Mais de quoi ont-ils peur ?

Oui, hein, de quoi ont-ils peur, les gens, quand on leur propose de jouer ?

Tantôt un ami de monsieur Proute passe à la maison pour faire un truc, puis au café je lui demande s’il aime bien les jeux.
Réponse : oui.
Je lui propose donc de se joindre à nous pour notre petite partie de Kingdom builder.
Il voit le jeu et blêmit : oh je le connais pas celui-là (tu m’étonnes).
Moi, rassurante : il est pas compliqué, tu sais, à chaque tour tu pioches une carte qui te dit sur quel terrain tu dois poser trois maisons, et c’est tout. (Oui, je sais, c’est pas tout à fait tout, mais bon, je faisais, et à ce stade de bl^émissement, j’en étais convaincue, une expérience sociologique.)
Lui : oh non, oh non, je le connais pas.
Moi : mais tu aimes bien jouer, non ?
Monsieur Proute : à quels jeux tu joues ? (histoire de savoir de quoi on part)
Lui : oh, euh, à la belote, un peu…
Moi : ah, ben celui-là, c’est plus facile que la belote (côté règles au moins, c’est sûr !)
Lui : ah oui mais non, euh, je vais pas y arriver, je vais vous regarder

Pour finalement dire au revoir et s’en aller au bout de dix minutes, après avoir bu son café.

Mais pourquoi il a dit qu’il aimait bien jouer, lui ??? C’est la seule différence d’avec la plupart des gens qu’on connaît qui eux disent d’emblée qu’ils n’aiment pas jouer, quand on le leur demande (oui, non, universellement, ils n’aiment pas jouer, à aucun jeu, aucun aucun aucun, même s’ils n’en connaissent sans doute que trois, et encore je suis optimiste).

Peut-être eut-il fallu lui proposer un Uno à la place, et encore, parce que je suis sûre qu’un 6 qui prend lui aurait fait tout autant peur. Car c’est bien la peur que j’ai vu sur son visage blêmissant.

M’enfin ???

La peur d’avoir l’air idiot, tout simplement.

J’en connais un specimen, quand il joue chez moi on ne joue quasiment qu’à des jeux coopératifs. Il n’a aucun problème pour apprendre des règles. Et en coop, il participe beaucoup, il apporte son aide etc.
Mais dès que je propose un jeu compétitif, il fait la grimace et je sens une angoisse dans ses yeux. Il est désemparé à l’idée de se retrouver tout seul à essayer de construire son jeu et sa stratégie perso face à des joueurs chevronnés. Peur de faire des erreurs débiles, d’être à la traîne, de ne rien comprendre et d’être jugé. Bon, là c’est moi qui extrapole un peu, mais il doit y avoir un peu de ça.

C’est marrant, j’ai le même complexe pour le jeu vidéo. A une époque je jouais seul contre l’IA à des jeux de stratégie type Age of Empires et Starcraft… Et je n’ai jamais réussi à me résoudre à aller jouer en ligne à ces jeux-là. Parce que dans mon imaginaire, les plates-formes en ligne étaient pleines de fous furieux qui allaient se moquer de moi et de mon développement de tortue, alors que moi j’avais juste envie de progresser à mon rythme.
Doit y avoir un peu de ça, peut-être…

La prochaine fois tu peux peut-être essayer de proposer un coopératif ?

Ah oui ?
Moi j’ai plus “peur” (en fait je n’ai pas vraiment peur, je vous rassure) de faire couler tout le monde à cause d’une bêtise de ma part dans un coopératif que de me couler toute seule dans un jeu compétitif. no

Chakado dit :La peur d'avoir l'air idiot, tout simplement.

J'en connais un specimen, quand il joue chez moi on ne joue quasiment qu'à des jeux coopératifs. Il n'a aucun problème pour apprendre des règles. Et en coop, il participe beaucoup, il apporte son aide etc.
Mais dès que je propose un jeu compétitif, il fait la grimace et je sens une angoisse dans ses yeux. Il est désemparé à l'idée de se retrouver tout seul à essayer de construire son jeu et sa stratégie perso face à des joueurs chevronnés. Peur de faire des erreurs débiles, d'être à la traîne, de ne rien comprendre et d'être jugé. Bon, là c'est moi qui extrapole un peu, mais il doit y avoir un peu de ça.

