Le Spiel n'a jamais été ce que nous imaginions

Le Spiel n'a jamais été ce que nous imaginions

Je reviens de Berlin. Je reviens de la remise du Spiel 2014. Une cérémonie on ne peut plus particulière puisqu’à 66% francophone. 2 chances sur 3 de glousser en français. Oui. Une espèce de rêve pour les joueurs qui fréquentent Tric Trac. Assurément. Et à plus d’un titre. Mais le jury nous a pincés. Là, sur l’avant-bras. Nous réveillant avec un drôle de goût dans la bouche. Nous réveillant avec cette espèce de sensation pâteuse qui ne quitte le palais qu’après excitation des muqueuses. De ces réveils qui vous filent mal au crâne. De ces réveils qui vous donnent envie de gueuler sur le premier qui vous adresse la parole. De ces réveils qui vous donnent envie de tout envoyer balader. Pour retrouver ses esprits, il faut souvent se passer un petit coup d’eau fraiche sur le visage, de celui qui remet les idées en place. De celui qui vous fait dire que tout cela n’est pas bien grave et que nous sommes finalement responsables, et personne d’autre. C’est ce que je vous propose de faire. Parce qu’il est toujours intéressant de faire un bilan, de se laisser aller à l’analyse. Dieu nous a donné la pensée, il n’est pas mal de l’utiliser.

La motivation.

Je fais partie de ces gens qui ont le réveil rapide et joyeux. Le sourire aux coins des yeux avant même que les pieds touchent le sol. C’est un avantage indéniable. Aucune perte de temps. C’est donc quasi à chaud que j’ai eu, en discutant avec les principaux acteurs de l’évènement, à la lecture de certaines réactions sur le net, envie d’écrire sur le Spiel des Jahres. L’édition 2014, mais pas seulement. Sur ce qu’était ce prix, ce qu’il est, ce qu’il va devenir. Sur le secteur du jeu, en Allemagne, en France, sur les joueurs, leurs visions, leurs croyances, leurs fantasmes… Il y a beaucoup à dire. Trop. Je ne sais pas par quel bout le prendre, alors je vais laisser glisser mes doigts sur le clavier. Oui. Je suis dans un avion qui survole l’océan en direction d’un festival à Montréal, et j’ai envie d’écrire. Comme ça. Je ne me retiens pas. Ce que je vais laisser échapper est ce que je pense, ce que je crois, ce que j’analyse. Ce n’est sans doute pas la réalité de tous, mais c’est la mienne. Forgé sur une observation de secteur depuis 14 ans. Établie après de nombreuses réflexions, parfois contradictoire, souvent bancales. Mais que serait l’homme sans ses contradictions et ses certitudes bancales.

L’origine.

Nous, joueurs francophones qui surfont sur Tric Trac depuis des années, avons découvert le renouveau à travers les jeux allemands. C’est la base. C’est la fondation. Il y a 15 ans, nous étions des marginaux, de joyeux geeks. L’offre était rare, mais de sombres fous traduisaient sauvagement les jeux de nos cousins germains, des jeux avec de belles tuiles cartonnées et de beaux cubes en bois. Il n’y avait plus de média pour parler jeux, plus de revues. Rien. Et le web est arrivé, mettant à notre disposition des fichiers Word ou PDF à télécharger et imprimer afin de pouvoir jouer à ces jeux qui nous plaisaient tant. Nous avons commencé à discuter sur les newsgroups, les forums. Non seulement les Allemands jouaient, mais en plus ils avaient des salons incroyables -Essen, Nuremberg- et un prix unique au monde, le Spiel des Jahres. Le jeu qui était élu, avec des Meeples dedans, se vendait à des centaines de milliers d’exemplaires là où chez nous quelques rares, tel que le « Trivial Poursuit », pouvait prétendre à plus de 100.000 ventes chaque année.

Alors nous avons décidé que c’était le pays du jeu. Un exemple. Un rêve. Une ambition. Nous voulions que chez nous aussi les gens jouent sans honte, et à ce que nous considérions comme de bons jeux. Parfois avec excès. Nous voulions qu’ils brulent leur Monopoly après avoir découvert « Les Colons de Catane ». Nous voulions être allemands de jeux. Oui. Alors pour l’être, nous avons développé le secteur chez nous. En France, en Belgique, en Suisse, au Québec… Pour être comme les Allemands. Pour être comme leurs familles qui jouent du matin au soir et qui sont incollables sur la bio de Knizia.

Le fantasme.

Depuis des années, nous sommes donc persuadés que l’Allemagne est le pays du jeu. Mais c’est faux. En tout cas, pour moi, cela ne l’est plus. Non. Et je me demande même si cela l’a été un jour. Nous avons tellement oeuvré, tellement travaillé, tellement réfléchi que nous avons largement dépassé ce qui se fait ou a pu se faire en Allemagne. Les entreprises d’éditions, de distributions francophones sont plus grosses, plus stables, plus riches que leurs homologues allemands. Nos auteurs sont plus prolifiques, nos illustrateurs plus artistes et nos éditeurs beaucoup moins frileux. Ce n’est pas du chauvinisme mal placé, c’est un fait. Et les Allemands le reconnaissent volontiers puisqu’il suffit de regarder les finalistes du Spiel des Jahres ces dernières années pour y voir systématiquement un francophone dans une des boucles. Et cette année, c’est donc 2 jeux sur 3 qui étaient Made by la langue de Molière.

