Des joueurs imbattables.

Salut à tous,
 
Je lance ce débat pour avoir votre opinion sur un sujet dont on parle peu mais qui fut évoqué dernièrement avec mes potes.
 
Est-ce qu’un joueur qui est outrageusement meilleur que les autres peut-il nuire à un club de jeux ou à un cercle d’amis ?

Je ne parle pas des personnes qui vont se vanter d’être meilleur ou vont rigoler en écrasant les autres, je parle juste des personnes qui gagnent très très souvent
 
On connait tous des gens qui sont extrêmement forts quelque soit le jeu auquel ils jouent.
 
Est-ce que cela vous est arrivé d’atteindre un stade où certains ne veulent plus jouer avec une personne car ils ont une trop faible chance de gagner contre elle ?

Je connais des gens qui ne veulent pas rejouer à un jeu s’ils perdent lamentablement à leur première partie, c’est pire dans ce cas, cela veut dire qu’il ne faut pas qu’ils jouent leur première partie contre des gens qui sont dit “plus fort”.
 
 Est-ce que ces gens qui gagnent très souvent doivent se brider intentionnellement pour laisser une chance aux autres ?
 
Le jeu de société est un moyen de passer du bon temps avec ses amis ou dans un club, l’offre du marché est pléthorique en jeu d’affrontement ou compétitif - cad ceux où il y a un vainqueur seul et unique.  Est-ce que cette course aux points de victoire, ne pousse pas à ce clivage Bons vs moins bons ?
 
Beaucoup de questions, désolé mais je m’interroge. Le marché du jeux vidéo tend à créer des pro-gamers, est-ce que le monde du jeux de société n’a pas la même tendance ?

Quelle est la place de ces joueurs dans notre communauté ?

 

Oui, j’en connais un
Et je trouverais extrêmement vexant qu’il se bride. Il est fort, tant mieux pour lui
La victoire contre lui n’en est que plus méritoire (enfin, le mérite… on peut en discuter mais tu vois ce que je veux dire, j’espère)

Cela étant dit, tout dépend ce que l’on cherche dans un jeu.
A mes yeux, le jeu est un moyen de s’accorder un moment “hors de la vraie vie”, un moment avec des règles (simples ou pas) claires mais dont l’enjeu est “pour de faux” : gagner ou perdre, il ne peut rien arriver de vraiment important.
(Raison pour laquelle je n’aime pas les jeux d’argent : là il peut arriver des choses “importantes”)
C’est aussi une occasion de se triturer les méninges mais, en l’absence d’enjeu réel, c’est presque récréatif pour moi.

Lorsque le jeu se mâtine de compétition intellectuelle où il semble poindre un enjeu de type “c’est qui qui a la plus longue”, je reconnais que ça m’intéresse déjà moins (oui, peut-être la peur de perdre me direz-vous… je vous laisse ricaner :))
Mais je sais que ce genre de joueur/joueuse existe, c’est honorable même si ça me correspond (très) peu.
Evidemment dans ce cas ils/elles vont se lasser car savent ne pas pouvoir trouver ce qu’ils/elles cherchent en jouant.
Mais, franchement, il ne faut pas avoir beaucoup de fierté pour se satisfaire d’une victoire contre quelqu’un qui s’est donné 1000 handicaps. (Un peu comme se satisfaire d’une victoire en trichant, d’ailleurs…)

Bon, ben le Pingouin a fort bien exprimé ma pensée (une fois de plus).

Dans une association de joueurs, il arrive qu’il y ait un joueur qui correspond au profil que tu énonces, à savoir un joueur “fort”.
Nous n’avons aucune réticence à jouer contre lui car ce n’est pas un joueur arrogant, et même si on se fait plier, on passe un moment agréable, et c’est bien là tout ce qui compte.
Du moment que le joueur fort en question ne se comporte pas comme OSS 117 lorsqu’il joue au jokari, je l’accepte à ma table avec plaisir. Et si, un beau jour où les étoiles sont favorables, il m’arrive de le battre, alors la partie n’en sera que plus mémorable.

Le corollaire serait donc “Joue-t-on pour gagner ?”
J’aurais tendance à dire oui (selon le jeu et les joueurs autour).
Mais d’autres te diront le contraire. Que le moment partagé se suffit à lui-même.
Vient ensuite le niveau du joueur en face. Est-il très bon ou imbattable ? Si on me propose une partie d’échec avec Kasparov, je ne suis pas certain de vouloir jouer… on pourrait rétorquer que c’est un moyen d’apprendre. Tout dépend donc de la manière d’aborder le truc.

Donc pour répondre aux questions :

Est-ce qu’un joueur qui est outrageusement meilleur que les autres peut-il nuire à un club de jeux ou à un cercle d’amis ?
Je dirais non mais tout dépend de son attitude (condescendant, mauvais esprit, humour etc). 