C'est marrant, j'ai le même complexe pour le jeu vidéo. A une époque je jouais seul contre l'IA à des jeux de stratégie type Age of Empires et Starcraft... Et je n'ai jamais réussi à me résoudre à aller jouer en ligne à ces jeux-là. Parce que dans mon imaginaire, les plates-formes en ligne étaient pleines de fous furieux qui allaient se moquer de moi et de mon développement de tortue, alors que moi j'avais juste envie de progresser à mon rythme.
Doit y avoir un peu de ça, peut-être...

La prochaine fois tu peux peut-être essayer de proposer un coopératif ?

Une analyse que je partage a 1000%
Pour nombre de mes amis, l’idee de jouer à un jeux de société compétitif, où la réflexion est une composante importante du jeux, est anxiogène. 
Et je me retrouve totalement dans ton histoire sur le jeux vidéo en réseau. Je ne joue finalement  en réseau qu’avec des personnes que je connais.

ça doit être à cause d’un manque de confiance en soi, accentué par la société compétitive dans laquelle on vit. La société actuelle nous fait croire qu’il faut être le meilleur, qu’il faut faire mieux que les autres donc il y a comparaison. Le jeu de société doit être un moment agréable (enfin j’espère) et quelqu’un qui ne connaît pas et à qui on va proposer un jeu compétitif, s’il manque de confiance en lui risque de refuser car il se dit qu’il va être nul, ne va rien comprendre et terminera bon dernier. Donc pour éviter de “vivre un échec”, la personne ne joue pas. 

Après, il y a des personnes compétitives de nature (et avec un léger manque de confiance en elles) et qui veulent toujours réussir. J’explique : je connais des joueurs qui ne veulent pas jouer à certains jeux tout simplement parce qu’ils disent n’avoir aucune chance de gagner. Ils ne disent pas qu’ils n’aiment pas le jeu, mais que les autres joueurs sont trop forts (ce qui n’est pas toujours vrai). C’est dommage comme réaction je trouve. En plus, ce n’est pas comme ça qu’ils risquent de s’améliorer.

Moi aussi je rejoins Chakado.
Et même en étant très éclectique dans mes choix de jeux, je peux avouer que si la fatigue est là le soir, ou si les compagnons sont un peu trop débutants, mon instinct me porte très volontiers vers le coopératif.

Idem pour mon comportement en ligne. Vive l’époque des LAN entre copains ! :wink:

Mais pour apporter un peu de neuf, est-ce que l’ami de M. Proute n’aurait pas simplement répondu “oui, j’aime les jeux” par un biais puissant : le conformisme. Il aura senti dans la façon dont est posée la question ou par divers indices dans la pièce que vous, vous êtes joueurs. Pour tisser le lien social, il a répondu oui car c’est ce qu’on attendait de lui.

Solution (face à un timide qui subit la pression sociale) ?
Je dirais de ne pas poser la question et tester directement les ressorts ludiques du cobaye de l’invité.
Apporter un p’tit jeu à manipuler, genre Babylone par exemple, en même temps que le café, et jouer.

Je précise que ceci est une pure analyse de comptoir. Je ne suis absolument pas expert. :slight_smile:

De celui qui met trois plombes à jouer car il veut absolument trouver le bon combo ou la bonne action pour gagner, à celui qui arrête de jouer car marre de perdre on croise toutes sortes de gars.

Parfois quand je sens les personnes ludiquement compatibles mais pas habituées à jouer je force la main sans vergogne. Le seul truc c’est qu’il faut pas se tromper de jeu…car sinon ça finit de les dégouter. Des jeux simples et si possible avec un delta entre le gagnant et le perdant faible. Ou du coop effectivement, ça passe bien.

Ton idée de conformisme est intéressante…
Et je ne connaissais pas Babylone, il a l’air mignon tout plein, ce jeu !

J’avoue que j’ai un peu du mal à l’idée d’avoir peur de passer pour un idiot en jouant. A un jeu. Un truc qui ne compte pas, quoi. Y aura pas de bulletin à la fin. Pas de fiche de paie. Pas de procès verbal.
Et je crois qu’on n’a pas besoin de jouer pour passer de temps en temps pour un idiot.

Bref, si je comprends bien, non seulement les gens pensent ne jamais (ou que rarement) passer pour des idiots (puisque ça a l’air très inconfortable), mais en plus, j’ai l’impression qu’ils sont beaucoup plus compétitifs que moi, puisqu’ils se sentent jugés sur un résultat à un jeu et que donc ce résultat leur importe beaucoup plus qu’à moi, qui aime surtout ce qui se passe pendant le jeu plus que le résultat (même si je suis contente quand je gagne, je ne m’estime pas stupide quand je perds, d’abord, c’est monsieur Proute qui est malin ,na) ? Ça va, z’êtes pas trop perdus dans ma trop longue phrase ?