Vous ne me croyez pas ? J’exagère ? Voici quelques anecdotes, quelques faits pour vous démontrer que la francophonie est le pays du jeu.

Des preuves et autres évidences.

		<p class="lettrine">En Allemagne, il n’y a quasi plus de petites boutiques hyperspécialisées. Non. Les jeux se vendent dans les grands magasins, certes, mais à des prix bradés, et Amazon est en train de tout tuer. L’offre est donc assez réduite finalement et le consommateur de base n’achète que le Spiel. Rien d’autre. Exactement comme le Goncourt chez nous.</p>

		<p>J’ai pu voir un reportage à la télévision où l’on présentait avec surprise un « auteur de jeux », un type qui fait des prototypes et qui va les faire essayer à des testeurs, comme s’il s’agissait d’un extraterrestre. Exactement comme nous éveillons la curiosité dans l’oeil amorphe d’un journaliste par chez nous. Si l’Allemagne était le pays du jeu dont nous rêvons, personne ne devrait être surpris qu’un type gagne sa vie en créant des jeux.</p>

		<p>Si l’Allemagne était LE pays du jeu, le premier site d’information ludique au monde devrait être un site allemand. Eh bien non, c’est un site américain. Mais c’est normal, les Américains ont leur type de jeux à eux, et ils ont tous les anglophones de la terre, donc c’est normal (ceci étant j’ai une théorie sur le jeu en Amérique, j’y reviendrais un jour). Donc, le second site le plus important au monde parlant de jeux devrait être allemand. Eh bien non, il est français et vous êtes en train de lire un article dessus. Oui. Il s’agit de Tric Trac. Bien, alors le troisième site ludique le plus fréquenté est allemand ! Eh bien non encore, le troisième site le plus fréquenté, vous avez du y faire un tour pusiqu’il s’agit de www.trictrac.tv. Eh oui. Étonnant.</p>

		<p>Plus récent, lors du repas d’après cérémonie, je discutais avec un distributeur allemand qui me disait que le prochain évènement organisé en Allemagne était Essen. Puis, de rajouter qu’il trouvait assez fou qu’il n’y ait rien d’autres d’ici là. Pas de rencontre pour démontrer les jeux, les promouvoir. Si on veut un évènement, cela coute une fortune à monter. Alors qu’en France il y a de plus en plus de festivals. Partout. Je lui disais qu’ici, tous les week-ends, il se passait un truc. Mieux, je lui expliquais que ces salons, ces rencontres, ces festivals étaient pour la plupart issus de la volonté de joueurs, d’amateurs du ludique, qui se mobilisaient, se débrouillaient pour organiser tout ça, mus par une volonté prosélyte. Il était tout esbobi. Il n’en revenait pas. Si le jeu était si présent, des évènements publics auraient forcément lieu dans les villes allemandes comme il y en a chez nous. Eh bien non. Si l’allemand joue, il joue chez lui. En famille. Et en famille, on ne joue pas vraiment à « <a href="//www.trictrac.net/jeu-de-societe/tikal" title="Tikal" data-slug="tikal" data-type="boardgame">Tikal</a> » ou à « <a href="//www.trictrac.net/jeu-de-societe/terra-mystica-1" title="Terra Mystica" data-slug="terra-mystica-1" data-type="boardgame">Terra Mystica</a> ». Non.</p>

		<h1>Zone sinistrée.</h1>

		<p class="lettrine">Nous nous occupons, vous le savez peut-être, d’une version de Tric Trac en allemand. Ce site est dans le top des sites ludiques consultés par les Allemands. Si bien que Monsieur Guido, responsable de Tric Trac Deutschland, a intégré le prestigieux jury du Spiel. C’est dire.</p>
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		<p>Et bien le trafic de cette version est ridicule comparé à la VF de TT. Nous faisons 10 fois plus de trafic ici. Parce que là bas, ils en sont restés aux « Geeks », alors qu’ici nous touchons un public beaucoup plus large, un public finalement, et de manière étonnante, plus familial. Parce que nous avons tous participé à la propagation de la bonne parole alors que là-bas, cela ne bouge pas depuis des années. Pire, j’aurais tendance à dire que cela régresse. Oui. J’ose. Ce qui expliquerait en partie sans doute le changement de ligne pour le Spiel. Il s’est éloigné de sa base qui a toujours été la famille et il essaye d’y retourner.</p>

		<h1>La chute.</h1>

		<p class="lettrine">C’est aller un peu loin que de parler de chute. Je le confesse bien volontiers. C’est plutôt un effet comparatif entre la progression du secteur chez nous et la stagnation chez eux qui me pousse à l’image exagérée. Oui. Nous progressons comme personne, comme nul par ailleurs dans le monde. Les structures qui se sont montées il y a 15 ans, poussés par la découverte de cette culture ludique allemande, sont devenues des monstres 10 fois plus gros que les boites qui faisaient rêver à l’époque. En France, Asmodee est passé de 5 personnes à 100 employés. Iello embauche. Repos Prod embauche. Bombyx embauche. Filosofia embauche. Tric Trac a embauché ! En Allemagne, les structures ne bougent pas. Hans im Gluck est quasi le même qu’il y a 15 ans. Aléa n’a pas bougé, restant toujours un petit laboratoire de Ravensburger. Queen Games continue de brader ces jeux à Essen et sur le web, année après année…</p>

