Lançons le débat du jour ; JDR , jeu ou … jouet ?

j'ai lancé ce débat sur le forum JDR du SDEN

http://www.sden.org/forums/viewtopic.php?p=787406#787406

et ça s'empoigne dur ! je voudrais bien l'avis du camp JDP. Je me cite donc :

Lançons le débat du jour ; JDR , jeu ou … jouet ?
Dans livre de Benjamin Caira sur le JDR « JDR : Forges de la fiction », l’auteur lance une théorie intéressante : le Jeu de rôle ne serait pas un jeu, mais un jouet !
Je m’explique :
Un jeu , c’est quelque chose de cadré avec un début, une fin, et des règles normatives : on doit accepter de manière consensuelle une corpus de règles qui valent, au moins, jusqu’à la fin de la partie.
Un jouet , au contraire, c’est un objet avec le quel on joue, c'est-à-dire qu’il peut reveteir toute sorte de formes, selon le désir de l’enfant ; Si ion prend l’exemple d’une boite de lego « Star wars » qui permet de construire le Faucon Millenium, l’enfant construire ce vaisseau spatial avec. Mais il peut aussi construire un vaisseau de son invention ; Il peut même construire une maison. Les mêmes pièces peuvent aussi servir de figurines dans un JDR, ou de monnaie dans une partie de poker.
Le jeu de rôle selon lui (et moi, donc) se rapproche plutôt du jouet. Un objet à la forme fluctuante (on peut jouer à Star Wars RPG de manière parodique, et à Paranoïa sérieusement, même si ces jeux ne sont pas faits pour ça.) Les règles sont très différentes d’un jeu, parce qu’elles font l’objet d’une adaptation du MJ la plupart du temps. Cette adaptation peut être connue ou non des joueurs. De même, les joueurs et le MJ peuvent s’interrompre, au coeur même de la partie d’utiliser certaines règles si ils ne les jugent pas utiles à ce moment de la partie.
Le débat est lancé…

Ok pour la distinction entre le jeu et le jouet, que tu perçois justement.
Néanmoins, je ne suis pas certain que j'assimilerais le jeu de rôle à un jouet. Je crois que ce qui nous induit en erreur est la mauvaise traduction de "role-playing game", qui devrait être "jeu de jeu de rôle". Le jeu de rôle est effectivement bien un jouet : on interprète un personnage, et comme on le veut (tant que les autres le tolèrent), en se rapprochant de l'improvisation. Mais ce "jouer un rôle" (role playing), qui est bien un jouet, est lui même enserré dans un jeu (game) avec son background, sa cohérence et ses règles, un univers restreint, limité, dont les fondamentaux s'appliquent à tous les joueurs. Comme un jeu de plateau. Le MJ peut décider de se passer de certaines règles (d'ailleurs souvent il ne le dit pas aux joueurs, pour qui l'opération est transparente), mais a priori cela ne va pas dénaturer la nature profonde du jeu, pas plus que les variantes des jeux de plateau ne le font. Et si le MJ dénature trop les règles, il est probable que les joueurs protestent parce "ce n'est pas du jeu", ce n'est pas le jeu.
Effectivement, tu peux interpréter un rôle sérieux à Paranoïa; mais ce faisant tu sortiras du cadre du jeu, tu ne joueras pas à Paranoïa - tu te joueras de Paranoïa. Il est d'ailleurs possible que les autres joueurs te jettent ou du moins ne te réinvitent pas (on a tous eu ce genre de boulet à notre table, genre qui veut jouer Conan dans les Terres du Milieu en se grattant les coucougnettes à Caras Galadhon).
Donc non, je crois que le (jeu de) jeu de rôle est bien un jeu, pas un jouet multifonctions.

A moins q'un jouet soit un jouet, un jeu soit un jeu eu un jeu de rôle soit un jeu de role.

Un jeu vidéo est un jeu ou un jouet ?

jmguiche dit:Un jeu vidéo est un jeu ou un jouet ?

Ca dépend encore de quel jeu vidéo il s'agit...