Enfin bon, moi quand je joue, c’est avant tout du plaisir que je ressens, et ce que je gagne ou perde. Même si je dois avouer que certaines parties, quand on perd à répétition contre un joueur qui a compris un truc qu’on n’a pas compris, ne sont pas les plus plaisantes du monde, il reste que je suis fascinée par ce que justement je n’ai pas compris et que j’ai juste envie de recommencer !!! (Et oui, je peux être souvent fascinée, lol.)

Je ne peux même pas dire que c’est une fierté d’homme, je connais autant de femmes qui ne veulent pas jouer ! wink
Mais… mais… mais là le monsieur il a dit qu’il aimait jouer !!! (Et oui, c’est la première fois qu’on me la fait comme ça, celle-là !) Bon, ok, conformisme… (C’est vrai qu’il y avait un gros indice : j’étais en train d’installer Kingdom builder sur la table pour y jouer avec monsieur Proute quand l’ami est arrivé…) Conformisme… Hmmm…

J ai pour principe que si Kk1 que je rencontré ne me parle  pas de jeu ça ne sert à rien  de essayer de le convertir …Au moins je n ai pas ce genre de discussion  embarrassante

fatmax66 dit :De celui qui met trois plombes à jouer car il veut absolument trouver le bon combo ou la bonne action pour gagner, à celui qui arrête de jouer car marre de perdre on croise toutes sortes de gars.
 

Imagine le combo des 2 : le joueur paralyseur qui après avoir perdu la partie te dit qu'il n'y jouera plus.

J’ai personnelement parfois l’impresSion que jouer, c’est réfléchir et que réfléchir, on n’est pas habitué, on n’a pas envie.
Beaucoup préfèrent les sempiternelles discussions ou on parle à peu près toujours de la même chose, cela rassure, pas de changement, rien à apprendre.
Les loisirs sont de plus en plus passifs, on regarde la télé, Netflix, OCS, on joue à des jeux vidéos qui, en matières de gameplay me semblent un peu être les clones les un des autres.  Quand on y réfléchi, le cinéma ou la lecture de romans est tout aussi passif. 

Et tout d’un coup, on propose un jeu, on va devoir apprendre des règles, réfléchir… Cela n’interesse Pas tout le monde et beaucoup de ceux que cela intéressent sont trop fatigués pour faire l’effort.

a cela s’ajoute la peur de la nouveauté, la résistance au changement.

Est ce que l’on ne pourrait pas relier cela a une sorte de syndrome de l’imposteur  (psychologie de comptoir bonsoir): si je ne comprends rien ou me fait laminer alors tout le monde verra que je suis nul / pas intelligent / pas à ma place ici. 

Je dis oui pour être un même social que mes hôtes mais je bloque par peurgent d’être démasqué face à des joueurs aguerris.  Du coup plus le jeu est annoncé simple et plus la peur serait grande.

jmguiche dit :J’ai personnelement parfois l’impresSion que jouer, c’est réfléchir et que réfléchir, on n’est pas habitué, on n’a pas envie.
Beaucoup préfèrent les sempiternelles discussions ou on parle à peu près toujours de la même chose, cela rassure, pas de changement, rien à apprendre.
Les loisirs sont de plus en plus passifs, on regarde la télé, Netflix, OCS, on joue à des jeux vidéos qui, en matières de gameplay me semblent un peu être les clones les un des autres.  Quand on y réfléchi, le cinéma ou la lecture de romans est tout aussi passif. 

Et tout d’un coup, on propose un jeu, on va devoir apprendre des règles, réfléchir... Cela n’interesse Pas tout le monde et beaucoup de ceux que cela intéressent sont trop fatigués pour faire l’effort.

a cela s’ajoute la peur de la nouveauté, la résistance au changement.

Je trouve ton analyse très intéressante. 

Ce que tu écris, jmguiche, résonne pas mal en moi. Mais par contre, là pour le coup, c’est moi qui commence à avoir peur…

Tiens, ça me fait penser à une fille que j’ai croisé, un jour (nos bambins jouaient ensemble) et on se regardait en chiens de faïence avec vraiment pas grand-chose à se dire (heureusement nos bambins n’ont pas accroché non plus, finalement). Je lui propose donc de jouer et là elle me scotche en me répondant “Non, moi je préfère discuter.” Ok, ça pourrait se défendre, mais là on avait manifestement rien à se dire ! noOn est donc restées silencieuses, à s’ennuyer.