		<p>Des acteurs comme Asmodee ont réussi à structurer un secteur, à le rendre rentable, sans perdre leur âme, en s’appuyant sur un média comme Tric Trac, en le faisant vivre, en achetant de la pub, en nous confiant des contrats de réalisation afin de nous faire gagner de l’argent, et tout ça sans jamais ne rien demander en retour. Rien. Si ce n’est d’exister. D’exister pour montrer que le secteur est dynamique. Que les joueurs sont des gens responsables, intelligents et qu’avec eux, on peut construire quelque chose de durable.</p>

		<p>En Allemagne, en 4 ans d’existence, Tric Trac a rentré les premiers €uros le mois dernier. Et devinez de chez qui ils viennent ? Asmodee Allemagne. Oui. Pas un éditeur allemand n’a fait quoi que ce soit pour booster le secteur, le rendre vivant, avant le mois dernier. Rien. On pourrait se dire qu’ils le mettent ailleurs cet argent ? Oui. Mais si on regarde bien, il n’y a pas d’équivalent de Tric Trac en Allemagne. Je vous l’ai dit, les joueurs vont sur un site américain, en anglais. Oui. Et si l’on est attentif à l’histoire et la pub sur Board Game Geek, on se souvient que ce sont des amateurs de jeux dits « européens » qui ont monté la chose et que si le site a pris de l’importance, c’est aidé par des éditeurs dits « Améritrash » comme FFG qui ont soutenu le site en prenant plein de pub. Pas des Allemands… Parce que de l’argent, le secteur chez eux n’en rapporte pas des masses. Finalement. C’est pour cela que les éditeurs allemands courent, espèrent tous recevoir le fameux Spiel.</p>
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	</tr></tbody></table><p> </p>

Le secteur francophone a progressé quand, au mieux, le secteur allemand ne bougeait pas.


Un mirage.

Donc, depuis toutes ces années, nous sommes persuadés que le jeu, c’est chez nos voisins que ça se passe. Alors nous regardons le Spiel des Jahres avec envie. Avec amour. Parce que tout de même, il y a eu chez les primés « Tikal », « El Grande », « Les Colons de Catane », « Torres », « Les aventuriers du Rail ». Que du bon. Que du beau. Et pour certains du costaud. Et puis, le Spiel, c’est une remise devant les caméras des grandes chaines de télé. Le Spiel, c’est 300.000 exemplaires de vendus. C’est l’assurance de milliers d’€uros dans les caisses de l’éditeur, du distributeur, de l’auteur… Le Spiel est devenu un enjeu économique.

Seulement voilà, la réalité est un peu moins joyeuse. D’abord parce que le jeu qui a le Spiel voit son prix de vente bradé, plié, défoncé. Il n’y a pas de réseaux ultraspécialisés comme chez nous, le jeu fait donc la tête de gondole des grandes surfaces, c’est finalement un produit d’appel. « Hanabi », récompensé en 2013, se trouve à 5€ ! Oui, 5€. Ensuite, on pourrait se dire que si un jeu se vend à 500.000 exemplaires, ce qui est le cas de « Hanabi », tous les jeux devraient péter les scores. Des 200.000, des 100.000… Et bien pas du tout. Les gens n’achètent quasi que le Spiel. Si les éditeurs se battent comme des fous pour avoir le macaron rouge, c’est que c’est comme gagner au Loto. C’est une grosse opportunité économique. C’est l’assurance d’une année tranquille. Rien de plus. Si j’exagérais un peu -non, ce n’est pas du tout mon habitude- je dirais qu’il faut être étranger (à l’Allemagne j’entends) pour en faire encore une histoire d’égo, d’amour propre, d’en tirer une fierté personnelle, un accomplissement. Allez, je veux bien que les auteurs soient épargnés. Encore un peu. Parce qu’on les aime ici les auteurs.

En France, « Dooble », c’est, pour 2013, 800.000 exemplaires vendus, sans le logo du Spiel dessus, ni aucun autre prix...


Pourquoi un prix ludique ?

Il n’y a pas 36 motivations dans la création de récompenses. L’une d’elles est de vouloir mettre en avant l’amour que l’on porte à ce que l’on veut récompenser. Pour la grande majorité des prix ludiques, c’est le cas. Des joueurs ont eu envie de mettre en lumière les jeux qu’ils aiment afin d’aider le novice à découvrir ce qui est « bon », l’objectif étant de répandre la bonne parole.

Une autre des raisons est économique. Un secteur qui marche va vouloir informer le consommateur du bienfondé de ce choix plutôt que d’un autre afin de vendre plus, de vendre mieux. Il arrive souvent que la raison que j’évoque au-dessus se retrouve main dans la main avec la raison évoquée ici, juste maintenant. L’économique ayant les moyens de pousser le « culturel », ça marche toujours mieux.

Mais le souci vient souvent de cette rencontre. Parce que les visions, les enjeux ne sont pas forcément les mêmes…

Monsieur Guido de Tric Trac, membre du jury du Spiel des Jahres 2014.

Un jury.

