Critique de Carpe Diem

[Carpe Diem]


Si je vous dis Stefan Feld et Alea, les plus aguerris d’entre vous devraient d’or et déjà se lécher les babines (ludiques bien sur). Il faut dire que tous deux jouissent d’une certaine notoriété, et voir apparaître un nouveau jeu où ces deux noms sont associés donnent envie. Carpe Diem est donc cet élu, mais est-il à la hauteur de la tâche qui lui incombe, des désirs que l’on met en lui ? La réponse dans les lignes qui suivent !


Je me suis foulé le cerveau !


Bon voici le point épique de l’article. Car voilà Carpe Diem possède un nombre assez important de points de règles et de choses à connaître. Donc sans vous dévoiler l’ensemble de celles-ci et si possible sans omettre des points trop importants, je m’en vais vous expliquer les principaux tenants.


Dans Carpe Diem, vous allez construire un domaine antique, à l’aide des tuiles que vous allez récolter au centre du plateau commun. À votre tour vous devez déplacer votre pion sur l’un des deux espaces se trouvant en face de votre position actuelle, prendre une tuile et la mettre dans votre domaine, adjacente à une tuile déjà posée. Si vous avez la chance de finir ainsi un Bâtiment, vous bénéficiez alors de son pouvoir. Gagnant ainsi soit des ressources (il en existe 3), des pièces d’or (qui remplace les ressources), des pains (pouvoirs multiples), une tuile, une carte fontaine (bonus en fin de partie) ou enfin un avancement sur la piste des banderoles. Une fois que le plateau est vidé (des tuiles sont défaussées selon le nombre de joueurs sur les emplacements), on procède à un décompte. En commençant par le joueur le plus avancé sur la piste des parchemins, on dépose à cheval entre deux cartes Objectif l’un de ses disques, permettant ainsi si l’on remplit des conditions de gagner des points ou des ressources sur une ou deux cartes. Et cela, plusieurs fois si on possède plusieurs fois la condition demandée. En sachant que les disques ainsi déposés ne pourront plus servir lors des prochains décomptes, seul celui du tour est pris en compte. On remplit de nouveau le plateau central, puis c’est reparti pour un tour et cela durant les 4 manches que constitue une partie. On procède alors au décompte final. On compte le nombre de cheminées des villas complète et l’on se reporte au tableau, on divise par 2 le nombre d’éléments restants qui sont transformés en points, on ajoute le nombre de points correspondant à la piste banderole, les points gagnés par les cartes Fontaine et enfin, on compte les réalisations faites à partir des contraintes déterminées par le cadre qui entoure son domaine. Le joueur avec le plus de points l’emporte ! Ouf, j’ai essayé de faire court et concis.


Argh !


Abordons désormais le point qui fâche, afin de nous en débarrasser. Le jeu est moche et peu lisible, voilà, c’est cru, c’est dit. Pourquoi me direz-vous ? Il suffit de prendre les tuiles pour se rendre compte du principal problème : les couleurs. Ils existent des tuiles foncées et des claires, auxquelles j’ai dû mettre des gommettes à l’arrière pour bien les différencier (aucun signe distinctif dessus). Les pions banderoles sont minuscules, et surtout les toits des bâtiments sont parfois assez proches, le jaune et le marron pourra facilement poser problème, en plus d’être vraiment peu esthétique. Tout le jeu est assez sombre, les cartes Point n’étant pas épargnées. Quant au thème, il est anecdotique et du coup ne rehausse pas cet aspect qui malheureusement fait défaut à Carpe Diem. La règle est bien mise en page, même si elle est très austère, et le matériel se range assez bien grâce aux sachets. Mais le graphisme et l’édition sont vraiment les points noirs du jeu ! Mais maintenant j’en suis débarrassé.


Rome antique ou autre qu’importe


Une fois n’est pas coutume, je vais débuter ce paragraphe par le public visé. Ici, ce sont clairement les joueurs expérimentés qui sont les premiers en ligne de mire. Il faut dire que les règles sont assez coriaces lors de la première partie et que l’aspect général du jeu n’amadouera pas les novices, qui seront plus attirés par des jeux plus colorés ou marqués. Cependant, Carpe Diem est une petite pépite que l’on aurait tort de bouder. Les choix sont difficiles, mais jamais impossibles, il existe de multiples manières de scorer et la gestion de son domaine sera un véritable calvaire pour obtenir le maximum de points. Mais tout ceci sera vraiment récompensé en fin de partie, où la salade de points apportera plusieurs options aux joueurs et une certaine finesse dans les tours. Le coup des cartes Scoring à choisir et à bloquer est redoutable, un brin sadique, mais terriblement efficace. Quant à ceux qui auraient peur d’une interaction limitée entre les joueurs, soyez rassurés entre les cartes Scoring et le déplacement des pions pour la prise des tuiles, il y a de quoi faire pour se croiser en permanence. Les options sont vraiment nombreuses et chaque élément gagné aura véritablement son importance. D’ailleurs, je n’avais encore jamais vu des pains aussi puissants ! On passera son temps à se demander comment se déplacer pour obtenir ce que l’on veut, mais aussi bloquer les autres, c’est fin, c’est redoutable. Il faudra une véritable gymnastique du cerveau pour gérer son domaine en fonction des tuiles sorties (toutes sont jouées dans une partie), et gérer au mieux les possibilités offertes par les multiples ressources.

Jouable de 2 à 4 joueurs, pour 45 à 75 minutes selon le nombre de joueurs. Le jeu sera plus simple à planifier sur le long terme à 2 qu’à 4, de même pour la durée d’une partie qui sera moindre. Mais toutes les configurations restent agréables à jouer, même s’il ne faudra pas avoir peu de l’analysis paralysis. Pour l’âge, la boite indique 10 ans, pour ma part, j’opterai plus pour 12 ans, et surtout un enfant à l’esprit ouvert. Un mot sur la durée de vie qui est tout simplement énorme avec tous ces points aléatoires. Entre les cadres des domaines, les tuiles ou les cartes Scoring, jamais deux parties ne seront identiques. Par contre le thème est vraiment à la ramasse, on aurait pu mettre n’importe quoi d’autre que cela aurait fait le même effet, sur ce point les jeux à l’allemande ne sont pas gâtés. Mais bon les vrais le savent, ce qui compte, c’est la mécanique avant tout (me tapez pas !). On se creuse la tête en jouant à Carpe Diem, mais on prend beaucoup de plaisir à le faire !


Courbe et apprentissage


Carpe Diem est un excellent jeu ! Pointu, exigeant, avec une très belle courbe d’apprentissage, il propose une expérience très riche, qui ne sera cependant pas à mettre entre les mains de tout le monde, à cause de sa difficulté d’accès. Mais si vous êtes un joueur aguerri, vous prendrez très certainement du plaisir à vous y adonnez, si le fait de vous creuser la cervelle tout en prenant garde à vos prochains tours et vos adversaires ne vous effraie pas. Un excellent cru que vous recommande plus que chaudement, un jeu qui m’a laissé une excellente impression et auquel je rejouerai avec plaisir !

5 « J'aime »