Par rapport à l’effort, quand j’y réfléchis je dois bien admettre qu’à part une ou deux perles rares, les ami(e)s qui jouent préfèrent volontiers les jeux légers du type party games que d’autres jeux que j’affectionne aussi pour ma part.


Pfffffffff…

sinamapongolle dit :Est ce que l'on ne pourrait pas relier cela a une sorte de syndrome de l'imposteur  (psychologie de comptoir bonsoir): si je ne comprends rien ou me fait laminer alors tout le monde verra que je suis nul / pas intelligent / pas à ma place ici. 

Je dis oui pour être un même social que mes hôtes mais je bloque par peurgent d'être démasqué face à des joueurs aguerris.  Du coup plus le jeu est annoncé simple et plus la peur serait grande. 

J'adore ta conclusion !

Proute dit :Tiens, ça me fait penser à une fille que j'ai croisé, un jour (nos bambins jouaient ensemble) et on se regardait en chiens de faïence avec vraiment pas grand-chose à se dire (heureusement nos bambins n'ont pas accroché non plus, finalement). Je lui propose donc de jouer et là elle me scotche en me répondant "Non, moi je préfère discuter." Ok, ça pourrait se défendre, mais là on avait manifestement rien à se dire ! noOn est donc restées silencieuses, à s'ennuyer.

Au delà de l'anecdote, amusante vu de l'extérieur, ça me fait penser que jouer est une activité qui ne nécessite pas forcément de matériel. Bien sûr, il faut un peu de feeling pour que ça passe, mais il y a un tas de jeux de mot, de charades, plus ou moins complexes, de variantes de Pyramide et consor,...
Il y a des personnes avec qui une boite en carton avec des illustrations dessus ferait écarquiller les yeux. Alors peut-être faut-il préférer s'en tenir à des petits défis à travers la discussion et rebondir si l'atmosphère ludique s'installe. Là, par exemple, ce serait le moment de proposer une clope avec Incroyable ment vrai.

L'idée que je soutien, c'est que la question "es-tu joueur" n'a pas d'intérêt. Mieux vaut être directement lucide sur la ludicité de la personne*, en partant du niveau zéro de la situation donnée.


@noisettes : Si tout le monde fait ça, on va avoir un problème pour se parler entre joueurs inconnus...

* Désolé pour l'effet, j'ai pas pu me retenir. ^^

Ben non si tu viens chez moi ou si tu cotoies mon groupe en soirée tu vas vite comprendre que nous sommes joueurs …Et j avoues ne pas avoir de souci de recrutement je joues avec le même groupe d une dizaine de personnes depuis 18 ans

C’est marrant, car en lisant vos messages, je me dis que personnellement, j’ai plutôt peur de discuter, car comme dit dessus, les discussions tournent toujours autour des mêmes sujets, et je sais d’avance comment je vais me faire chier, et je n’ai pas envie de faire semblant de m’intéresser : je le fais déjà bien assez au boulot. Alors que jouer :slight_smile:
Alors peut-être ont-ils le même ressentis mais dans le sens inverse (sauf que jouer : changera de jeu à chaque fois).

PS.: par contre je rejoins certains, sur le fait que maintenant j’essaie même pas d’essayer de faire jouer des gens; si ils demandent c’est le premier qu’il suffit pour les faire jouer, sinon on fait autre chose.

Je rejoins l’avis de jmguiche, et j’irais même plus loin: 
Je pense qu’en fait c’est plutôt la flemme de s’investir qui pousse à ce genre de comportement, flemme de s’investir (apprendre des règles) dans un domaine n’ayant (au sens où on l’entend sur ce forum) aucune importance aux yeux de la personne qu’on essaie de faire jouer.

Il y a surtout (amha) le fait que le jeu, c’est pour les enfants. Nous on est des adultes, on fait des trucs sérieux comme payer nos impôts, nous intéresser à la vie politique, se lever tous les matins pour aller au travail, etc. etc.  Alors jouer ?  Bon, à la limite le trivial pursuit car c’est intellectuel et la belote ou le 421 au café car c’est permis par les bonnes moeurs.

Enfin bref, c’est ce que j’ai ressenti en proposant de jouer à plusieurs amis de mes connaissances.  Paradoxalement, les jeux qui passaient le mieux était les jeux à l’abord le plus sérieux, froid et chiant.