Un prix ludique, c’est un jury. Des gens qui connaissent ce dont il est question et qui vont confronter leurs préférences. Je suis jury depuis plus de 10 ans. Dans plein de prix. Des protos anonymes de Boulogne au Jeu de l’Année, en passant par le FLIP et Saint-Herblain. Quand on est jury, souvent, on est choisie parce que l’on a des compétences ou parce que l’on représente quelque chose, et parfois les deux (c’est la meilleure situation). Un prix, c’est un objectif, un propos, des contraintes. Le souci, c’est que si l’on n’est pas à l’origine du projet, on doit intégrer la ligne du prix, les raisons de son existence, et oeuvrer dans ce sens en appliquant des « consignes ».

Les joueurs que nous sommes avons imaginé, inventé le propos du Spiel. Demandons-nous ici qui s’est posé des questions sur les raisons de ce prix. Qui connait ici le secteur allemand ? Les joueurs allemands ? Et pourtant, nous nous sommes identifiés à eux. Nous avons fait nôtre ce prix. Et depuis quelques années, on voit poindre les déçus, les déceptions, les remises en cause du Spiel. Les joueurs ne se reconnaissent plus. Mais souvent, le joueur oublie de regarder le passé, le joueur n’assiste pas aux réunions où, avant de choisir des jeux, on définit ce que doit être le prix. Et cette définition évolue au fil du temps, au fil du marché, au fil des erreurs. Un prix a un but, et si on ne connait pas ce but, si on ne l’intègre pas, on ne peut pas comprendre le résultat.

Est-ce que "Les Aventuriers du Rail" pourrait être un Spiel en 2014 ou serait-il un "Expert" ?

La difficulté, c’est que les gens qui font ces prix sont des humains. Comme vous, comme moi. Et ces humains sont eux aussi parfois perdus, parfois à côté, parfois déroutés, et ils essayent juste de faire au mieux. Et pour faire ce mieux, il faut que plusieurs personnes se mettent d’accord. Et ce n’est pas facile. Je sais de quoi je parle. Surtout qu’ensuite, il faudra expliquer ses choix. Alors un jury, s’il est bon, aura déjà tout préparé son discours. Parce qu’il sait que tous les déçus, éditeurs, auteurs, joueurs, demanderons des comptes… Vous pourrez dire ce que vous voulez à un jury, il aura toujours raison. D’abord parce que c’est lui qui commande, ensuite parce ce qu’il a fait est fait. Le jury, s’il fait une erreur, l’assume. Mais peut-on vraiment parler d’erreur ? Est-ce que cette année l’auteur de « Camel Up », son éditeur considèrent que c’est une erreur ? J’en doute. Tout au plus, on peut considérer que nous n’aurions pas fait le même choix, mais nous n’avons pas assisté aux discussions, aux directives…

Le Spiel 2014.

Avant la remise du prix, les spécialistes pronostiqueurs donnaient vainqueur « Concept ». Le jeu est déjà un énorme succès commercial avec environ 100.000 exemplaires vendus en 6 mois. Il est innovant, facile et d’un accès quasi instantané. Bref, le favori clairement identifié. Les habitués du jeu à l’allemande misaient plutôt sur « Splendor », plus proche de l’esprit ludique que l’on imagine chez nos voisins d’outre-Rhin, avec cette petite touche de « je joue dans mon coin » si caractéristique, et lui aussi déjà un succès. Personne ne misait sur « Camel Up ». En tout cas chez les francophones. D’abord parce que personne n’y avait joué, ensuite parce que ceux qui étaient concernés avaient sauté sur une boite pour savoir à quoi ils avaient à faire. Après avoir joué, ce n’est pas que le jeu semblait mauvais, loin de là, mais il était, peut-être à tort, considéré plutôt faible niveau innovation, niveau public potentiellement visé et niveau intérêt purement ludique de comme on l’aime ici.

Pour y avoir joué à mon tour, parce que je suis un professionnel consciencieux qui veut savoir de quoi il parle, je trouve, et c’est un avis tout personnel, que le jeu se classe plutôt à la limite du jeu enfant. Ce qui n’a rien de péjoratif, les enfants dans mon esprit allant jusqu’à 12 / 14 ans, ils ont le droit d’avoir de très bons jeux. Mais disons qu’il n’a pas l’allure de ce que j’imaginais être un Spiel, c’est-à-dire un jeu familial, certes, mais tout de même jouable entre adultes consentants exclusivement, le tout avec tout de même quelque chose de « consistant » intellectuellement. Non pas que « Camel Up » ne soit pas jouable entre adultes, d’ailleurs il l’est, mais je crois qu’il sera plutôt sorti en convention, par exemple, pour se marrer sans challenge cérébral entre deux jeux plus costauds. Parce que la part de chaos, de non-contrôle est amusante. Oui. En tout cas dans certaines situations et pour certains joueurs. Mais cette part de chaos, de non-contrôle est un répulsif total pour d’autres, surtout chez nous. Surtout quand on ne jure que par « Tikal », Spiel en 1999.

Le jury a donc choisi « Camel Up » comme produit phare de l’année 2014 en Allemagne. Surprenant la majorité des francophones. D’abord parce que nous voulions qu’un jeu de chez nous soit vainqueur. Pour gonfler notre égo chauvin. Ce qui est une mauvaise raison. Ensuite parce que nous avons une haute opinion de ce qu’est un bon jeu et que « Camel Up » ne flatte pas cette image. Et enfin parce que nous avons fantasmé ce que devait être un Spiel. Assurément. Mais c’est ainsi, « Camel Up » est élu Jeu de l’Année par un Jury souverain. Ce Jury a donc probablement raison. Pour le moment. Seul le futur nous dira si « Camel Up » marque l’histoire du prix, du jeu… ou pas.

