Troisième opus de la trilogie, le moins réussi à mon goût.
On y retrouve tout ce qui a fait la marque de fabrique des épisodes précédents: une boîte compacte pleine à craquer de matériel (on appréciera l'optimisation de son espace de stockage), les illustrations de The Mico (que j'adore), le parti-pris féministe des dites illustrations, une iconographie très semblable, des règles quasiment toutes résumées sur le plateau, un côté obscur supposément plus facile s'opposant à la vertu supposément plus difficile, plusieurs manières de scorer, une interaction relativement faible entre joueurs, un thème cohérent.
Au niveau du matériel, on pourra reprocher quelques imperfections: les lingots d'or, jaunes sur le plateau, sont en réalité oranges et on passe son temps à les appeler gouda ou mimolette. Mais surtout, pierres et encriers se ressemblent et si comme moi vous jouez le soir par faible luminosité, vous allez les confondre. Les pierres auraient pu être plus claires et les encriers ... heu ... ressembler à quelque chose.
Au niveau édition, j'ai franchement trouvé les règles très mal écrites. Des points de règles importants sont abordés dans l'exemple de calcul du score ou encore à droite à gauche dans le livret et surtout pas là où on les attend. Si on ajoute un style assez verbeux et néanmoins approximatif, ça n'en fait pas une réussite. À cela on va ajouter des pictos pas toujours clairs ni toujours bien expliqués, contrairement aux tomes précédents qui étaient des modèles du genre (mention spéciale pour les Architectes).
Le jeu comporte plus d'interaction que les Paladins, qui était essentiellement un jeu « solo à plusieurs ». On va ainsi infliger des coups pourris aux adversaires pour se disputer le château (tout comme la capture des ouvriers dans les Architectes), se jeter sur les parchemins convoités par tous, éviter de croiser un vicomte pour ne pas permettre à l'adversaire de réorganiser ses cartes, etc.
On retrouve un mécanisme de programmation des tours comme dans Paladins, où on va planifier trois tours à l'avance ses actions. Les intentions des joueurs y sont plus lisibles, ce qui accroît l'interaction. La course au château, aux parchemins et aux bonus de construction va forcer à surveiller ce que font ses petits camarades.
Le concept cher à Shem Phillips de corruption/vertu est ici le plus détaillé des trois tomes de l'ouest et c'est ce que j'ai le moins apprécié. Trop compliqué pour ce qu'il apporte mais plus sympa que la simple jauge de Paladins, il va occasionner beaucoup de calculs pour au final avoir une incidence mineure étant donné qu'on ne sait pas à l'avance si ce sont les dettes ou les titres de propriété qui compteront le plus à la fin du jeu. Le fait que les collisions remettent à zéro vertu et corruption font qu'il est impossible de poursuivre une stratégie autre qu'opportuniste à ce niveau.
L'incertitude sur l'objectif final (qui peut au final être totalement ignoré étant donné la multiplicité des manière de scorer) rend le jeu assez chaotique, d'autant plus qu'il est difficile de savoir où en sont les autres joueurs au niveau du score.
Bref, c'est ce que j'ai reproché à ce volume, que je trouve trop complexe par rapport à son déroulé. On se retrouve finalement face à un jeu d'opportunisme et certains joueurs se retrouveront perdus face à l'énorme choix d'actions disponibles à chaque tour dans un jeu qui hésite entre deck building, majorité, collection, pose d'ouvriers. Ajoutons des parties assez longues (nous avons eu, certes avec un joueur assez calculatoire, une partie ayant duré 2h30 à deux), au final je trouve que ce jeu a pousse la complexité et la richesse trop loin par rapport à ce qu'il propose.