Le jeu : C'est d'abord une pratique désinteressée - ou presque - qui nous apporte du plaisir et de l'amusement

Le jeu : c'est aussi l'objet qui permet cette pratique

Le jouet : Objet qui est mis en pratique dans le jeu. Objet dont on se sert pour jouer. (synonime de jeu comme objet)

Le jeu de rôle est immatériel. C'est plutôt une pratique et un cadre à l'imagination permettant de jouer. Je peux me servir de mon livre de JDR comme jouet (si ça m'amuse) mais la pratique elle-même n'a rien de matérielle. C'est donc un jeu, une pratique avant d'être un objet.

Bien que son idée de réappropriation de l'objet soit très a propos.

Que le jeu de rôle fasse plus appel à des jouets non dédiés que le jeu de société, c'est évident, mais cela n'en fait pas du tout un jouet. Pour moi, tout au contraire, le jeu de rôle est le jeu essentiel, celui qui pousse le plus loin la logique ludique - à savoir la création d'un univers clairement distinct de l'univers réel, avec ses règles et ses objectifs propres.

D'une certaine manière, les jeux de société que nous jouons ne sont que des succédannés un peu paresseux, un peu lâches peut-être même, de jeu de rôles, le jeu de rôles sur table (ou en ligne) lui-même étant d'ailleurs déjà un succédanné tout aussi lâche et paresseux du GN. Mais il est clair pour moi, qui l'ai beaucoup pratiqué, que le jeu de rôles est un jeu, plus même que le jeu de société.

Au fait, la roulette russe est-elle un jeu ou un jouet?

Au fait, la roulette russe est-elle un jeu ou un jouet?

Je pense que le perdant ne se pose plus la question et que le gagnant est trop heureux pour s'en soucier :)

Le jeu de rôle matériel (les livres, les règles...) peuvent être considéré comme des jouets, mais le role-play, les improvisations, ce qui fait l'âme du jeu de rôle et le fait avancer, est un véritable jeu. On parle alors de "jeu d'acteurs", même si celui-ci est enfermé dans un monde aux lois dictées par les règles et l'univers du jeu de rôle.

Selon ce dont on parle, on peut effectivement considérer le jeu de rôle comme un jouet, c'est à dire qu'on l'utilise pour fixer les paramètres du jeu, ou comme un jeu, si l'on regarde le coté "jeu d'acteurs" des protagonistes.

L'analogie avec les jeux vidéos est intéressantes en ce point : la console de jeu (ou le pc) serait le jouet et le jeux vidéo, le véritable jeu qui en découle. Notez que l'on joue avec une console, mais à un jeux vidéo.

Il y a alors peut-être une disctinction à faire entre le MJ (qui possède les règles, l'uinivers...) et les personnages/joueurs. Le MJ serait la console de jeu et les joueurs, le jeu lui-même... (à méditer :) )

Le JdR, jeu ou jouet, je ne sais pas. Mais ce qui est intéressant, c'est de constater que, paradoxalement, plus il y a de règles (des livres entiers pour les JdR), plus la liberté de création et d'imagination est grande. Plus il y a de contraintes, plus le champ des possibles est vaste (voire infini). C'est peut-être le "défaut" des JdS : la tension pas tjrs réussie entre simplicité/complexité du système, plaisir et liberté de jeu. Qu'ils aient des règles simples ou complexes, bcp de jeux, malgré l'enrobage + ou emballant, se résument à un calcul de probabilités ou une optimisation par la logique. Comment en sort-on ? D'où vient le plaisir/la surprise ? 1) par une petite pincée de hasard. 2) grâce à l'interaction des profils (cognitifs, psychologiques, etc.) des différents partenaires de jeu.

Mais c'est vrai que la théorie du JdR-jouet, qui cristallise l'imagination sur un objet (le monde animé par ce JdR), comme sur un pistolet en plastique ou une poupée, semble assez pertinente.

De mon côté, je dirais qu'un jouet est avant tout un objet.

Quand on parle de JdR, on se situe dans l'absolu, on évoque une situation de jeu. Si tu parles de l'objet JdR, alors ce n'est ni un jeu, ni un jouet, mais en général, un livre!!

Quand des gosses jouent aux cow-boys et au indiens dans une forêt, où à se prendre pour action-man (ou pour la force-G, rappelez-vous...), on est dans du jeu de rôle.

