Qui est arrivé le premier : le thème ou la mécanique ?

Introduite par la version ludique de cette question existentielle : de qui de l’œuf ou de la poule est arrivée le premier ? Cet article cache une question toute bête qui possède pourtant de nombreuses réponses. Ce qui ne l’empêche pas au passage d’être au cœur même de la création d’un jeu. Car c’est par l’un de ces deux éléments primordiaux que l’on débute nos créations.

L’idée d’un jeu survient après une partie, le jeu nous a plu, sa mécanique aussi, mais voilà on pense qu’on pourrait améliorer tout ceci. Ou alors, nous aimons bien un thème, et l’on se dit « tiens ça ferait peut être un bon jeu ». Il est rare que les idées de jeux arrivent d’une autre manière, sauf dans le cas de jeux d’entreprise, où l’idée est de vendre un produit où bien d’expliquer de façon claire et ludique le fonctionnement de l’entreprise. Ici c’est le message caché qui est primordial. Dans ce cas de figure, il serait presque possible de parler de thème, même si celui-ci ne s’exprime pas par un univers, un personnage, une époque ou toute autre évocation classique.

Les jeux à licences sont également un peu hors sujet, car le thème est alors imposé par les commanditaires du jeu, à la charge de l’auteur (ou des auteurs) de trouver une mécanique qui colle à la licence. Il s’agira parfois de prendre la licence comme simple habillage marketing à la manière de labyrinthe avec Star Wars ou Labyrinthe, ou parfois cela ira plus loin comme dans Gears of War par exemple, où le gameplay spécifique au jeu a été intégré (avec succès ma foi). Dans ce cas notre question ne se pose pas, car il s’agit d’une commande.


En matière de marques nous sommes servis !

Il est amusant de voir combien les auteurs procèdent parfois de manière très différente. Certains partent d’une mécanique qui leur plait, creuse autour pour créer leur jeu, tandis que d’autres préfèrent partir d’un thème qui les inspire et ensuite trouver une mécanique qui leur permettra de mettre en avant ce thème.

Chez les défenseurs du thème d’abord, cela leur permet de mieux visualiser le plateau de jeu et les diverses pièces nécessaires à la réalisation de leur idée. Certains étendent cette idée de thème à une ambiance qu’ils veulent faire ressentir avant tout. Comme la suspicion permanente des Loups-garous de Thiercellieux, mais dans ce cas je pense que l’on pourrait presque dire que cela entre quasiment dans la catégorie de la mécanique. Le thème est alors le point central par lequel on entre dans le jeu.

K2 sans son thjème ? Impossible !

Dans le cas de la mécanique, deux cas de figure reviennent assez souvent, soit il va s’agir d’une copie (améliorée ou non) d’un jeu existant, soit d’une nouvelle mécanique (que l’on pense souvent inédite). S’il s’agit d’une simple copie, cette mécanique peut se coupler à d’autres afin de créer quelque chose de neuf, mais souvent le thème aura alors une importance capitale, car il permettra au jeu d’avoir son propre univers et sa propre identité. S’il s’agit d’une mécanique qui semble originale, dans ce cas le premier réflexe à avoir sera de regarder si celle-ci n’existe pas déjà, pour ensuite savoir si notre idée vaut le coup ou non, si celle-ci sera assez originale. Cela n’est pas forcément négatif, car cela permet également de voir en action l’idée que l’on a eue, et de peut-être la revoir ou l’améliorer. Là encore le thème fera la différence. Mais attention soyez vigilant, votre thème ne doit pas être une simple poudre aux yeux pour cacher votre copie d’un autre jeu.


Cependant, la mécanique peut très bien être le point central et unique du jeu, c’est le cas avec les jeux abstraits, les pièces ne sont souvent là que pour pouvoir jouer, rien de plus, et les joueurs se félicitent alors souvent de leur sobriété.

On reproche souvent à Dominion d’avoir un thème « interchangeable »

Dans ce domaine il n’y a pas de bonne ou de mauvaise méthode, chacun choisi sa source principale d’inspiration, qu’elle soit motivée par la mécanique ou le thème. Gardez juste à l’esprit que si votre jeu possède un thème il sera plus intéressant, aussi bien visuellement, mais aussi ludiquement, il faut juste faire attention à proposer un thème qui aille avec la mécanique. Même si parfois un thème peut en remplacer un autre, faisant renaître le jeu sur de nouvelles pistes. Si à l’inverse vous débutez par la mécanique, ne négligez pas le thème qui pourra donner un nouveau souffle ou rendre votre jeu plus accessible. Le tout est au final de rester cohérent et de penser avant tout au plaisir ludique et à l’accessibilité du jeu.

Il ne tient alors plus qu’à vous de chercher la réponse à la question posée en début d’article, au fond de vos envies, de vos convictions et de votre passion.

D’autres articles sur la création sur le Blog Les 1D Ludiques.

Chez moi en général, c'est les thèmes, pour mes petites créations ludiques amateures. Mais de l'idée de base vient très rapidement un système de jeu.

Ca peut se faire les deux en même temps... Exemple pas original pour un sou :

- imaginons un jeu sur les vikings

- on imagine volontiers les vikings raider des cotes pour ramener des ressources à la maison, se développer et devenir de plus en plus costauds en raid. Chaque monastère ou ville gagne un sou au début du tour.

- donc un plateau se construit avec d'un coté la maison, ou on dépense ses sous, de l'autre les cotes à raider. En prenant quelques libertés avec l'histoire, on peut imaginer que es vikings se font la guerre entre clans à la maison aussi, qu'il y a à la fois un coté développement et guerrier à la maison.

- D'où un thème moins historique mais soit cartoon, soit fantasy...

C'est avec ce genre d'aller-retour que je fonctionne.

Je conçois des jeux sérieux pour entreprise. Je conforte ta position, dans ce cas le jeu répond à un besoin factuel du client, à un désir, à des attentes, pas à un thème ou à une mécanique. Il est courant de voir un client demander un jeu de l'oie avec des questions à la trivial pursuit pour gagner des territoires comme dans le risk. La démarche est conditionné par la connaissance du client sur le sujet. Le créateur du jeu a pour objectif de satisfaire ce besoin, de proposer des solutions différentes. Pour faire le parallèle avec le monde du jeu grand public, je pense qu'il est important de préciser qu'en plus du thème et de la mécanique le créateur pense un jeu par rapport à ses utilisateurs, au public qu'il veut toucher, et par extension aux éditeurs qu'il veut séduire. Les trois composantes de la création seraient donc, pour moi, le thème, la mécanique et le public.

@boodchoo : Je suis tout à fait d'accord avec vos propos. Mon dernier article sur mon blog sur al création de jeux pour enfants prend justement en compte cette notion de public. Un autre article à venir parlant justement de ce point (entre autre) est à venir.