Se lancer dans le Go

Syl dit:"In the Beginning"


Celui-là, je l'ai lu cet été. Il est très bien pour découvrir les bases de la phase la plus difficile du jeu (amha).

greuh

Actorios dit:Tout cela donne envie de poursuivre pour améliorer sa pratique et son niveau... Si je me posais la question de savoir quoi travailler, je me suis plus ou moins fixé l'objectif d'étudier les 6 livres de l'Elementary Go Series qui couvrent les plus grand thèmes du jeu: le début de partie, les joseki, les problèmes de vie et de mort, les tesuji (ou coups remarquables), les stratégies d'attaque et de défense et enfin la fin de partie.


Bonjour,
j'avais déjà vu ce post il y a un an et à l'époque j'avais hésité à poster dedans. Comme je vois que tu t'accroches et que apparemment tu n'as pas de contact avec des clubs et que tu dis ne pas trop savoir comment faire pour progresser je me permets de poster quelques conseils.
J'espère que cela te sera utile et que mon poste ne paraitra pas trop péremptoire, c'est pas le but, je cherche juste à t'aider mais c'est vrai que j'ai un avis bien tranché sur la question, et qui est assez différents de ce que beaucoup de joueurs de niveau moyen sur KGS ou en clubs pensent.

Tout d'abord je me présente un peu: je ne sais pas quel est mon niveau actuel, je ne joue plus beaucoup depuis plusieurs années mais à mon meilleur niveau j'étais presque 1er dan. J'ai appris à jouer en France avec un copain et ensuite en club, j'ai également joué sur KGS et IGS.
A cette époque là je passais beaucoup de temps à étudier et jouer au go, mais je m'y prenais n'importe comment et n'ai pas progressé très vite.
Puis je suis aller vivre en Chine et là j'en ai profité pour aller faire un tour dans des écoles de go avec des professionnels comme professeur et qui visent à former des professionnels. Je n'ai reçu que très peu de cours personnellement, mais j'ai pu assister aux cours que les futurs (potentiels) joueurs professionnels de go recevaient.
Et là ça a été la claque :shock: :shock:
Déjà en Chine on ne compte pas les niveaux en dessous de 1er dan:
quand les gens te disent qu'ils ne savent pas jouer, ils sont à peu près 1er dan, quand ils disent qu'ils sont nuls: 2e ou 3e dan, 4e dan c'est standard.
Quand je suis arrivé là-bas personne n'avait un niveau aussi faible que le mien :oops: , même les gosses de 7 ans qui venaient de commencer à prendre des cours ils étaient plutôt 5e kyu :shock:
Et je me suis rendu compte qu'ils apprenaient d'une façon complètement différente:
jusqu'à 2e, 3e dan ils ne mettent l'accent QUE sur les problèmes de vie ou de mort et de tesuji.
J'ai vu des gosses qui ne connaissaient qu'un dizaine de joseki à tout casser et qui dans le yose avaient un niveau tellement faible qu'ils auraient probablement perdu une vingtaine de point dans le yose contre un 5e kyu français, mais ils étaient... 2e dan!!!
Et oui car quand ils ne connaissent pas un joseki ils peuvent s'appuyer sur leur connaissance en matière de Tesuji et de Tsumego, et peut-être qu'il feront une erreur dans le joseki, ils ne feront pas la séquence optimale, mais ils ne provoqueront pas non plus une catastrophe et au maximum perdront peut-être 4,5 points (en fait souvent beaucoup moins), alors que pendant la majeur partie du jeu ils sont très forts.

Donc pour l'elementary go series, ben je te conseillerai seulement les volumes sur le tsumego et les tesuji, parce que les autres te seront pas ou peu utiles.
Les Joseki tu en apprendra quelques uns naturellement en jouant, et pour le yose c'est pareil.

Bien sûr on peut décider de consacrer du temps à étudier les josekis ou le yose pour le plaisir, il faut juste savoir que l'on progressera beaucoup moins vite. Par exemple moi j'adore le fuseki et je fais des problèmes de fuseki mais je pense que pour que progresser autant que quand je fais un problème de tsumego, il faut que je fasse 100 problèmes de fuseki (estimation personnelle mais c'est pour te donner une idée du décalage) et je pense que pour les joseki ou le yose, le décallage est encore plus grand.