Le droit de contredire.

Le jury a forcément raison, mais nous avons tout à fait le droit de contredire, de discuter, de douter de ce choix. Personne ne le nie. Ce que j’essaye de dire, d’expliquer avec ce long texte, c’est que la responsabilité de ce que certains considèrent comme une « erreur » peut nous être imputable en parti et pas seulement à l’aveuglement d’un Jury qui n’y connaitrait rien. Parce que nous n’avons pas forcément bien compris ce à quoi nous avions affaire. Parce que nous avons mis NOS intentions dans un prix qui n’est finalement pas le nôtre, un prix qui ne nous concerne pas. Si on regarde la liste des vainqueurs depuis 1979, il y a beaucoup plus de jeux proches de « Camel Up » que de « Dominion ».

On peut se demander pourquoi avoir mis dans la liste des finalistes un jeu comme « Splendor » qui du coup aurait pu faire un bon « Kenner Spiel » (Prix Expert) puisqu’il est quasi dans la même catégorie de complexité que « Istanbul ». On peut se demander pourquoi mettre un party game comme « Concept » si on sait que le public allemand n’est pas très à l’aise avec la « communication » et les jeux de ce type. On peut…

J'ai l'impression que dans Jeu de Société, le plus important pour les Allemands est le mot "Jeu" là où pour nous, c'est "Société".

Monsieur Phal - Juillet 2014

Mais peut-être que le jury essaye de faire du prosélytisme pour NOUS ressembler. Finalement. Peut-être veulent-ils que le public découvre le ludique via un jeu ultra-simple, parce qu’en fait il n’est pas, il n’est plus aussi concerné que ça. Je vous le redis, le pays du jeu, c’est la francophonie. Il faut que nous prenions conscience de ce fait, il ne faut plus envier, il ne faut plus se croire au second plan. Non. Il faut promouvoir nos compétences, nos qualités, notre vision et cesser de dire que nous aimerions être comme en Allemagne, parce que finalement, on est bien plus loin que notre modèle. Et, surtout, on ne peut leur en vouloir de raisonner pour eux, et non pour le reste du monde.

On peut surtout les remercier d'avoir été, même si nous nous sommes menti involontairement, de nous avoir servi de modèle fantasmé. Cela nous a fait avancer comme personne. Un leur doit une fière chandelle et une reconnaissance éternelle.

Atterrissage.

Bon, je vais devoir rabattre ma tablette et donc ranger mon ordinateur mon avion va atterrir. J’ai été long, j’ai sans doute été brouillon, mais je crois avoir donné un aperçu de ce qu’il se passe dans ma tête au lendemain de la remise de ce prix. À moi Montréal, et, sans doutes de très certainement, à mon retour, une réflexion sur le jeu de société dans cette belle province…



[[Camel Up](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/camel-up)][[Catan](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/catan-1)][[Concept](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/concept)][[Dominion](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/dominion)][[El Grande](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/el-grande)][[Hanabi](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/hanabi)][[Istanbul](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/istanbul)][[Les Aventuriers du Rail](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/les-aventuriers-du-rail)][[Splendor](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/splendor)][[Terra Mystica](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/terra-mystica-0)][[Tikal](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/tikal)][[Torres](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/torres)][[Trivial Pursuit - Casual](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/trivial-pursuit-casual)]
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Merci pour cette analyse et ce retour d'expérience.

Moi qui ait connu les Colons de Catane avec une version allemande avec un bout de traduction sur une feuille volante, j'imaginais aussi l'Allemagne comme Le pays du jeu.

Quel est ce festival à Montréal ?

Au delà des aspects "sociologiques" mis en avant par M. Phal, je constate que les entrées de ma ludothèque sont de plus en plus françaises ou belges.

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Merci beaucoup pour ce long article. C'est extremement interessant d'avoir le point de vue de quelqu'un qui suit le secteur ludique de près depuis aussi longtemps que vous, et capable d'avoir ce recul.

Je ne me sens pas légitime à discuter du Spiel, étant un arrivé récent dans le monde du jeu. Mais de mon petit point de vue, j'ai aussi l'impression que c'est en France (disons plutot en francophonie, parce que nos amis belges sont quand meme à la pointe) que le secteur innove réellement. On peut de plus en plus parler de jeu "à la francaise".

Après, le monde ludique ne se résume pas à France-USA-Allemagne, et on voit apparaitre des choses fantastiques en Europe de l'Est (CGE, c'est à toi que je pense).

Alors que faudrait-il faire pour qu'un As d'Or - Jeu de l'année est le meme retentissement qu'un Spiel ? Est-ce simplement une question de distribution (grande surface vs boutiques spécialisées) ?

Bref, tout cela mérite de longs débats, et au passage cet article est un beau tacle envers certains pisse-froid qui considèrent que Tric Trac ne fait que du publi-informatif...

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le tric trac d'or, nouvelle référence. et pis c'est tout!

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Très intéressante analyse.
Depuis un an environ, je me suis mis au jeux grâce à TT et TTTV et au début, je pensais qu'effectivement, l'Allemagne était LE pays du Jeu.

Au fil des jours, en "participant" à TT et TTTV, il est évident que la production francophone est d'une grande richesse.