Est-ce que ces gens qui gagnent très souvent doivent se brider intentionnellement pour laisser une chance aux autres ?
Tout vient du “très souvent”. S’il lui arrive de perdre, alors aucune raison de se brider.
Si par contre ce joueur est réellement imbattable (cf. au-dessus), je pense qu’il est pertinent d’ajuste son niveau pour rendre le jeu compétitif pour les autres joueurs.


Lorsque je joue dans un milieu “casual” (donc principalement ma compagne, mes amis, mes collègues), j’ai  tendance à gagner la majorité de mes parties et je me retrouve donc un peu dans ce que tu décris. Je me l’explique par le fait que depuis très jeune je joue à des jeux de stratégie sur PC et forcément je pense que ça a eu des conséquences (positives) sur ma façon de réfléchir.

Pourtant, je ne cherche pas à me brider, ça m’est d’ailleurs impossible : à moins de vraiment me dire que sur une partie je vais partir sur un axe de développement sous-optimal pour voir où il peut me mener, j’aurais sinon toujours tendance à chercher à faire le meilleur coup possible. Et si le meilleur coup est un coup contre l’adversaire et non pour moi, je ne me retiendrai pas de le faire (ma compagne le répète d’ailleurs à l’envie à tous nos partenaires occasionnels).

L’objectif pour moi n’est malgré tout pas de montrer que je suis le plus fort ou le plus intelligent. D’une part c’est déjà par respect pour mes adversaires : quel mérite auraient-ils à une victoire si je sous-joue volontairement ? Ensuite parce que dans ma façon d’aborder le jeu de société, l’exercice est surtout de me mesurer à moi-même, simplement chercher à faire de mon mieux, à progresser (comme je le faisais quand je jouais au JV en ligne).

Comme solution, je dirais que j’ai déjà la chance d’avoir une compagne qui n’est pas susceptible et qui aime jouer pour le jeu et non pour la victoire (pff, attitude de loser yes). Ensuite, ça passe mieux avec des jeux où tu as l’impression de construire quelque chose, et où tu en tires satisfaction malgré la défaite : Puerto Rico, Les Châteaux de Bourgogne… Ou des jeux suffisamment rapides pour qu’on puisse enchaîner des parties, laissant ainsi l’occasion aux autres de décrocher une victoire dans la série : Azul, Taluva… Enfin, des jeux où le simple esprit logique n’est pas forcément suffisant pour gagner, je parle bien entendu souvent de jeux plutôt familiaux : Dice Forge (je ne gagne jamais !), LADR (selon tirage des destinations), etc. En revanche un jeu sur lequel ça passait moins bien c’est Sankt Petersburg, car au fur et à mesure Madame constatait à quel point elle était derrière sans espoir de me rattraper, et elle baissait donc les bras.

A noter que tout cela n’est plus vrai lorsque je joue au club contre des gens qui ont davantage d’expérience.

Étant la personne la plus habituée de la chose ludique de mon cercle le plus régulier, je suis régulièrement victime d’une alliance des autres joueurs.

Cependant je n’aime pas gagner sans challenge. Du coup il m’arrive de faire des parties cours sur certains jeux pour donner des conseils stratégiques à mes partenaires, leur apprendre à interpréter les coups adverses, à préparer sa stratégie etc.

Autres solutions, les jeux coop ou tous contre un. Et j’attache aussi de l’importance à la part d’aleatoire dans les jeux que je propose. En effet, moins il y a d’aleatoire, et plus les joueurs doivent avoir le même niveau pour faire une partie intéressante. Étant le seul du groupe à m’interroger en dehors des parties sur comment jouer pour maximiser tel ou tel axe, j’ai souvent rapidement plus “d’expérience” que mes partenaires. Du coup, moins il y a d’aleatoire, et plus le jeu est, selon moi, réservé à une pratique en tournois.

Après, c’est pas de ma faute si les autres sont mauvais. (c’est de l’humour les gens, détendez-vous  c’est du 3e degré)

Tiens, d’ailleurs en lisant Liopotame ça me fait penser qu’il y a un environnement où je suis (hum… j’ai été) incontestablement le joueur le plus fort : avec mes enfants.
Eh bien, je ne me suis jamais bridé. Jamais.
Et ils ont couiné - beaucoup.
Mais je leur ai toujours dit que, le jour où ils me battraient, ils auraient la certitude que je ne leur ai pas offert la victoire, et que je ne chercherai pas une excuse bidon.
C’est arrivé, pour les trois. Et ils étaient fiers. Tu sais quoi ? Moi aussi j’étais fier. Pas d’avoir perdu, hein : juste qu’ils aient progressé, par eux-mêmes et au moins un peu grâce à moi. Elever ses enfants, ça se comprend de plusieurs façons différentes ; dont l’une, la littérale : les amener plus haut.