Bon je m'arrête là, je m'apperçois que j'en ai déjà écrit une grosse tartine :D j'espère que cela te sera utile (tu peux faire des problèmes de tsumego et de tesuji tout seul dans ton coin, en plus maintenant il y a plein de sites qui en proposent) et si tu as des questions n'hésitent pas.

PS:en fait ce que je dis dans ce post, c'est ce que disent presque tous les bons joueurs, mais moi comme les autres je ne voulais pas les écouter avant d'aller en Chine, c'est pour ça que j'ai parlé de mon expérience.

Intéressant ce que tu écrits, Gartch. Finalement développer ses capacités de lecture est le point principal.

Ensuite j'aurais une question pratique : faut-il faire des tsumegos faciles par rapport à son niveau (genre j'intuite la solution et je la vérifie en 15 sec) ou des tsumegos un peu plus ardus qui demandent plusieurs minutes de réflexion ? Je ne sais jamais trop où fixer le curseur...

Disons que les tsumego doivent être à ta portée sans être impossible. Beaucoup de tsumego s'appuie en fait sur d'autres tsumego plus simple.
En fait le principe est assez simple: c'est comme dans un combat en vrai, faut rester vivant pour avoir une chance de vaincre ;) Et les joueurs pro connaissent en fait énormément de positions par coeur (je ne parle pas de joseki mais bien de tsumego et de formes vivantes/mortes)

Merci m'sieur Gartch. Je vais de ce pas suivre tes conseils et me concentrer sur les tsumego et les tesuji.

greuh, toujours preneur de bons conseils.

Syl dit:Intéressant ce que tu écrits, Gartch. Finalement développer ses capacités de lecture est le point principal.

Ca dépend de ce que tu entends par capacités de lecture, si c'est la puissance de calcul, c'est il est vrai très important et est développé par les problèmes de tsumego, mais c'est aussi une question de forme, qui permet de faire le bon choix quand justement on ne peut pas calculer, d'où les Tesuji :)
Syl dit:Ensuite j'aurais une question pratique : faut-il faire des tsumegos faciles par rapport à son niveau (genre j'intuite la solution et je la vérifie en 15 sec) ou des tsumegos un peu plus ardus qui demandent plusieurs minutes de réflexion ? Je ne sais jamais trop où fixer le curseur...


Ca c'est une question difficile, je ne suis pas sûr qu'il y est une bonne réponse universelle pour tout le monde. Je pense que certains individus apprennent plus vite en faisant beaucoup d'exercice très (trop?) faciles pour eux, et d'autres dont je fais partie ont besoin de problèmes qu'ils peuvent résoudre en 5 à 15 minutes. D'autres encore préfèrent faire des problèmes très complexes sur lesquels ils réfléchissent plusieurs jours.
Il y a aussi la question du support: moi j'ai besoin de poser les pierres sur un goban pour que l'exercice me fasse progresser, mais certains joueurs progressent en faisant les exercices juste en regardant la position dans le livre ou sur un écran d'ordinateur.

En tout cas ce qu'il est important de retenir c'est qu'il est normal de ne pas être capable de résoudre des positions dans une partie réelles de la même difficulté que les problèmes que l'on fait: pour le problème on sait qu'il y a une solution donc on cherche plus, et on a le temps pour ça. Mais même ainsi les problèmes de Tsumego font progresser car si on fait des problèmes de niveau n et que lorsqu'on joue on est capable de jouer à un niveau n-1, on progresse et c'est ce qui permettra plus tard de faire des problèmes d'un niveau n+1 et de jouer au niveau n.
D'autres part comme tu l'as dit cela permet d'améliorer la puissance de calcul, ce qui est très important pour tous les combats.

De manière générale je ne pose pas les pierres sur le goban. Si je ne trouve pas après plusieurs minutes, je préfère regarder la solution.
C'est plus simple :oops:

J'en ai peut-être déjà parlé, mais pour les Tsumego, il y a cet excellent site: http://www.goproblems.com/.

J'ai les deux premiers volume de "Graded Go Problems" de Kiseido (si je me trompe pas). Et autant le premier j'ai pas trop de mal, autant le second me laisse souvent pantois.

Ca force l'humilité.
greuh, quarante-douze kyus

Quelques pages sympa pour se sentir vraiment humble : :arrow: le bestiaire de Denis Feldmann.