Je n'analyserai pas l'analyse complète ;o) mais je reprendrais un point essentiel qui démontre la force ludo-sociale de notre pays (je ne connais pas cette "force" dans les autres pays francophones pour l'associer à mes propos), c'est celle de la formidable implication des amateurs de jeux dans leur volonté de partager leur passion en organisant des festivals, soirées, salons...
J'ai vécu la même chose en Bande Dessinée, en tant qu'amateur z'averti.

Ces amateurs ont envie de partager, de démontrer que le Jeu a une signification sociale entre les personnes (sans vouloir être trop sérieux ou pompeux dans cette signification).

Par exemple, ce WE, je suis parti bosser chez un ami et j'avais amené mes jeux "familiaux" comme Timeline, Dooble, Enigma, Wordz... Avec les enfants et les parents, nous avons joué, les soirs, jusqu'à deux heures du matin. Et ils vont aller acheter des jeux dans la foulée... parce qu'ils se sont pris au jeu :o)

...

Il sera intéressant, à l'image de l'ouverture de la TTTV, aux wargames, à l'analyse de la fabrication d'un jeu, d'une maison d'édition, etc. et si le temps et l'argent le permettent, de faire des vidéos sur le Monde du Jeu en Allemagne, aux USA, aux autres pays "joueurs", histoire de savoir à quoi ils jouent

;o)

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Très bon article. Une petite précision de pure forme : il y a certes moins de manifestations ludiques en Allemagne qu'en France mais plusieurs salons régionaux qui peuvent attirer plusieurs milliers voire dizaine de milliers de visiteurs.

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J'achète mes jeux bien avant qu'ils soient ou non primés. Comment? Facile, je suis informé par des pros......je suis abonné TricTrac!!!

Grace aux articles et aux TTTV, je n'attends pas les prix pour me forger une idée, pour moi c'est du folklor.

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c'est en lisant ce genre d articles que je suis content de m'être abonné.

on oublie vite que tikal a plus de quinze ans. le milieu change, il evolue.

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En Allemagne, il n’y a quasi plus de petites boutiques hyperspécialisées. Non. Les jeux se vendent dans les grands magasins, certes, mais à des prix bradés, et Amazon est en train de tout tuer.

C'est malheureusement effroyablement juste. Nous n'imaginons pas la chance que nous avons en France de disposer d'un réseau de boutiques hyperspécialisées riche et dense (il pourrait l'être sans doute encore un peu plus). C'est un vrai trésor. Pour nous en tant que consommateur, ainsi que pour la filière du jeu. Le réseau de distribution allemand est d'une insondable tristesse.

Si le secteur du jeu a progressé bien plus vite en France qu'en Allemagne ces dernières années, sur à peu près tous les plans (nombre de sorties, qualité des jeux, apparition de nouveaux acteurs, manifestations ludiques et autres événements) , il faut reconnaître que le prix du jeu de l'année en Allemagne reste bien plus important pour un éditeur que son homologue français, puisqu'il lui garantit des centaines de milliers de ventes. A cet égard, il continue de focaliser l'attention du public de manière plus prégnante que n'importe quel autre prix ludique. Est-ce que cela lui donne plus de légitimité quant à la qualité des jeux primés ?

Quelles sont donc les solutions pour donner plus d'importance au prix du jeu de l'année en France ? est-ce une question de communication ? de budget ? de public visé ? de distribution ?

peut-on s'attendre dans quelques années à voir chaque jeu estampillé "As d'Or" connaître une carrière commerciale semblable aux jeux obtenant le Spiel ? et est-ce que ce serait si bien que ça ?

est-ce le sujet du prochain débat en live sur TT.tv, avec en autres invités, Monsieur d'Epenoux, spécialiste du lancer de pavés dans la mare aux canards ?

chouette article Monsieur Phal, moi aussi je suis bien content d'être abonné. merci.

ps1 : c'est amusant, à l'issue de l'annonce du Spiel cette année, c'est la première fois que j'entends des Allemands louer la présence de hasard et de chaos dans un jeu... viennent-ils de découvrir la notion de fun ?

ps2 : pour le trafic sur tt.de, la présence d'un forum serait probablement en mesure de fidéliser la communauté des joueurs. Par ailleurs, le jour où vous lancez la tt tv en allemand avec Monsieur Guido, ça risque de sévèrement cogner quand même.

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Très bon article. Je note en passant que pour connaître beaucoup d'Allemands, le jeu fait entièrement partie de leurs habitudes et occupations, tellement même qu'ils ne se considèrent pas comme joueurs, juste que le jeu de société est un de leurs passe-temps. Ils jouent beaucoup, ils ont beaucoup plus de "vrais" jeux en moyenne que les gens qui m'entourent ici. Certes, ces jeux sont vendus en grandes surfaces, le plus souvent, mais ceci explique cela. Et ils jouent à tout, aussi des jeux que nous apprécions ici sur TT, et pas que le Spiel des Jahres.

Super article qui tape bien où il faut.

Petite précision factuelle sur Queen Games : l'année dernière au Spiel ils avaient arrété leur politique de bradage à tout va (a priori depuis le recrutement d'un ancien responsable de Kosmos).

Pour Camel Up, pas facile d'en parler sans y avoir joué (ce qui est mon cas). Mais déjà simple, jouable de 2 à 8, bien illustré, pas long, ça fait de bons arguments.