Les règles, l'univers, le mj sont des supports, des cadres, pour permettre le jeu (acceptés de manière consensuelle, comme tu dis).

Donc, résolument: un jeu.

J'abonde dans le sens de Bruno Faidutti et de Groscouic. Un jeu.

Je dirai "Jeu" et pour peu qu'il ne soit pas pratiqué par des coureurs d'XP j'ajouterai "Dans sa forme la plus pure" !

bruno faidutti dit: Pour moi, tout au contraire, le jeu de rôle est le jeu essentiel, celui qui pousse le plus loin la logique ludique - à savoir la création d'un univers clairement distinct de l'univers réel, avec ses règles et ses objectifs propres.


Entièrement d'accord avec ça (comme toujours sur le sujet, je suis sur une ligne "faiduttiesque")

Quant à la définition donnée ci-dessus, si on l'accepte, le JdR devient en effet un jouet. Cela devrait à mon avis plus pousser l'auteur à revoir sa définition que les lecteurs à débattre à ce sujet ...

Gracq, peu théoricien, mouchait "Tous ces critiques qui, croyant posséder une clef, n'ont de cesse qu'ils n'aient disposé votre texte en forme de serrure."

Si je ne pense pas qu'un débat "JdR jeu ou jouet" puisse être intéressant, cette définition peut permettre de discuter ce qui dans l'imaginaire du joueur le rapproche de l'enfant plongé dans un autre monde par la grâce seule d'un objet. De quelques centaines de pages de règles comme substituts des pistolets en plastique et des foulards de Cow Boys de notre enfance, en quelque sorte ...

Je dirais que c'est un jeu car il s'agit avant tout d'un univers dans lequel les joueurs tentent de mener leur barque...

Sylvano dit:Le JdR, jeu ou jouet, je ne sais pas. Mais ce qui est intéressant, c'est de constater que, paradoxalement, plus il y a de règles (des livres entiers pour les JdR), plus la liberté de création et d'imagination est grande. Plus il y a de contraintes, plus le champ des possibles est vaste (voire infini).


c'est ça qui est remarquable dans le JDR ! si Si on prend l’exemple de D&D, le JDR le plus pratiqué dans le monde, magré ses milliers de pages de règles. Mes joueurs y jouent sans avoir jamais ouvert un livre de règle. Et moi même, maître de jeu, je ne les ai que feuilleté, je n’ai même pas lu en entier un seul des Manuel Du Joueur !

Situation tout à fait inimaginable en JdP, où les mêmes joueurs font l’effort de lire , mais aussi d’apprendre els regels avant de jouer !

De là à dire que le JdS est inférieur en cela, je n’en suis pas sur : il propose quelque chose de différent : un monde strict, encapsulé dans une bulle de temps bien délimité 45 mn, 2h, 3h et un monde tout aussi défini.

Karis dit:Je dirai "Jeu" et pour peu qu'il ne soit pas pratiqué par des coureurs d'XP j'ajouterai "Dans sa forme la plus pure" !


On pourrait dire le contraire, non ? Les gens qui optimisent leur personnage et/ou amassent des Points d’Expérience ne sont ils pas des vrais JOUEURS de JDR ? Ils cherchent à gagner, eux.

J’ai toujours pensé, vu l’engouement pour D&D, et pour tout ce qui touche à l’optimisation de personnage, qu’il y avait, foncièrement, des rôlistes qui ne jouaient que dans cette optique.

Pour ma part je me sens plus rôliste que joueur, mais je crois que le JDR n’en serait pas où il s’est hissé sans les Grosbills. Il y a d’ailleurs un excellent article de Monte Cook là-dessus sur PTGPTB : http://ptgptb.free.fr/montecook/evmunchk.htm

NB Monte Cook est l’un des auteurs de D&D 3

paul moud'\ubid dit:
c'est ça qui est remarquable dans le JDR ! si Si on prend l’exemple de D&D, le JDR le plus pratiqué dans le monde, magré ses milliers de pages de règles. Mes joueurs y jouent sans avoir jamais ouvert un livre de règle. Et moi même, maître de jeu, je ne les ai que feuilleté, je n’ai même pas lu en entier un seul des Manuel Du Joueur !