Certains problèmes sont superbes... mais il faut s'accrocher pour les apprécier ! (et je parle des plus simples en ce qui me concerne)
Des curiosités en tout cas... J'aime beaucoup.

Il y a un bouquin énorme paru récemment en Français sur les problèmes de vie et de mort, c’est « Tsumego » de Motoki Noguchi, un pavé de 540 pages. Sur la couverture, on peut lire : « Objectif 1er dan ». Je trouve que l’apport de ce livre est considérable. Par contre, par moment, c’est un peu décourageant de voir tout ce qu’il faut mémoriser pour atteindre un bon niveau. Je suis sans doute un peu trop vieux pour ça. S’il seulement, j’avais 7 ans !

Même si les tsumego c’est essentiel, il n’est pas interdit d’améliorer considérablement son niveau en étudiant le début et la fin de partie, où l’on peut gagner beaucoup avec parfois un minimum d’étude. Les problèmes de fin de partie sont à mon avis particulièrement rébarbatifs à cause des calculs qu’ils impliquent, mais les problèmes de début de partie sont à l’inverse particulièrement agréables en ce qu’ils forment l’intuition. J’ai trouvé un grand profit à étudier « Get Strong at the Opening », un livre de 175 problèmes aux solutions commentées. Dans la même série, « Get Strong at Attacking » propose 136 problèmes de niveau stratégique sur l’attaque, pas des tsumego. Là encore, ces problèmes de par leur nature stratégique sont très agréables et forment l’intuition. Encore que certains peuvent trouver que former l’intuition est encore plus difficile que d’utiliser sa mémoire, je suppose que ça dépend des lecteurs.

gloomy dit:(Au fait, Je pense que tu es en Belgique. Si tu passes près de Bruxelles, n'hésite pas, je suis chaud pour une petite en live partie à l'occasion!)

Hello. Merci pour ton petit mot... Non, je suis pas en Belgique mais en Suisse... Ceci dit, on ne sait jamais, je pourrais passer sur Bruxelles un de ces jours. J'essayerai de te faire signe si tel était le cas.
Ticoche dit:J'ai découvert le Go en suivant des discution sur Tric Trac, puis j'ai essayé à Japan Expo sur un petit plateau, et je viens de charger sur iPhone une application pour apprendre à jouer, résoudre des problèmes, etc... (pas encore testé)
En tout cas, la lecture du plateau est un peu plus difficile qu'un autre jeu comme les échecs par exemple. Pas facile d'apprendre seul.

Smartgo Pro est un excellent logiciel: il vaut largement son prix et je le recommande chaudement. Il est idéal pour pratiquer des problèmes de vie et de mort.
Pour ce qui est d'apprendre seul, c'est en effet délicat, mais internet est là et il y a beaucoup de bonnes volontés pour aider à progresser et se motiver.
Gartch dit:Beaucoup de choses intéressantes...

Merci pour ce retour d'expérience... J'avoue être étonné du niveau des joueurs que tu mentionnes: aux Echecs en France, beaucoup de gens "savent" jouer mais la plupart n'en connaissent que les bases. J'ai lu qu'en Corée, 30% des personnes jouaient au Go. J'imagine que les niveaux dont tu parles concernent les joueurs de club ? Je suppose que "l'homme de la rue" n'est pas forcément 1d.
Je suis sûr que ce que tu dis est vrai et que la capacité de lecture ("reading" en anglais) est l'indicateur du niveau d'un joueur. Malgré tout, je tiens à mon programme de lecture de ces livres dits "Elementaires" (parce que j'apprécie leur lecture) à côté de Tsumegos et Tesuji pratiqués de manière plus opportuniste (dans le tramway, le train, etc.) mais régulière.
J'avoue que comme Syl, je me suis posé la question de l'instinct vs. calcul et j'en suis resté à la deuxième solution. Je pense que le premier est une meilleure méthode lorsqu'on est jeune et un pré-requis pour la seconde. Il faut bien développer une intuition du bon coup pour le valider par la suite.
De la même manière, je ne joue pas de blitz (je joue en 1h30 par partie environ). Bien sûr, je ne calcule pas dans toutes les situations mais si ça devient tendu, je veux pouvoir prendre le temps.
Néanmoins de par ton témoignage, je vais essayer de garder le rythme sur les tsumego et les tesuji et je pense que je m'attaquerai aux deux livres que tu cites après en avoir fini avec Attack & Defense.
En ce qui concerne le niveau, bien sûr l'envie d'atteindre la dan sommeille toujours mais, je suis réaliste: mon temps disponible est réduit, je ne suis plus si jeune, etc. J'essaye de me poser des jalons atteignables et de voir à les atteindre. Je pense que rien n'est impossible mais il faut ménager sa motivation... C'est vraiment une course de fond.
Syl dit:De manière générale je ne pose pas les pierres sur le goban. Si je ne trouve pas après plusieurs minutes, je préfère regarder la solution.
C'est plus simple :oops:

Je pense que Gartch faisait référence au fait de reproduire les diagrammes sur un plateau avant de les résoudre plutôt que de le faire à même le livre ou l'écran (mais je peux me tromper).
gloomy dit:J'en ai peut-être déjà parlé, mais pour les Tsumego, il y a cet excellent site: http://www.goproblems.com/.

Est-ce que ça vaut le coup de s'abonner selon toi pour avoir accès à la base hors-ligne? Je me posais la question...
greuh dit:J'ai les deux premiers volume de "Graded Go Problems" de Kiseido (si je me trompe pas). Et autant le premier j'ai pas trop de mal, autant le second me laisse souvent pantois.

Si ça peut te rassurer, j'ai refait récemment des problèmes de GGPFB 2 et j'ai trouvé que les solutions me venaient beaucoup plus facilement (je ne dis pas que je ne fais plus d'erreur). Ca vient vraiment à force mais il ne faut pas être trop impatient... Je suppose que c'est un peu comme les sudoku: au départ, on est assez lent et à force d'en faire, on devient très efficace (ce qui n'est pas mon cas, ceci-dit).
Syl dit:Quelques pages sympa pour se sentir vraiment humble : :arrow: le bestiaire de Denis Feldmann.
Certains problèmes sont superbes... mais il faut s'accrocher pour les apprécier ! (et je parle des plus simples en ce qui me concerne)
Des curiosités en tout cas... J'aime beaucoup.

ough... ça fait mal à la tête... :wink:
Je note le lien. Merci.
pyjam dit:Il y a un bouquin énorme paru récemment en Français sur les problèmes de vie et de mort, c’est « Tsumego » de Motoki Noguchi, un pavé de 540 pages. Sur la couverture, on peut lire : « Objectif 1er dan ». Je trouve que l’apport de ce livre est considérable. Par contre, par moment, c’est un peu décourageant de voir tout ce qu’il faut mémoriser pour atteindre un bon niveau. Je suis sans doute un peu trop vieux pour ça. S’il seulement, j’avais 7 ans !
Même si les tsumego c’est essentiel, il n’est pas interdit d’améliorer considérablement son niveau en étudiant le début et la fin de partie, où l’on peut gagner beaucoup avec parfois un minimum d’étude. Les problèmes de fin de partie sont à mon avis particulièrement rébarbatifs à cause des calculs qu’ils impliquent, mais les problèmes de début de partie sont à l’inverse particulièrement agréables en ce qu’ils forment l’intuition. J’ai trouvé un grand profit à étudier « Get Strong at the Opening », un livre de 175 problèmes aux solutions commentées. Dans la même série, « Get Strong at Attacking » propose 136 problèmes de niveau stratégique sur l’attaque, pas des tsumego. Là encore, ces problèmes de par leur nature stratégique sont très agréables et forment l’intuition. Encore que certains peuvent trouver que former l’intuition est encore plus difficile que d’utiliser sa mémoire, je suppose que ça dépend des lecteurs.


Salut Patrick,
Comme toi, j'ai acheté le livre de Noguchi (et j'imagine que comme pour toi, il est dédicacé :wink: ). Je ne l'ai pas lu au complet mais j'ai moi aussi beaucoup apprécié les problèmes élémentaires qu'il développe. Je pense le reprendre bientôt comme livre de chevet car je pense qu'il a débloqué pour moi quelques interrogations et, qu'il fait écho aujourd'hui aux propos de Gartch.

Bref, il y a de quoi faire...