Ne pas jouer pour gagner, je ne comprends pas le principe.

Le jeu a des mécaniques qui ont été agencées afin de permettre au joueur qui les utilise correctement de remporter la victoire. Ne pas utiliser ça, c’est ne pas jouer au jeu.

Après, qu’on réussisse effectivement à gagner ou pas, c’est autre chose, et, pour moi, peu importe.
Mon but par contre, c’est de jouer le mieux possible. Faire les meilleurs actions possibles, les meilleurs choix possibles, pour optimiser au mieux mon jeu.

Si je ne fais pas ça, ça n’a pas de sens. Pour faire une comparaison un peu débile mais dans l’idée, ça voudrait dire qu’en jouant au Yahtzee/Yam’s/Yatzy, si en lançant les dés, j’obtiens que des 6, je relance tout quand même. C’est limite de l’anti jeu :D 


Donc il faut que le joueur imbattable joue comme d’hab. Le battre sera génial, être second sera un honneur :slight_smile:

Ce qui m’est déjà arrivé, c’est de jouer face à quelqu’un qui transformait tout en maths. Tout n’était que combinaisons mathématiques, probabilités, (sur Discoveries Lewis & Clark). Il a gagné haut la main. J’ai trouvé ça honnête (il a maximisé ses chances de gagner), mais un peu triste, car le jeu n’était plus qu’une grosse fonction mathématique.

pingouin dit :
A mes yeux, le jeu est un moyen de s'accorder un moment "hors de la vraie vie", un moment avec des règles (simples ou pas) claires mais dont l'enjeu est "pour de faux" : gagner ou perdre, il ne peut rien arriver de vraiment important.
(Raison pour laquelle je n'aime pas les jeux d'argent : là il peut arriver des choses "importantes")
C'est aussi une occasion de se triturer les méninges mais, en l'absence d'enjeu réel, c'est presque récréatif pour moi.

Pas mieux.

N’étant pas un joueur “coopératif”, je préfère trèèèès largement jouer avec des joueurs “forts” plutôt que contre des brêles qui pigent pas grand chose et n’ont aucune vision stratégique du jeu auquel ils jouent. L’intérêt de leur rouler dessus est assez faible pour moi.

Pit0780 dit :Pour faire une comparaison un peu débile mais dans l'idée, ça voudrait dire qu'en jouant au Yahtzee/Yam's/Yatzy, si en lançant les dés, j'obtiens que des 6, je relance tout quand même. C'est limite de l'anti jeu :D

Si tu fais que des 6, tu es pas près de gagneryes

Aquasilver dit :
Pit0780 dit :Pour faire une comparaison un peu débile mais dans l'idée, ça voudrait dire qu'en jouant au Yahtzee/Yam's/Yatzy, si en lançant les dés, j'obtiens que des 6, je relance tout quand même. C'est limite de l'anti jeu :D

Si tu fais que des 6, tu es pas près de gagneryes

C'est pas faux :D 
Mais j'avais prévenu que ma comparaison était débile yes

Holà les gameurs du café philo,

Je rejoins un peu Retrogamer et ajouterai que je préfère jouer contre des gens forts qui envoient du lourd que contre des quiches car c’est beaucoup moins évident d’anticiper et de prévoir des trucs “logiques” car ils ne savent pas ce qu’ils font ni où ils vont en termes de startégie et c’est frustrant, de mon point de vue car ça tire le niveau vers le bas.


Bobby en goûtant

bobbylafraise dit :
Je rejoins un peu Retrogamer et ajouterai que je préfère jouer contre des gens forts qui envoient du lourd que contre des quiches car c'est beaucoup moins évident d'anticiper et de prévoir des trucs "logiques" car ils ne savent pas ce qu'ils font ni où ils vont en termes de startégie et c'est frustrant, de mon point de vue car ça tire le niveau vers le bas.
 

Moi c'est surtout à Scythe que les débutants me dérangent : ils ne font jamais les actions du bas qu'ils sont censés faire. Du coup, mes recrues ne servent à rien.

On est bien d’accord, et que dire des débutants drafteurs à 7 Wonder… 

Bonjour à tous, ma petite pierre à l’édifice.
Chez nous, il n’y a pas vraiment de joueur qui surnage largement au dessus des autres. Chacun à ses petits jeux fétiches où effectivement il est dur à battre mais pas une domination nette sur l’ensemble des jeux même si deux ou trois sont quasi toujours placés sans être forcément vainqueurs.
Du coup, la rotation des jeux évite ce phénomène!

