[société] Les foetus et l'état civil

MrGirafe dit:
Les risques de dérives sont bien présentés par Philippe et peuvent être exploité comme argument par n'importe quel défenseur de la peine de mort (il faut la rétablir) ou condamneur de l'IVG (il faut l'interdire)...
Sans compter que ce sont parfois les mêmes (ce qui leur donne une forte contradiction intérieure à faire suivre par un spécialiste...)


Eh oui ! Certains pro-life américains sontpour la peine de mort, et certains farouches partisans de la protection des criminels sont favorables à l'avortement. J'ai toujours trouvé cela sidérant, mais bon... :D

Philippe dit: Eh oui ! Certains pro-life américains sontpour la peine de mort, et certains farouches partisans de la protection des criminels sont favorables à l'avortement. J'ai toujours trouvé cela sidérant, mais bon... :D


parce que dans la défense de la légalisation de l'avortement, il y a une dimension que tu oublies : le droit de la femme à disposer de son corps.

Philippe dit:Mais cela permet à des parents qui pensaient déjà à leur enfant, qui se le représentaient déjà, qui l'appelaient par son nom, de mieux vivre tout ça.

Il y a donc plusieurs étapes (dans l'ordre anti-chronologique) :
- la naissance
- la période de la grossesse ou l'avortement est interdit par la loi
- la période de la grossesse ou l'avortement est autorisé par la loi
Il y a donc "d'un coté" un enfant, et "de l'autre" un foetus.
Je n'ai pas l'impression que cette décision transforme le foetus en enfant, mais accorde le droit aux parents de considérer le foetus mort comme un enfant mort. De la même manière qu'avant l'accident, ils considéraient le foetus comme leur enfant à naitre.
Je ne pense pas qu'il faille voir cette décision comme une remise en cause de l'IVG systématisant le lien foetus = être humain vivant, mais plutôt comme une acceptation du fait que pour les parents ayant "accepté" ce futur enfant (autrement dit, n'ayant pas choisi l'avortement), ils ont le droit de donner une trace officielle à cet enfant pour effectivement faciliter leur deuil. Bref, un peu plus d'humanité.

Kouynemum dit:
... le droit de la femme à disposer de son corps.

Ne sachant pas ce qu'allait donner la conversation, j'ai attendu un peu...
Mais j'avais très envie de le dire en réponse à ça :
Philippe dit:
La loi sur l'IVG avait pour but de répondre à la détresse des mères mais elle touche d'autres sujets sensibles.


Parce que voir l'IVG uniquement en tant que réponse à une détresse, c'est se mettre une charpente dans l'oeil à mon avis....

Dites, je peux faire un peu de provoc' gratuite ?

Vous êtes sûrs que ce n'est pas un coup poilitique pour pouvoir annoncer dans quelques mois que la natalité a augmenté ? :pouicvomi:

Remarquez, d'un autre côté, les stats de la mortalité infantile risquent d'en prendre un sacré coup.......... :(

Kouynemum dit:
Philippe dit: Eh oui ! Certains pro-life américains sontpour la peine de mort, et certains farouches partisans de la protection des criminels sont favorables à l'avortement. J'ai toujours trouvé cela sidérant, mais bon... :D

parce que dans la défense de la légalisation de l'avortement, il y a une dimension que tu oublies : le droit de la femme à disposer de son corps.


Non, je connais cela (difficile de ne pas être au courant). De même que, dans l'autre camp, l'argument est l'innocence des enfants face à la culpabilité des criminels.
Il n'empêche que voir des positions croisées ainsi, c'est intéressant !

Sinon, disposer de son corps pose que l'autre personne n'existe pas : elle n'a pas de corps puisqu'elle n'est pas, mais le foetus apparaît comme une excroissance de l'autre corps pas encore individuée. Je dispose de mon corps... oui, mais est-ce le mien ? Cela dit, ce qui m'intéresse aujourd'hui (car ces arguments ont déjà été échangés), c'est le problème de cohérence législative et morale que cette décision va poser. Ici, si un foetus de 250 grammes est une personne, elle a un corps, et la femme ne doit pas alors dire qu'elle dispose de son propore corps, mais de celui d'autrui.