Personnellement, j'aime bien aussi les livres de début de partie. Ils sont plus facile à lire à mon avis car on peut s'en impreigner plutôt que de les travailler au sens de la lecture. Bien sûr, "plus facile" à parcourir ne veux pas dire pour autant qu'on en tire "facilement" la substantifique moëlle... Mais, c'est agréable de diversifier son alimentation ludique... ne serait-ce que pour ne pas "saturer".

Malgré tout, "jouer" reste une voie essentielle car c'est là qu'on reste le plus facilement concentré et qu'on pratique le plus, peut-être, sa capacité de lecture.

Actorios dit:Salut Patrick,
Comme toi, j'ai acheté le livre de Noguchi (et j'imagine que comme pour toi, il est dédicacé :wink: ). Je ne l'ai pas lu au complet mais j'ai moi aussi beaucoup apprécié les problèmes élémentaires qu'il développe. Je pense le reprendre bientôt comme livre de chevet car je pense qu'il a débloqué pour moi quelques interrogations et, qu'il fait écho aujourd'hui aux propos de Gartch.
Bref, il y a de quoi faire...

Ah non, je n'ai pas de dédicace, mais si ça peut m'aider à devenir meilleur, j'essayerai d'en avoir une :wink: . Je crois que Noguchi est à Paris, ça doit être faisable.

Comme tu dis, avec ce livre, il y a de quoi faire…!

Dernière étape... le tournoi de Go

Il y a un mois environ, j'ai participé à un tournoi de Go: 36 participants répartis en 2 groupes. Les 16 joueurs les plus forts (4k et au delà) s'affrontaient sur 1h par joueur et 5 parties sur 2 jours. Les 20 autres constituaient le groupe B avec 7 parties étalées sur 2 jours en 40mn par joueur puis bio-yomi canadien de 20 pierres en 5mn.
L'ambiance était calme et les joueurs étalés sur une tranche d'âge allant d'une dizaine d'années à la cinquantaine (il y avait d'ailleurs un père et son fils qui participaient).

Je me suis inscrit en annonçant 8k KGS, qu'ils ont interprêté comme 8k tout court.

Après l'énoncé du réglement: règles japonaise, komi de 5.5, handicap -1, système suisse, pierre posée-pierre jouée, kifu (non recommandé) rempli après avoir joué le coup, le tournoi a démarré vers 11h du matin le samedi.

Le premier jour, j'ai eu l'occasion d'affronter:

* Le président de la fédération suisse de Go (5k): ce dernier m'a conduit à jouer deux joseki de défense du coin, ce qui lui a permis de bâtir un puissant moyo sur le bord... La partie n'a pas fait un pli et j'ai perdu assez largement (même si j'ai joué la partie jusqu'au bout). Ayant le devoir de suivre un peu le tournoi, il a quitté la table à plusieurs reprises pendant que je réfléchissais... Ca ne l'a pas empêché de l'emporter. Je commençais à me demander si je n'avais pas surestimé mon niveau.

* Un adolescent de 16k. Jouant à 7 pierres de handicap, il est parvenu à vivre dans les coins sous la menaces de mes pierres. Je n'ai pas forcément joué pour tuer ses groupes (me concentrant sur l'objectif du territoire et de l'influence) mais j'avoue que le temps limité et le jeu sur plateau ont rendu ma lecture plus difficile que sur internet. Je parviens à bâtir des territoires sur les bords et à enfermer une longue ligne de pierres noires au centre du goban. Sans doute perturbé par le temps limité et peut-être intimidé du fait de jouer contre un adulte, il a vite abandonné ce groupe (qui aurait peut-être pu survivre). Il a abandonné alors que je finissais en bio-yomi. Je finis la partie épuisé par l'effort requis et la tension... 5mn de pose au soleil et j'étais reparti.

* un jeune garçon de 10 ans (12k). Jouant à toute vitesse vertigineuse, il avait une habitude certaine du jeu et, avec 3 pierres de handicap, je n'en menais pas forcément large. Je jouais à mon rythme de grabataire et finit la partie en byo-yomi... Je ne me souviens plus exactement de la partie mais je me souviens qu'il a joué pas mal le temps (m'avouant à mi-partie qu'il avait réfléchi sur mon temps, profitant d'un oubli de ma part d'appuyer sur la pendule) en plaçant des pierres abusivement dans mes territoires en fin de partie. Il finit par passer et me laisser la victoire d'une courte tête (10-15 points de mémoire).