Sinon pour ce qui est de la domination. Personnellement, ce que j’essaie de faire c’est explorer d’autres stratégies quand c’est possible (et surtout quand je joue contre des nouveaux). Sinon ce qu’on fait c’est un petit débrief en fin de partie: “tu m’as laissé faire ça du coup ça m’a permis de faire ça qui a fait que je te met 10pts dans les dents”.
C’est le partage d’expérience qui permet à tout le monde de progresser, les battus profitent de l’expérience du vainqueur, le vainqueur profite du retour des vaincus (adaptation de stratégie, nouvelles voies offertes…).

Le changement de jeu est vraiment la clé pour ce genre de personne, personnellement je ne joue plus avec deux personnes à agricola car elles ont tellement essoré (elles jouent à ça presque toutes les semaines) le jeu qu’elles ne jouent plus que de façon mécanique, sans intérêt pour les autres que faire “arbitre” en plombant une action à l’un ou à l’autre.

Merci pour ces supers réponses détaillées.

Vous avez raison, on en est venu à la même conclusion que la plupart ici.

Un joueur bcp plus fort aura tendance à tirer les gens vers le haut, et c’est souvent plus désagréable d’avoir quelqu’un qui perd tout le temps en faisant n’importe quoi, en passant 10 min dans son tour pour rien faire que quelqu’un, qui joue parfaitement.

Bien sûr je ne parlais pas de Kasparov, mais de quelqu’un qui puisse être bon à énormément de jeux et qui gagnent très souvent, pas quelqu’un de spécialisé.

Pour la question des pro-gamers, est-ce que cela existe ou va exister dans notre milieu ? (Magic est à part).

Moi j’en connais un comme ça mais maintenant on se ligue tous contre lui, ça nous amuse beaucoup et lui ça lui fait un vrai challenge.
Et ça lui apprend à perdre un peu.

Jaycee48 dit :Pour la question des pro-gamers, est-ce que cela existe ou va exister dans notre milieu ? (Magic est à part).

Pour qu'il y ait professionnalisation, il faut d'une part un jeu qui ait une audience considérable, et d'autre part que "quelqu'un" soit prêt à mettre de l'argent.
Le premier c'est une notion paradoxalement objective et subjective. Le jeu de société se popularise mais doucement et plutôt par le côté party games / casual games, par lequel on voit je vois mal arriver des ligues professionnelles.
Certains jeux sont taillés pour du tournoi, sont très connus et très pratiqués, je pense notamment à Dominion. Et pourtant, il n'y a pas de professionnalisation (à ma connaissance).
Pourquoi ? A priori à cause du 2ème point : qui paie ? Les éditeurs essaient déjà de gagner leur vie sur leurs ventes, et ce n'est pas forcément le Pérou pour tous. Le jeu de société n'est pas une activité très télégénique ni même YouTubegénique / Twitchgénique. Quel annonceur viendrait mettre un billet là-dessus ?
Il me semble qu'il existe (ou a existé) des championnats du monde d'Agricola ou des CdF de Hanabi mais plutôt à la coule que sur un mode vraiment sérieux.
Cela étant, je ne suis pas sûr qu'il faille s'en plaindre.

Des forts joueurs, j’en ai connu et j’en connais encore… jouant depuis des années dans un club orienté jeux costauds, forcément, il faut s’attendre à une certaine adversité.
Mais tous les “forts” joueurs ont des points faibles : il y a celui qui n’aime pas les jeux d’enchères, celui qui n’aime pas les jeux de majo, celui qui n’aime pas la part de hasard, etc…
J’en connais un qui est imbattable à Tzolk’in, un autre difficilement prenable à T&E, un autre qui gagnait régulièrement à Myrmes et Troyes…

C’est une bonne chose d’affronter ce type de joueur. Cela crée un challenge et c’est ce que je recherche sur des jeux ayant une certaine densité. Cela dit, jouer contre des joueurs à la force plus modeste (dont je fais partie) est un plaisir aussi (et puis cela me laisse de meilleures chances…).no
Pour revenir sur un point évoqué plus haut, gagner est-il important ?  J’ai toujours trouvé que la question était mal posée. Ce qui est important, c’est de faire ce qu’il faut pour essayer de gagner. D’ailleurs, si on lit attentivement la plupart des règles, elles fixent le plus souvent un but du jeu, à savoir d’être le premier à réaliser ceci ou être celui qui a le plus de cela à la fin de la partie, etc…, et donc ne pas essayer de gagner, c’est ne pas respecter une des règles du jeu. Les joueurs qui jouent sans être spécialement motiver pour offrir une bonne opposition et même l’emporter, je considère qu’ils jouent pas vraiment, et donc…ben disons que je leur propose ensuite des jeux d’ambiances sympas, mais pas plus.