Et bien, on pourrait parler d'une longue analyse et de conclusions. Mais, tout au contraire, monsieur Phal, vous lancez un long débat...En Allemagne le jeu se joue traditionnellement en famille à la maison et se vends en tête de gondole ... Voilà une bonne claque aux anciens clichés que beaucoup se font sur le monde ludique allemand.

En France, on a souvent tendance à assimiler les jeux pour connaisseurs aux jeux "traditionnels" allemands. Du coup, un jeu tel que Camel Up, simple, trop simple, trop "enfant", peut faire bondir ... il suffit pourtant d'aller sur ce lien pour revenir à la réalité : les Spiel des jahres

Regardons bien quels sont les jeux qui ont gagné... très peu de jeux avec du "meeples" dedans au final...

En revanche, l'Allemagne reste, à mon sens, le pays originaire du jeu "complexe". Il suffit de regarder les trois finalistes des jeux pour connaisseurs de cette année... Que des jeux issus d'auteurs allemands !

Il est également vrai que beaucoup de Français (dont moi même) ont poussé un soupir de voir Istanbul, très bon jeu mais jugé plus familial, remporter le prix du jeu pour connaisseurs. Mais il est vrai que, nous Français, nous avons trop tendance à attendre de savoir qui sera le "bon gros jeu" de cette année au Spiel, pour se précipiter en boutique et se dire : "ça y est, moi aussi, j'ai mon jeu pour gros balaises..." Et du coup, on a trop tendance à oublier que de l'autre côté de la frontière, le jeu se pratique en Famille !

Je tiens un blog, et je sais, qu'avant de présenter un jeu, il est absolument nécessaire de se placer dans la peau du public concerné. Car, oui, il y a un public pour chaque jeu et c'est très difficile, voir injuste, de critiquer un jeu, de dire qu'il est mauvais alors que des personnes pourrait l'apprécier. Personnellement, j'ai choisi, de plus en plus, de ne rien dire si le jeu ne me plait pas et d'en parler avec le plus de recul possible lorsqu'il me plait en essayant de faire entrer le joueur dans le thème et la mécanique du jeu comme s'il en était un acteur... Après tout, lorsqu'on joue, on se prend au rôle... Celui d'un chef de nations dans Manhattan Project, d'un marchand dans Istanbul, d'un fermier dans Agricola ..etc..

Mais il est vrai qu'en France, j'ai bien peur que tout cela ne tourne à un effet de masse comme en Allemagne. Que les jeux se vendent un jour en tête de gondole des supermarchés au même titre qu'un saucisson sec et les tomates de saison... En France, on connait un développement exponentiel dans le monde du jeu. De plus en plus de créateurs sortent des jeux, trouvent des éditeurs et des distributeurs. A cela s'ajoute les jeux étrangers que l'on traduit et que l'on importe de plus en plus en France. Ainsi arrivent de plus en plus de jeux américains, de Pologne, d'Italie, d'Asie... Et souvent de bons jeux qui ont "marché" là bas ... Car les éditeurs se développent aussi. Et ceux qui y travaille, sont des passionnés et croient en leurs propres jeux... Bien entendu, il y a aussi une grosse part de marketing dans tout cela et, avec un tel développement, chacun cherche aussi à avoir sa part du gâteau ludique...

Si bien, qu'on se retrouve, nous joueurs, devant une masse énorme de choix, toujours en croissance. A aujourd'hui, ce sont des centaines de jeux qui sortent en France chaque année. Il y en a beaucoup.. Trop peut être. Choisir un jeu devient un choix cornélien. Je me mets à la place de l'acheteur à ne plus savoir quoi prendre tellement il en sort... Alors on essaie de faire confiance à ceux qui en parlent, qui les ont testés...Je parle bien sûr de Tric trac et des blogueurs qui partagent leurs avis sur la toile et la presse. Ce n'est pas facile pour eux non plus, car on essaye souvent de savoir tout sur tout et on se limite parfois à une seule partie tellement il y a de jeux à tester. Bien entendu, les éditeurs s'ajouteront à tout ça pour défendre leurs jeux respectifs, en clament bien fort que leurs jeux sont les meilleurs. Faut il ralentir le rythme ? Faut il zapper plus pour ne pas finir dans une industrie avec tout et n'importe quoi? Pour garder nos petites boutiques et que cela ne se termine pas dans les supermarchés parmi les petits pois et les Dvd ?

Bref, je me demande, si à force de sortir des milliers de jeux, on ne va pas finir par prendre le même chemin que les allemands, c'est à dire qu'on se contentera de choisir que le dernier jeu estampillé d'un prix, à un instant T, dans la grande surface du coin, en passant à côté de perles ludiques...

Super article, très intéressant !

Pour le Spiel 2014, il faudrait quand même que le jury explique comment Splendor - Concept - Camel up se retrouvent dans la même short list.

Plus que d'avoir décerné le Spiel à Camel Up, c'est bien dans la détermination de cette liste que je suis dans l'incompréhension, avec le recul.