* Un étudiant de Lausanne (6k). Accompagné d'un ami, il me demanda en début de partie si ça me dérangeait que son ami note les coups sur un kifu. Répondant par la négative, je me lance dans cette partie à égalité (finalement, je préfère). La partie se tient et je tente une invasion/réduction de son territoire. Je lutte pour survivre et finit sans oeil à fuir vers le bord du goban. Le bon sens aurait dû me conduire à l'abandon mais animé par l'énergie du desespoir le parvient à trouver le bord. Etonné que je poursuive le jeu, il fait tenuki et déborde un de mes coins. C'est là où je trouve presque malgré moi un tesuji de connexion qui sauve mon groupe enfermé sur le bord du goban. Regardant le goban avec insistance, il finit par se pencher vers moi et me tendre la main en disant "j'abandonne". N'étant pas certain de l'impact de mon coup, je dû le jouer après la partie pour me conforter dans l'idée qu'il ne pouvait pas m'empêcher de vivre. J'ai un peu eu l'impression de voler cette victoire mais je l'ai malgré tout acceptée. Son ami m'a fait une remarque gentille en disant qu'il aimait bien mon style qu'il qualifiait de "très solide". J'étais flatté.

Le second, j'ai joué contre:

* Un japonais en mission au consulat (6k). Première partie que je jouais contre un asiatique, je m'attendais à une issue fatale. Je ne fus pas déçu : il jouait très calmement mais de manière très aérienne et espacée. Je ne faisait guère de territoire mais il ne jouait pas pour tuer, menaçant calmement et cherchant uniquement la contrepartie. J'étais mené mais raisonnablement. Je pu juste réduire son territoire avec une langue de pierres noires au centre du goban. Puis, je trouve une faille dans sa défense et lance une invasion qui finit pas tuer un groupe sur le bord. Il n'en fallut pas plus pour renverser la partie et gagner de quelques points. J'étais ravi.

* Le joueur en tête du classement de la poule B (7k). J'étais content d'en être venu à l'affronter. Il jouait bien, très bien, trop bien. Dans un conflit serré au milieu de la partie, l'issue apparaissait fatale... Dominé, je décidais d'abandonner... J'avais joué du mieux que je pouvais. Je n'étais pas malheureux pour autant. Il m'expliqua qu'il ne jouait qu'en tournoi et qu'il était assez content de son résultat. Il finit d'ailleurs par emporter le tournoi du groupe B avec 7 victoires sur 7 parties.

* Une fillette dont j'avais du mal à évaluer l'âge (6k). Elle me regardait avec des grands yeux en me posant des questions sur mon patronyme et en me parlant de Guillaume Tell qui apparaissait sur les pièces de 5CHF. Décontenancé, je me lançais sur la partie. Pinçant une pierre de coin en début de partie, j'alignais ma troisième pierre d'attaque et constatait qu'elle bâtissait pendant ce temps là un imense moyo de l'autre côté du plateau. Contrairement à mes parties de la veille, j'avais accéléré mon jeu répondant du tac au tac à mon adversaire. Je l'avais sans doute sous-estimée et j'aurais bien dû me garder de jouer vite car je me suis vite retrouvé englué et chassé sur le bord du goban. Ses coups étaient rapides et efficaces et je finis par perdre une partie de mon groupe collé au bord et celui qui avait envahi son coin. Je dû admettre ma défaite la plus sévère du tournoi à moins d'une centaine de coups joués.

Avant la remise des prix et les photos, j'ai eu l'occasion de discuter avec le père du jeune garçon de la veille qui donnait des cours aux jeunes sur Genève et qui m'a fait partagé sa vision quasi-mystique du jeu. Il en parlait avec beaucoup de passion et venait comme moi de l'univers du jeu plutôt que d'un intérêt initial pour l'Asie et sa culture. Finalement, j'ai passé un très bon moment et n'ai pas boudé mon plaisir de finir sur plus de victoires que de défaites. Les comportements étaient tout ce qu'il y avait de courtois et de respectueux et j'ai eu l'occasion d'avoir quelques échanges intéressants avec les membres du club local. Le vainqueur du tournoi était un joueur chinois qui a été estimé à 4 dan de niveau (il ne connaissait pas exactement son niveau en arrivant ou en tous cas l'a sous-estimé !). Le vainqueur du groupe B était donc mon avant-dernier adversaire qui malheureusement était déjà parti à l'heure de la remise des prix.