« La liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres »
-- Maxime

« Le corps des uns commence là où s'arrête celui des autres »
-- Alien

Philippe dit: Il n'empêche que voir des positions croisées ainsi, c'est intéressant !


la piste qui permet de ne rendre la contradiction qu'apparente c'est de réfléchir en positionnant la vie humaine soit comme avant tout individuelle soit comme membre d'un corps social.

je suis très perplexe par rapport à cette décision.
elle introduit du juridisme dans une situation où on est dans le pathos et le métaphysique : est-ce que c'est à la loi et au formalisme juridique d'aider les parents à faire leur travail de deuil ?
personnellement, j'aurais tendance à penser que ce domaine là doit lui échapper et que les solutions sont dans le rapport humain et pas dans le rapport juridique.

Philippe dit: Sinon, disposer de son corps pose que l'autre personne n'existe pas : .


c'est surtout poser que la femme n'est pas avant tout une matrice mais un individu à considérer en dehors de ses fonctions reproductives.

Philippe dit:
MrGirafe dit:
Les risques de dérives sont bien présentés par Philippe et peuvent être exploité comme argument par n'importe quel défenseur de la peine de mort (il faut la rétablir) ou condamneur de l'IVG (il faut l'interdire)...
Sans compter que ce sont parfois les mêmes (ce qui leur donne une forte contradiction intérieure à faire suivre par un spécialiste...)

Eh oui ! Certains pro-life américains sontpour la peine de mort


Bon en ce qui me concerne, je suis radicalement opposé à la peine de mort et si, ayant été une fois confronté à la question, l'IVG n'est pour moi pas une solution envisageable je suis content qu'il soit légal. Ceci dit, la position des pro-life américains me paraît assez cohérente. Dans leur esprit, le condamné à mort a mérité sa condamnation alors que l'enfant à naître est innocent... Et puisque les pro-life américains, généralement protestants, ont été désignés, je me permets de rappeler que c'est aussi la position officielle de l'Eglise catholique.

Philippe dit:Certains pro-life américains sont pour la peine de mort,

Cet aspect est en effet étrange on ne peut pas vouloir la vie à tout prix d'un côté (contre tout confort des êtres vivants adultes impactés par cette naissance non désirée) et envisager la mort tout de même d'un adulte pour améliorer la vie de ses victimes directes ou indirectes.
Philippe dit:certains farouches partisans de la protection des criminels sont favorables à l'avortement.

En revanche, cette approche me semble l'approche logique actuelle en France, me trompe-je ? Les oeufs avortés n'étant pas des enfants... Mais qui a décrété cet état de fait ? Sur le sujet, je délègue, je suis incompétent.

Puis, j'ai un point de vue un peu extrêmiste sur le sujet, je me dis que la société peut "produire" un enfant en neuf mois, alors qu'il lui faut au moins 15 ans pour produire une mère, il est donc plus important de protéger la mère que l'enfant... La perte de l'enfant pouvant être compensé par l'humanité en quelques mois, alors que la perte d'une mère demande plusieurs années.
Cela dit, je minimise un peu trop le fait que la perte de l'enfant ne laisse pas ses parents sans séquelles.

Eric dit:Ceci dit, la position des pro-life américains me paraît assez cohérente. Dans leur esprit, le condamné à mort a mérité sa condamnation alors que l'enfant à naître est innocent...

Leur position n'est pas plutot de dire que l'homme n'a pas le droit d'enlever la vie donnée par dieu d'un coté....tout en lui donnant le droit de punir a la place de dieu de l'autre ???? (ce qui me parait bien moins coherent).
Quoi qu'il en soit, heureusement que parfois la "logique" de quelques uns ne suffisent pas a la rendre juridiquement recevable pour tous.

Eric dit:
Et puisque les pro-life américains, généralement protestants, ont été désignés, je me permets de rappeler que c'est aussi la position officielle de l'Eglise catholique.


un point partout, balle au centre :D

Cookie dit:Encore une fois, chaque cas est unique...