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Désolé pour la lèche mais c'est sans doute l'un des meilleurs articles publié à ce jour. Une véritable analyse de fond du pourquoi du comment. Tout simplement brillant. Le monde du jeu change et il est très intéressant d'assister à ces changements en tentant de prendre un peu de recul. Le secteur est foisonnant, et ce foisonnement vient notamment d'Asie, des Us et de la francophonie. Ce foisonnement passe entre autre par de nouveaux canaux (il suffit de compter les pubs sur BGG pour se rendre compte de l'explosion de KS), de nouveaux genres (la vague de jeux Asiatiques par exemple) mais aussi par de nouvelles façons d'aborder le jeu (le jeu vidéo notamment a concouru a la production de toute une génération d'adultes pour qui l'activité "jeu" sous toute ses formes n'a plus rien d'infantilisante. Et, comme il est souligné dans l'article, deux de nos très grands points fort ici résident dans la quantité et la qualité de l'information et de la distribution.

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Je vais prêcher pour ma paroisse mais il me semble que le réseau de ludothèque que l'on a en France n'est pas pour rien dans la progression du secteur dans notre beau pays. Ces structures sont uniques et n'ont pas vraiment d'équivalent chez nos voisins où le public des "Toys Library" est bien plus centré sur la petite enfance et les handicaps. Les enfants d'aujourd'hui connaissent bien plus de jeux qu'avant et cette progression constante en fait de plus en plus des nouveaux joueurs adultes. Les ludothécaires sont aussi de plus en plus des joueurs passionnés qui font au jour le jour la promotion de cette nouvelle "culture".

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@tapimoket

Bref, je me demande, si à force de sortir des milliers de jeux, on ne va pas finir par prendre le même chemin que les allemands, c'est à dire qu'on se contentera de choisir que le dernier jeu estampillé d'un prix, à un instant T, dans la grande surface du coin, en passant à côté de perles ludiques...

C'est ce qui se passe(ait) dans le Monde de la BD. Même s'il est en relative bonne santé, il n'en reste pas moins qu'il laisse beaucoup de monde sur le carreaux sans que tu saches que des albums sont sortis.

Comme le rappelle si bien Fred (oui, moi aussi je sais faire de la lèche) :o) la société évolue, le marché évolue, les moyens évoluent. Et il s ne faudra pas se laisser aller à la facilité du ça marche bien aujourd'hui-pourquoi changer ou faire évoluer ce qui marche.

Les éditeurs ont bien compris l'importance du Net et plus particulièrement de Tric Trac - Gloire à eux - et il faut continuer de s'assoir sur les boutiques et les joueurs pour la promotion et la vitalité de ce Monde du Jeu.

;o)

La réflexion est vraiment intéressante. Ce qui pourrait aussi nous éclairer c'est ce que monsieur Guido en pense, dans la mesure où en plus d'être Allemand, il a vécu la chose de l'intérieur. J'attends ce genre de témoignage avec impatience. :pouicok:

Merci Mr Phal pour cette réflexion sur le spiel et surtout sur le sens qu'il a désormais face au développement de tous ces merveilleux jeux que nous proposent, auteurs, illustrateurs, éditeurs et distributeurs.

Par contre, je me permets de compléter cette analyse d'un élément qui, selon moi, reste essentiel dans le développement du jeu francophone : la place de l'associatif.

En France, le nombre de ludothèques associatives a plus que doublé en trois ans, le nombre d'associations de jeux "déclarées" qui réunissent joueuses et joueurs a été multiplié par quatre en près de cinq ans (chiffres retrouvés sur les site du JO).

Je crois donc que si aujourd'hui nous sourions à l'annonce du Spiel 2014, c'est que nous savons désormais ce que le Spiel représente en face du travail qui est fait dans les associations. Nous sommes nombreux à oeuvrer dans "l'ombre" au développement du jeu de société auprès d'un public qui ne demande qu'à être séduit et conquit tant l'offre de jeux est multiple et nombreuse.

Toutes ces associations qui aujourd'hui créent des évènements, des festivals, ou tout simplement des rencontres, sont, à mon sens, un des fondement du développement du jeu en France. Dans les associations, nous faisons découvrir à un public de plus en plus large que le Monopoly, Cluedo ou autre Risk ont des descendants innombrables permettant de retrouver le plaisir de dire chez soi "Et si on faisait un jeu ?"

Responsable d'une association dans la région de Montpellier, je vois tous les jours l'intérêt grandissant du jeu. Lorsque nous arrivons avec nos jeux dans une école, un évènement local ou encore lors de notre rendez-vous annuel du week-en jeux, c'est le succès assuré ! Et ce succès, il est du essentiellement à tous ces animatrices et animateurs bénévoles qui font vivre les associations.

Et si les éditeurs, distributeurs ou TT embauchent, les associations de jeux sont aussi créatrices d'emplois. Même nous avec notre petite association de village, nous avons recruté un animateur.

Tout ça pour dire que les endroits où l'on joue se multiplient chaque jour dans notre pays, les occasions de jouer sont de plus en plus nombreuses. Pas étonnant donc que parmi les plus grosses entreprises d'édition et de distribution de jeux ont retrouve beaucoup de françaises.

Et vous savez quoi cher Mr Phal, ce serait génial si TricTrac prenait la bannière pour lancer l'idée de fédérer toutes ces associations qui sont le relais de votre travail.

Pourquoi pas une grande réunion sous l'égide de TricTrac fondatrice d'un élan qui nous amènerait, tient pourquoi pas à créer "Le French Spiel à nous'".

A+

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Impossible de lire la partie en 2 colonnes sur mon smartphone :-(