Une photo d'une des parties du groupe A figurant le vainqueur

Quant à moi, C'est donc sur un classement de 6e sur le groupe B et désormais classé officiellement 8k EGF que je quittais les lieux et retournais chez moi.

Vieux chat disait sur ce post qu'il fallait passer par un club et jouer en tournoi pour parfaire son initiation aux mystères du Go... M'y voilà donc après un peu plus d'un an de pratique. Je ne saurais trop conseiller à d'autres de se lancer dans l'aventure.

Comme tu le dis très justement, c'est bien plus stressant de jouer en vrai que devant son écran, les sensations sont bien meilleures à mon avis.

Super compte-rendu !
Si tu as fini en bio-yomi avec 20 pierres en 5 minutes, je veux bien croire que cela n'a pas dû être facile parfois :wink:

Je partage totalement l'avis de Vieux Chat : le jeu en vrai procure des sensations très intéressantes par rapport à la pratique via l'écran. On "ressent" ce que joue l'adversaire et la tension sur le goban transpire au-delà du plateau lui-même. Le comportement de l'adversaire durant la partie reflète quelque part l'efficacité de notre propre jeu...

Syl dit:Super compte-rendu !
Si tu as fini en bio-yomi avec 20 pierres en 5 minutes, je veux bien croire que cela n'a pas dû être facile parfois :wink:

En fait, j'ai fini 3 parties sur 4 en bio-yomi... Oui, on ne se refait pas. J'avais de la chance car 40mn + bio-yomi, c'est mon rythme habituel. Je n'avais pas trop de stress (jusqu'au bio-yomi) car ça me semblait naturel comme temps.
Syl dit:Je partage totalement l'avis de Vieux Chat : le jeu en vrai procure des sensations très intéressantes par rapport à la pratique via l'écran. On "ressent" ce que joue l'adversaire et la tension sur le goban transpire au-delà du plateau lui-même. Le comportement de l'adversaire durant la partie reflète quelque part l'efficacité de notre propre jeu...


Disons que la part de perception et d'émotion est très importante: on ressent les hésitations, les doutes ou parfois l'assurance de son adversaire. Il y a des parties qui se gagnent ou se perdent presque "au moral". Je ne sais pas si la tension est vraiment plus forte : je la perçois très bien aussi en ligne, le graphe de niveau "temps réel" aidant. Par contre, le comportement des joueurs est nettement meilleur et le plaisir tactile de jouer les pierres est très présent.

Actorios dit:Disons que la part de perception et d'émotion est très importante: on ressent les hésitations, les doutes ou parfois l'assurance de son adversaire. Il y a des parties qui se gagnent ou se perdent presque "au moral". Je ne sais pas si la tension est vraiment plus forte : je la perçois très bien aussi en ligne, le graphe de niveau "temps réel" aidant. Par contre, le comportement des joueurs est nettement meilleur et le plaisir tactile de jouer les pierres est très présent.
Je perçois aussi très bien la tension dans le jeu en ligne, mais pas avec la même intensité. J'ai l'impression que les joies et déceptions sont amplifiées devant un vrai goban.
On verra si cette impression perdure avec le temps (je n'ai pas encore beaucoup de parties "en vrai" derrière moi).

Concernant le tournoi auquel tu as participé, tu as reçu la copie du kifu de la partie contre l'étudiant de Lausanne ?

Et bien non... Ceci dit, j'ai son nom donc je dois pouvoir retrouver ça... Tiens, c'est l'objectif du soir (espoir).

Un joueur en dan m' aune fois expliqué que la manière de poser une pierre peut être très déstabilisant : entre celui qui les pose timidement (et dont on se dit qu'on ne va faire qu'une bouchée) et celui qui les claque systématiquement il y a un gouffre. Et bien souvent on se demande plus "pourquoi a-t-il posé sa pierre doucement ? Y aurait-il un piège que je n'ai pas vu ?" que "Bon, comment bouffer du territoire ?".
Le kibitz est une réalité ;)