Oui, et c'est là tout le problème du Legislateur, surtout sur un tel sujet.
En effet, la loi est par définition "générale et impersonnelle". Légiféré dans un domaine comme celui-ci est extrèmement délicat et j'avoue que j'ai bien du mal à me faire une opinion sur ce qui doit être considéré comme le "commencement" d'un être humain par exemple. Difficile de ne pas faire intervenir la morale ou l'éthique, les convictions profondes, religieuses ou autre etc...

Kouynemum dit:
Philippe dit: Sinon, disposer de son corps pose que l'autre personne n'existe pas : .

c'est surtout poser que la femme n'est pas avant tout une matrice mais un individu à considérer en dehors de ses fonctions reproductives.


Cet argument porte à coup sûr quand on parle de contraception ; quand il y a un enfant, c'est autrement plus difficile de considérer qu'il doit être mis sur la touche parce que la femme est "un individu à considérer". Cela dit, comprenez moi, sans vouloir offenser qui que ce soit.

C'est un aussi le problème dans la vie de famille, quand des enfants sont nés. Je ne peux pas faire n'importe quoi désormais, depuis que j'ai des enfants, car cela engage d'autres que moi.

Philippe dit:
et certains farouches partisans de la protection des criminels sont favorables à l'avortement. J'ai toujours trouvé cela sidérant, mais bon... :D


rien de siderant si on fonde son jugement sur un ideal humaniste en dehors de toute notion religieuse.

Philippe dit: Cet argument porte à coup sûr quand on parle de contraception ; quand il y a un enfant, c'est autrement plus difficile de considérer qu'il doit être mis sur la touche parce que la femme est "un individu à considérer". Cela dit, comprenez moi, sans vouloir offenser qui que ce soit.
.


je te comprends d'autant mieux que certaines femmes, à l'inverse, peuvent faire un déni de grossesse, au point qu'elles accouchent sans s'apercevoir qu'elles mettent au monde un enfant.
la parentalité à mon sens se vit d'abord dans la tête avant de se vivre dans le corps.
de même, qu'elle va se vivre même sans enfant "né".
donner une existence juridique à ce qui est un concept non-physique me parait très réducteur.

Kouynemum dit:
Philippe dit: Cet argument porte à coup sûr quand on parle de contraception ; quand il y a un enfant, c'est autrement plus difficile de considérer qu'il doit être mis sur la touche parce que la femme est "un individu à considérer". Cela dit, comprenez moi, sans vouloir offenser qui que ce soit.
.

je te comprends d'autant mieux que certaines femmes, à l'inverse, peuvent faire un déni de grossesse, au point qu'elles accouchent sans s'apercevoir qu'elles mettent au monde un enfant.
la parentalité à mon sens se vit d'abord dans la tête avant de se vivre dans le corps.
de même, qu'elle va se vivre même sans enfant "né".
donner une existence juridique à ce qui est un concept non-physique me parait très réducteur.


Je ne suis pas sûr d'avoir saisi toutes les implications de ce que tu dis, mais je suis d'accord avec ce que j'ai compris !

Sinon, je ne veux accuser personne ici d'être vieux, hein... :wink: :holdpouic: mais aujourd'hui, je pense que très très peu d'hommes en France considèrent leur compagne comme une "matrice", comme au temps des grandes revendications des années 1970. Je me risquerais même à dire que, au contraire, certains hommes oublient un peu vite qu'une femme porte en elle une matrice ! D'aucuns auraient tendance à laisser la femme se débrouiller avec les questions de fécondité et de contraception pour se concentrer seulement sur les joies de la sexualité...

Al1_57 dit:
Philippe dit:
et certains farouches partisans de la protection des criminels sont favorables à l'avortement. J'ai toujours trouvé cela sidérant, mais bon... :D

rien de siderant si on fonde son jugement sur un ideal humaniste en dehors de toute notion religieuse.