Hmmm... Tu t'avances un peu là... Même si Gary Gigax a dit "les dés blah blah blah qu'à faire du bruit derrière un paravent", tous les joueurs et maitres que je connais les ont lues, et en détail.

Je vois que la phrase sur le jouet fait débat. Avant de m’expliquer, j’aimerais déjà la replacer dans son contexte. Elle intervient (p. 220) dans une section appelée « Les règles comme système d’évaluation ». Le paragraphe entier dit ceci (désolé pour l’autocitation) :
« Dans les jeux de société traditionnels, l’une des fonctions des règles est de préciser quelles sont les conditions de victoire : faire échec et mat, aligner le premier quatre de ses pions, récolter dix points, capturer telle pièce ou telle case, etc. Les jeux de rôle sont, à cet égard, davantage des jouets que des jeux : ils fournissent une palette de fonctionnalités si vaste qu’il appartient au groupe, et particulièrement au MJ, d’interpréter à sa guise la notion de victoire. »
J’y reviens plus loin (p. 231) à titre de rappel au début du chapitre sur les exigences ludiques :
« Ses règles ne prescrivant aucune condition de victoire, le jeu de rôle apparaît comme un jouet davantage que comme un jeu. »
Dans les deux cas, je ne parle que d’un aspect du jdr (il y a trois cents pages où j’en aborde d’autres) : un jouet est un dispositif qui permet de jouer mais qui ne prescrit pas les conditions de victoire.
Il n'y a que ces deux remarques sur l'analogie entre jdr et jouet. Je remercie Paul Moud'Ubid pour l'intérêt qu'il porte à cet aspect du bouquin, mais je n'aimerais pas devenir seulement « celui qui dit dans un bouquin que le jdr est un jouet ». J'ai essayé de multiplier les approches du jdr au lieu de le réduire à une seule interprétation, afin de ne pas encourager les lectures caricaturales d'une pratique très complexe.
L’usage que je fais de « jouet » ne me semble pas éloigné des définitions classiques : le manuel d’un jdr est un objet manufacturé utilisé pour jouer. Les règles d’un jeu servent d’ordinaire à trois choses : régir le fonctionnement du système (servir de « moteur » de la simulation), régler les litiges entre participants (en définissant ce qui est licite ou non) et fixer les conditions de victoire. Le manuel de jdr propose un « moteur », permet en grande partie de contrôle ce qui est licite ou non, mais ne dit pas comment on gagne, puisqu’il faut un scénario, un MJ et des joueurs pour s’accorder là-dessus. C’est en ce sens que je prenais l’image du jouet : une balle a des propriétés ludiques, mais elle ne décrit pas les conditions du bon usage de ces propriétés.
Cette remarque a deux sources. La première, c'est Nabokov qui, en plus d'être un écrivain de génie, était compositeur de problèmes d'échecs. Il écrivait à propos des échecs artistiques :
« C’est un art magnifique, complexe et stérile, parent de la forme ordinaire du jeu seulement dans la mesure où, par exemple, le jongleur, en inventant les entrelacements d’un nouveau tour d’adresse, et le joueur de tennis, en gagnant un tournoi, tirent tous deux parti des propriétés d’une sphère. En fait, la plupart des joueurs d’échecs, les maîtres comme les amateurs, ne prennent qu’un intérêt modéré à ces énigmes raffinées, de pure fantaisie et relevant d’une grande spécialisation et, bien qu’ils apprécient un problème renfermant un piège, ils seraient absolument déconcertés si on leur demandait d’en composer un. »
La deuxième, c'est Will Wright, le créateur de SimCity et des Sims, qui définit souvent ses jeux comme des jouets, au sens où ils ne prescrivent pas de conditions de victoire. Très loin des produits Maxis, certains commentateurs de GTA III ou de Morrowind en parlaient aussi comme d'espaces où le joueur n'est pas contraint par les conditions de victoire. Ils utilisent parfois l'analogie du bac à sable (sandbox).
Voilà le contexte de mes propos. Je ne crois pas avoir tenté le coup de force du théoricien qui défend cette unique thèse sur 300 pages.

Comme certains l'ont déjà dit, le jouet définit en premier lieu un objet.
Le jeu, même si nous utilisons le même mot pour définir le système ludique et l'objet ludique trouve quand même son sens premier dans cette idée de système.

