Cet avis est basé sur une dizaine de partie en solo et à 2.
Lorsque l'on s'intéresse à la série des Pax, deux noms ressortent souvent : Pax Renaissance et Pax Pamir. Pour ce dernier, c'est avec sa seconde édition, bénéficiant d'un matériel largement amélioré (le jeu passant de l'éditeur Sierra Madre Games à Wehrlegig Games) et quelques apports sur les règles (notamment un mode solo), que le jeu s'est popularisé. 2020 aura même permis l'édition d'une version française de cette seconde édition ; c'est de cette dernière version dont il sera question ici.
Pax Pamir propose aux joueurs de prendre le rôle de dirigeants dans l’Afghanistan du XIXe siècle, essayant de gagner en influence pour prendre pouvoir. Le thème posait comme cela pourrait rebuter les non férus d'histoire, pourtant, il est plus passionnant (même pour les néophytes) qu'il pourrait semblé. Il faut s'imaginer que l’Afghanistan de cette époque était plus proche du trône de fer que la situation actuelle. On était dans une période de chaos induite par la mort prématurée et non préparé du roi (qui avait eu de nombreux fils et donc de nombreux prétendants au trône), aiguisant les appétits. En plus d'une situation interne complexe, il fallait aussi compter sur l'ingérence des super puissances étrangères, ici les Britanniques et les Russes, chacun cherchant à augmenter son influence dans ce pays stratégique.
La force de ce jeu, qui mélange gestion d'une main de carte et contrôle de territoire est de faire véritablement corps avec son thème. Toutes les cartes (qui sont toutes uniques) utilisent des illustrations historiques, un texte expliquant son propos (par exemple une petite bio d'un personnage), mais surtout font sens dans le jeu par rapport à la réalité historique. Ainsi, par exemple, un personnage historique connu pour son réseau d'espion permettra de placer beaucoup d'espions, ou un chef de guerre induira un climat politique de conflit. Il y a toujours une volonté de faire coller les mécaniques du jeu est
Pax Pamir est très interactif, mais aussi fourbe et parfois cruel ; on doit surveiller de près les autres joueurs, et les coups bas qu'ils pourraient faire. Une règle sert de couperet : un joueur avec 4 points d'influence d'avance gagne immédiatement la partie... Pax Pamir est un jeu dans lequel il est beaucoup plus question d'opportunisme que de stratégie au long cours. Les alliances avec les grandes puissance (on ne s'allie pas avec les autres joueurs, mais avec les grandes coalitions en présence) se font et se défont selon la façon dont le vent tourne... Il ne faut pas rater le virage et bien s'allier avec la puissance dominante... ou au contraire tenter le coup de Trafalgar en renversant la situation à coup de complots.
Le jeu se joue à un double niveau : sur la carte du pays où l'on cherchera le soutien des tribus locales (et des armées alliées) pour dominer des régions, et sur dans les cours (symboliser par nos cartes) où vont pulluler les espions. A vous de choisir votre stratégie, en dominant le terrain, en envoyant des espions assassiner des opposants gênants, ou en cherchant des alliances avec une puissance dominante.
Les règles ne sont pas si complexes, mais le jeu peut être un peu déroutant. Si les axes stratégiques sont assez clairs, il n'en reste pas moins qu'une faute d’inattention peut se solder pour une sévère défaite. Mais même dans la défaite, les parties ont quelque chose d'épique. On peut rire de sa propre naïveté, une fois le coup parti.
Le jeu est très agréable, fluide (les tours vont vite), d'une durée mesurée mais suffisante, et le jeu bénéficie d'un superbe matériel vraiment en phase avec son thème. Le mode solo est assez bien trouvé. Il est lui aussi un peu déstabilisant, mais dès lors que l'on a accepté que notre adversaire virtuel (automa) peut être tour à tour brillant ou peu bête... mais ne vous inquiétez pas, il vous mettra tout de même souvent à terre. Il faut plus le voir comme un bonus que comme une fin en soi, le jeu prenant toute sa mesure à plusieurs. Pax Pamir est tout cas un excellent jeu que je ne peux que recommander, surtout qu'il bénéficie d'une bonne VF maintenant, permettant de profiter au mieux des textes de contexte des cartes... de quoi découvrir un pan de l'histoire trop peu connu de par chez nous.