départ le jeu peut commencer. À votre tour, vous aurez le choix entre 2 actions Réassigner un agent sur l’une des 4 cases d’action + la carte avec ses 5 régions, ou exécuter une Action sur l’une de ces cases avec votre ou vos agents déjà présents. Ensuite vous devrez obligatoirement réassigner un agent. Enfin en payant 2 Barils vous pourrez réassigner un agent supplémentaire. Vous commencez avec 2 agents, et vous pourrez en avoir jusqu’à 4 durant la partie.

Chaque Action possède 2 pouvoirs, être majoritaire au moment de son exécution vous permettra de faire les deux, tandis que si vous êtes à égalité vous ne pourrez en faire qu’une et piocher un baril (je reviendrai dessus un peu après). Parmi ces actions vous aurez la possibilité d’Etendre, ce qui vous permettra de recruter un agent ou de répartir vos autres agents sur le plateau. Vous pourrez Développer, pour ainsi forer et récupérer une carte Champ pétrolier, afin d’ajouter des barils sur une zone de la carte et de gagner des symboles qui compteront en fin de partie. Vous pourrez Investir et ainsi acquérir une petite start-up, dont le prix variera selon le nombre de barils sur la case Technologie en corrélation ou vous pourrez placer 1 baril sur une case Technologie de votre choix. Vous pourrez utiliser les Opérations grises pour déplacer tous les barils du marché noir vers les Technologies ou pour prendre une carte Consultant. Cela vous coutera un baril. Enfin, vous pourrez transporter les barils d’un point d’exploitation vers une raffinerie qui détermine à l’avance le nombre de barils nécessaire à son fonctionnement et les embuches que vous rencontrerez en chemin, c’est le seul moyen de gagner des barils. Ces fameux barils sont de trois couleurs : rouges et jaunes déclenchent des crises pour le joueur qui les tire (les jaunes sont retirés du jeu une fois tiré), tandis que les noirs sont ajoutés normalement au jeu. Lorsqu’il n’y a plus de barils noirs dans le sac la partie prend fin après un dernier tour. On compte alors la valeur de ses starts-ups et champ pétrolier, en fonction du nombre de barils sur chaque Technologie auxquelles elles sont rattachées. Le joueur avec le plus de points l’emporte. Il existe des règles Brutes plus complexes pour les joueurs aguerris. Désolé j’avais dit que je serais rapide, mais il y avait trop de choses à dire.

Simple, mais inspiré

L’ensemble du jeu propose un design délicieusement rétro (oui je me suis encore fait avoir par le design, mais pas que). Lorgnant sur les années 50, cette période faste pour les finances (moins pour l’écologie). Le tout est parfaitement lisible, chaque élément est bien délimité malgré un nombre assez important d’icônes et d’éléments clés. Au niveau de la qualité du matériel il n’y a pas de défaut à déplorer, c’est de bonne facture, ça faisait d’ailleurs bien longtemps que je n’avais pas vu des pions joueurs de cette forme. Ah si j’ai relevé un truc, sur les cartes Consultant, une catégorie porte comme nom sur son dos « silver » alors que la couleur principale lorgne plus du côté du bronze. Comment ça, je chipote ?! Voilà à quoi j’en suis réduit ! Donc, vous l’aurez compris, pas de réels défauts à l’horizon pour cette édition de Peak Oil.

Un petit côté crise du pétrole de 1971

Peak Oil n’est pas simple à prendre en main sur les premiers tours, tout comme il sera assez difficile de bien le comprendre à la lecture des règles, tant que quelques tours de chauffe n’auront pas té faits. Mais une fois pris dedans les mécaniques sont assez simples. Au fond il n’y a que 2 actions à faire à chaque tour. Pourtant, certains joueurs ont trouvé l’attente entre les tours un peu longue sur les parties à 4 et 5 joueurs. Que les jeunes sont devenus difficiles de nos jours ! Cela ne m’a pas gêné, mais il est vrai qu’il faudra sélectionner des joueurs rapides pour éviter d’intenses réflexions paralysantes. Retenir les 2 actions pour chaque case ne sera pas compliqué, il faut dire que le jeu reste assez logique, sauf sur les barils. On ne sait pas toujours quelle action provoquera la pioche dans le sac et ce qu’il faudra en faire après. Car en fonction des actions l’effet à ce niveau ne sera pas le même. Fort heureusement un ingénieux rappel rapide des règles figure sur ,la dernière page du livret. C’est pour moi la seule ombre du gameplay, pour le reste ça tourne plutôt bien. Par contre, le jeu va assez vite dans ses résolutions, il ne faudra donc pas trainer en route si l’on veut devenir riche le plus vite possible, la fin de la partie pouvant arriver assez abruptement ou alors trainer en longueur selon le tirage des barils.

Le jeu sera plus intéressant à 4 joueurs, à 5 il sera plus long et surtout plus complexe et il sera plus difficile de prévoir ses coups. A 3 il n’y aura pas ce souci de 2 contre 1, mais le jeu propose assez d’interactions pour être plus intéressant avec plus de joueurs. Et à 2 joueurs il tournera mais perdra de sa saveur. Par contre si la boite indique 10 ans, je pense que 12 serait plus approprié, bien sûr les enfants plus jeunes comprendront le jeu, mais cela ne les attirera pas spécialement. De même que nous ne sommes pas devant un jeu familial ou très accessible, il y a pas mal de points à prendre en compte dans une partie. La durée de vie sera assez bonne car Peak Oil propose pas mal de pioches aléatoires. Enfin, la durée d’une partie pourra légèrement dépasser les 60 minutes avec beaucoup de joueurs, et en ce qui concerne le thème je l’ai déjà pas mal abordé. Si celui-ci est bien présent graphiquement, il l’est moins dans ses mécaniques et dans son immersion. Sur ce point, il se rapproche pas mal de Manhattan Project, où le thème ne ressortait pas vraiment au milieu de cette pose incessante d’ouvriers. Après tout dépend de la volonté première des créateurs, est-ce de mettre en avant le thème ou les mécaniques ? Et cela a aussi un fort rapport avec le ressenti très personnel des joueurs.

Ils sont jaunes, rouges et noirs mes barils

Peak Oil possède un thème original, pour autant le jeu reste assez classique. Nous sommes devant un jeu de pose d’ouvriers avec des Actions à déclencher, et même si le nom de celles-ci sont assez explicites on ne ressent pas vraiment le fait d’épuiser la planète. Il faudra faire un effort de mémoire et d’immersion pour se sentir pris par le thème, ça manque de mise en ambiance, et ça tient à pas grand-chose. C’est le souci avec ce type de jeu, c’est que le thème compte souvent autant que les mécaniques. Mais cela n’enlève en rien ses qualités ludiques, le jeu est réfléchi, il tourne bien, c’est logique, mais si comme moi vous le prenez d’abord pour le thème vous risquez d’être légèrement déçu. Même si au fond vous verrez c’est un bon jeu. Pour autant il pourra servir de support pour mieux expliquer le raffinement du pétrole et la société consommatrice dans laquelle nous vivons. Un jeu original qui s’adressera avant tout à un public un peu spécifique ou pour une utilisation « sérieuse » du jeu. Et je dis pourquoi pas, vraiment.

1 « J'aime »