Un ballon est un jouet, le football un jeu.

Le jeu de rôle est avant toute chose un système. On peut le transformer de diverses façons mais pour y jouer le système lui reste quasi inchangé : interpréter un rôle dans une narration. On est donc bien au coeur du jeu et d'autant plus qu'on peut même le pratiquer presque sans aucun autre outil que le langage dans les cas les plus épurés.

Vu comme ça, c'est plus intéressant - mais je trouve dommage de ramener la spécificité du jeu de rôles à l'absence de conditions de victoire. En outre, je ne suis pas sûr que l'on puisse aller jusqu'à dire qu'il n'y a pas de conditions de victoire dans un jeu de rôles, car il y a quand meme un "but du jeu" . Chacun cherche enfin à rester fidèle à la personnalité de son rôle, ce qui pour certains rôles peut imposer la recherche d'un objectif précis, et le fait dans le cadre fixé par le jeu un peu comme dans un jeu de société. On peut dire que le but du jeu de roles c'est "faire vivre une belle histoire à mon personnage".

À la limite, le fait que les conditions de victoire ne soient pas clairement spécifiées ne me semble etre qu'un cas très particulier de la spécificité plus générale du jeu de rôles qui est le caractère extrèmement flou et adapatble des règles.

Quant au fait que les Sims ont un côté jouet, c'est très clair, mais ça me semble autre chose... sans que je voie très bien quoi, d'aileurs.

bruno faidutti dit:Vu comme ça, c'est plus intéressant - mais je trouve dommage de ramener la spécificité du jeu de rôles à l'absence de conditions de victoire. En outre, je ne suis pas sûr que l'on puisse aller jusqu'à dire qu'il n'y a pas de conditions de victoire dans un jeu de rôles, car il y a quand meme un "but du jeu" . Chacun cherche enfin à rester fidèle à la personnalité de son rôle, ce qui pour certains rôles peut imposer la recherche d'un objectif précis, et le fait dans le cadre fixé par le jeu un peu comme dans un jeu de société. On peut dire que le but du jeu de roles c'est "faire vivre une belle histoire à mon personnage".

On est bien d'accord sur ce point. Souligner un élément de parenté avec le jouet n'était, dans le cadre du livre, qu'une manière d'introduire l'idée que le jeu de rôle nécessite de laisser cohabiter plusieurs visions du "but du jeu", là où la règle d'un jeu de plateau tend à en imposer une (il y a bien entendu des exceptions : celui qui joue à Il était une fois dans la seule optique de gagner risque fort de passer à côté de l'intérêt de ce jeu). Entre l'absence de "conditions de victoire" comme système codé (donc gérable par un ordinateur) de résolution de la partie, et la présence d'un "but du jeu" (ou plusieurs) comme raison(s) de s'asseoir ensemble à une table de jeu de rôle, il y a beaucoup de place pour l'enquête et pour la discussion.
C'est pour cela que j'ai listé au dernier chapitre une dizaine d'attentes différentes à l'égard du jeu de rôle (la progression, l'interprétation, la simulation, le panache, etc.) en soulignant le fait qu'une partie réussie repose sur un assemblage de ces attentes. L'art proprement "politique" (au sens du vivre ensemble) du MJ est de trouver le dosage permettant à tous de trouver leur compte dans la séance, sachant que tous les participants n'accordent pas la même importance à "gagner des XP" ou à "faire vivre une belle histoire à mon personnage". Cela va se traduire par le choix d'un système de jeu et d'un scénario correspondant grosso modo aux attentes ludiques du groupe.
Ce n'est pas à mes yeux la spécificité du jeu de rôle : j'insiste bien plus sur le caractère incomplet de l'univers et du système de simulation que sur l'absence de conditions de victoire. Et le but n'est pas de créer une opposition tranchée avec les jeux de plateau : on sait combien les jeux contemporains tendent à être hybrides, et combien les joueurs font parfois ce qu'ils veulent des produits qu'ils achètent. On peut jouer à D&D avec des conditions de victoire formulées en XP, et aux Aventuriers du rail sans compter du tout les points. Le but de mon travail n'est pas d'écraser la diversité des pratiques, mais d'aider à en comprendre certaines propriétés.