Dans Bios Megafauna, vous allez essayer de faire prospérer votre espèce (ou plutôt vos espèces), au cours des millions d’années qui ont précédé l’avènement de l’Humain sur Terre. On part ainsi d’un asticot ou d’un champignon, pour arriver à des individus de plusieurs dizaines de tonnes, et/ou doté d’une certaine forme d’intelligence (but ultime développer un protolangage). Il va s’en passer des choses… et la survie sera difficile…
Bios Megafauna V2 est un jeu qui ne conviendra pas à tout le monde (vrai aussi pour les autres Bios). Le jeu est assez complexe, avec des règles pas si faciles à expliquer, des parties sont relativement longues (compter bien 2h, voire un peu plus) et avec tout ça, et c’est là que le jeu peut déplaire, de l’aléatoire et de l’injustice. Bon, on n’est pas au niveau de Bios : Genesis, mais on peut perdre beaucoup sur un coup du sort (ou plutôt un mauvais enchainement de cartes évènements). Cela peut être rageant pour un jeu de cette longueur… ou pas. Tout dépend de l’état d’esprit avec lequel vous jouez. Le jeu est très thématique, plein de ces anecdotes scientifiques qui le rende passionnant pour peu que l’on goute à ces plaisirs. Par son injustice, il essaie de traduire une réalité : le développement des espèces n’a pas été un long fleuve tranquille, mais au contraire, une bataille de tous les instants qui a pu parfois tourner court à cause d’un évènement auquel les espèces n’ont pas pu faire face (mouvement des cratons terrestres, changement de climat….). Le thème ici l’emporte sur un gameplay « rond » ; ici on est dans du rugueux. A vous de voir ainsi si vous vous frustrer rapidement face à l’imprévisible, si seule la victoire compte ou si le combat lui-même a de la valeur, si perdre face à la fatalité, mais en ayant fait preuve de bravoure peut vous procurer du plaisir. C’est mon cas, je ne suis pas un compétiteur ; je fais de mon mieux pour gagner, mais je préfère l beau jeu à l’écrasement de l’adversaire, ou la victoire à tout prix. Pour ma part, nulle frustration dedans. Ma dernière partie a été terrible avec les plantes… Dans les deux derniers tours, il y a eu une conjonction d’augmentation du réservoir de nuage puis un agent mutagène, détruisant simplement toute ma population… En deux tours j’avais perdu 10 points de victoires (le premier finissant à 20 et moi à 7)… et laissé mes territoires aux autres (qui ne sont pas privés). Mais peu importe la partie a été agréable et j’étais le premier à me moquer du sort et de mon manque d’anticipation (il y aurait eu un moyen, coûteux, mais possible de me protéger de ces évènements).
J’aime vraiment beaucoup ce jeu. Je trouve qu’il offre utilise une thématique forte, très bien mise en scène, des mécaniques originales (cohabitation herbivore/carnivore, spéciation, etc.) très thématique. Les interactions sont très fortes… c’est un jeu d’expansion sur un terrain de taille limitée. On est vite en concurrence avec les autres joueurs. Il faut bien analyser les faiblesses des espèces adverses, voir comment les dépasser et voler leur place dans les différents biomes. Cela peut induire un défaut : il est difficile d’anticiper bien son tour avant de jouer. Cela peut induire des temps d’attente un peu long entre chaque tour. Mais, d’une part, comme les actions des autres ont souvent une influence sur nous-même, hé bien, on se sent concerné et on a tendance à bien suivre. D’autre part, les cartes sont remplies d’informations liées au thème expliquant à quoi elles correspondent dans notre monde. Si comme moi, vous êtes un minimum amateur de sciences ou même curieux, voici une mine que vous n’êtes pas prêt d’épuiser (par contre c’est en anglais). Evidemment, et c’est le cas de tous les jeux un peu lourds, il est sans doute à éviter à 4 avec des joueurs victimes d’Analysis Paralysis. Les règles sont rédigées dans un même souci d’apprendre. Cela peut rendre leur lecture et leur compréhension très délicate, d’autant que le jeu est uniquement en anglais. Mais heureusement la communauté française a fait une très bonne traduction (disponible sur BGG), il n’y a aucun élément de texte nécessaire pour le gameplay sur les cartes, et il existe d’excellentes vidéos de Chaps et Jean-Michel Grosjeux vous expliquant en détail le jeu.
Niveau matériel, on peut simplement dire que pour cette V2, il est très bon : l’iconographie est claire, les cartes et les plateaux sont bien illustrées (rien de fou, mais remplissant bien son rôle), pleines de détails intéressants et de qualité très satisfaisante. Sur ce point, on n’aura rien à redire au jeu.
Une petite particularité aussi : on peut jouer une sorte de campagne en commençant par Bios Genesis V2, puis en enchainant sur Megafauna V2 puis Origin V2 et finalement HighFrontier 4 all (à venir). Je ne sais si beaucoup tenteront cette grande aventure, depuis la soupe primordiale (Genesis) jusqu’à la conquête des autres planète (High Frontier), mais cela en fait tout de même une singularité à soulever.
Au final, Bios : Magafauna est un excellent jeu pour qui préfère l’expérience à la victoire, pour qui trouve fascinant de mener une espèce depuis le ver de terre jusqu’à des êtres doués de parole au travers de millions d’années.