Ce qui est sidérant c'est le chassé-croisé avec le premier membre de la phrase, donc ne coupe pas ! Même si chaque camp bien sûr développe un argumentaire.

Au passage, mon intention n'était pas du tout de jeter la pierre aux protestants.

Le Zeptien dit:
Cookie dit:Encore une fois, chaque cas est unique...

Oui, et c'est là tout le problème du Legislateur, surtout sur un tel sujet.
En effet, la loi est par définition "générale et impersonnelle". Légiféré dans un domaine comme celui-ci est extrèmement délicat et j'avoue que j'ai bien du mal à me faire une opinion sur ce qui doit être considéré comme le "commencement" d'un être humain par exemple. Difficile de ne pas faire intervenir la morale ou l'éthique, les convictions profondes, religieuses ou autre etc...

C'est pour ça que je disais:
Cookie dit:Loin de moi l'idée de généraliser mais je ne pense pas qu'une fausse couche à 1 mois de grossesse doive être vécue de la même façon qu'une fausse couche à 7 mois... Et loin de moi aussi l'idée de pouvoir déterminer une date à partir de laquelle on doive différencier le fait qu'on a perdu un oeuf ou qu'on a perdu un bébé...


J'ai deux enfants et je sais que si j'avais fait une fausse couche ça aurait été plus dur à 7 mois qu'à 2 mois. Mais de là à dire à partir de quelle date j'aurais considéré ça comme "perdre mon bébé" et non plus "faire une fausse couche" (abus de langage), j'en sais fichtre rien... Et d'ailleurs je suis à peu près sure que ça n'aurait pas été la même période pour les deux...

Je reste quand même convaincue qu'il est plus facile (moins dur) de se dire qu'on a perdu un foetus plutôt qu'un bébé... Et comme je crois beaucoup au pouvoir de l'autosuggestion, je me dis que cette loi "pourrait" suggérer à certains parents qu'ils ont effectivement perdu un "bébé" et que ce n'est pas forcément leur rendre service pour se reconstruire...

On pourrait entamer une dissertation sur la mort dans la foulée... Dans nos sociétés, la mort est triste. Pourtant il parait qu'on va au paradis, alors pourquoi on pleure :mrgreen: . Parce qu'on est triste pour nous, le mort lui s'en fiche maintenant (évidemment, je fais volontairement abstraction des cas où le mort laisse des enfants qui ne sont pas encore autonomes). N'empêche que si on était convaincu que la mort est un processus normal et incontournable (et figurez-vous qu'il l'est...), ce serait plus facile à encaisser et donc plus facile pour se reconstruire...

Evidemment mes propos sont volontairement caricaturaux...

Un autre exemple de ce que les principes de la société nous imposent:
A Mayotte (mes parents y ont enseigné quelques années), les gamins de 12 ans n'ont qu'une idée en tête, trouver une fille pour passer la nuit. Là-bas, ça ne choque personne... Sauf les métropolitains qui sont quelque peu génés avec leurs filles de 12 ans qui n'ont pas la même éducation... Bref, chez nous c'est mal... et donc difficile à vivre. Pour eux c'est normal et tout le monde le vit bien...

Bon ok, je sais, je suis un peu longue et hors sujet...

Philippe dit:
Kouynemum dit:
Philippe dit: Sinon, disposer de son corps pose que l'autre personne n'existe pas : .

c'est surtout poser que la femme n'est pas avant tout une matrice mais un individu à considérer en dehors de ses fonctions reproductives.

Cet argument porte à coup sûr quand on parle de contraception ; quand il y a un enfant, c'est autrement plus difficile de considérer qu'il doit être mis sur la touche parce que la femme est "un individu à considérer". Cela dit, comprenez moi, sans vouloir offenser qui que ce soit.


Mais on peut considérer qu'il n'y a enfant que s'il y a un projet dans ce sens, que le projet soit voulu ou accepté , ou à la naissance lorsque le bébé devient autonome vis à vis de la mère.

C'est d'ailleurs à mon avis le sens de l'arrêt de la Cour de cassation.Reconnaitre le deuil de l'enfant voulu.