débarque à petits pas
Je n'aime pas énormément Caylus non plus, surtout lors d'une première partie.
Comme cela a été précisé déjà, c'est un cas où typiquement, lors de votre première partie, cela peut extrêmement mal tourner pour vous. Quand je dis mal tourner je ne veux pas dire "on perd" ; je veux dire, pendant la première moitié de la partie, on fait quelque chose "d'original" (comme on ne connaît pas tout du déroulement de la suite). Puis comme les autres joueurs agissent de façon plus uniforme que nous, on devient vite la bête noire qui traîne derrière et qui ne comprend pas ce qui se passe et pourquoi les autres n'ont pas fait comme elle. Si au milieu de la partie on peut se rattraper avec quelques bonnes idées, pendant la première moitié, le jeu en est presque humiliant.
Ce n'est pas "parce qu'on perd", c'est parce qu'on ne participe pas au jeu.
Le petit exemple...
Je m'étais dit "ce serait une bonne idée de faire tourner commerce et achat de ressources avec les bâtiments construits par défaut" plutôt que d'aller chez les bâtiments des autres joueurs pour leur donner d'autres ressources. Seulement les autres joueurs n'en ont pas fait autant ; ils ont fait tourner les bâtiments de leurs ennemis, ce qui les a tous fait monter en ressources et Points de Victoire là où moi je restais derrière. Je continuais de leur demander : "mais à quoi bon grimper vous-même en ressources si à vous trois vous donnez autant à vos ennemis que vous essayez de distancer ?" mais le fait est que ces trois-là, bien que ne se distançant pas entre eux, prenaient 40 points de Victoire d'avance sur moi... avec la farandole des placements des ouvriers, je n'arrivais pas à construire une seule portion de Donjon non plus (oui pas une, sauf tout à la fin du jeu où j'ai tout juste fait un bout de muraille).
Heureusement en milieu de partie j'ai changé de stratégie et étant le premier à construire des bâtiments bleus (et de qualité) j'ai pu concurrencer les premiers et même en devancer certains.
Sans le retournement de situation donné à la fin de l'exemple - qui s'est heureusement bien goupillé - j'aurai subi le jeu toute la partie.
Toutefois, Caylus n'est pas le seul jeu qu'on peut subir accidentellement (pas tous mais souvent un ou deux joueurs dans la partie), lors d'une première partie. Puerto Rico n'est pas exempt de ces défauts non plus. Certains jeux de stratégie non plus ! Mais comme tous ces jeux de gestion complètement à l'allemande, la première partie on passe du temps à tout maîtriser et se fait avoir tout du long. D'ailleurs pour ma part Caylus reste un jeu purement à l'allemande, je ne crois pas faire de surprise en disant ça.
Comme de très nombreux jeux de cette école, l'interaction se fait par gêne indirecte. Il y a bien des interactions entre joueurs (plus que dans World of Warcraft en fait si on regarde bien ) mais elles se font en les gênant, en prévoyant leurs actions et les empêchant juste de les accomplir en posant nos ouvriers là où ça jouera contre eux et en notre faveur.
D'un autre côté, pendant une bonne partie du jeu, on se contente d'essayer de se faire grimper soi-même au plus vite ; certains joueurs ne se compliquent pas encore la tête avec la pose d'obstacles et essaient plutôt de se développer. Tant qu'on joue comme cela, la part d'interaction se trouve beaucoup réduite.
Jusqu'à ce qu'on essaie enfin de devancer notre adversaire aux derniers tours (et avant tout de même si on est prévoyant), la part d'interaction est trois fois moindre que dans ces derniers tours où tout se décidera selon les obstacles qu'on posera aux autres joueurs.
Voilà ce que je peux dire concernant l'interactivité, qui est pourtant à mon sens meilleure dans Caylus que dans Puerto Rico où la position sur la table des joueurs combinée à la spécialisation dans laquelle chacun s'oriente aura plus d'influence au final sur la gêne que des décisions instrinctives ou réfléchies, et dictera votre conduite (avec pas mal de calcul).
Pour appuyer une partie de ce que dit Piesstou, je ne comprends pas non plus l'engouement si édifiant des joueurs pour Caylus ; pour moi la poudre reste à inventer ; c'est sans doute un excellent jeu de gestion mais les jeux de gestion typiquement de ce genre me laissent souvent de marbre. J'ai hâte de découvrir un jeu de gestion qui me laisserait en proie à une telle passion ! D'un autre côté, au fil des parties mon appréciation de Caylus se bonifiera sans doute.
Quand on se penche vraiment sur le jeu, en décortiquant, on voit aussi que sous des mécanismes à l'apparence bien huilée il existe une marche à suivre énormément "meilleure" qu'une autre (je suppose que certains vétérans contesteront ce fait, mais c'est mathématique).
Un peu comme dans Puerto Rico où par contre - c'est quelque chose de très différent - la farandole des mécanismes implique des effets de bord extrêmement curieux (selon que vous soyez 5 joueurs à table et la position de la table où vous êtes et où se trouve par exemple le joueur qui voudra toujours jouer le Marchand ; s'il est à votre gauche par exemple, vous ne pourrez jamais le gêner et il vous empêchera toujours de placer des choses au Marchand ; le seul joueur à pouvoir bloquer le Marchand étant celui jouant à la gauche de celui-ci, et seulement un tour sur 5 ; mais bien évidemment, comme il est celui le moins gêné par le joueur spécialisé Marchand qui se trouve à sa droite, quel intérêt pour lui de le gêner ! C'est un mécanisme générant l'impuissance totale contre ceux nous gênant pourtant le plus, et ce uniquement à cause de nos positions sur la table...)...
Pour moi Puerto Rico comportait "des bugs" avec ces effets de bord impensables, dès la fin de la première partie je l'avais ressenti - à tort me direz-vous peut-être, mais le raisonnement se tient pour moi et c'est tout aussi mathématique.
Toutefois Caylus me semble plus équilibré et mieux agencé que Puerto Rico.
Donc mon bilan final :
- Je suis étonné encore que des joueurs puissent adorer Puerto Rico et ne pas aimer Caylus ; pourtant ça semble arriver. Leurs différences ont néanmoins été discutées dans d'autres sujets.
- Caylus est pour moi un jeu meilleur et avec une meilleure unité que Puerto Rico. Mais ces deux jeux de gestion manquent encore d'unité pour que je les apprécie pleinement. Un jeu viendra bien un jour avec l'unité que je recherche.
- Je regrette le phénomène de la première partie que l'on peut parfois "subir" sur une part de leur durée, dans les jeux de gestion. C'est typique aussi des jeux avec ces points de Victoire cumulés de tour à tour, où parfois certains joueurs sont largués et hors jeu avant même le dernier tour, et où le phénomène d'agir par "gêne indirecte" peut faire que par une action volontaire, un joueur largué au score peut décider par son action du vainqueur parmi ses adversaires, parfois même un tour à l'avance. C'est l'effet "Kingmaker" décrié comme à éviter dans les jeux.
- Une chose très importante à réaliser est que dans ces jeux la seconde partie s'avère extrêmement meilleure que la première, pour peu que l'on ait appris à maîtriser ses mécanismes. Ma seconde partie de Caylus s'avérera sans doute beaucoup plus intéressante !
Je t'encourage Piesstou à également bien prendre les avis des autres qui ont posé précédemment ici, généralement ils sont restés très polis et ont fourni de bonnes explications.
Et aussi, mon appréciation de Caylus irait à environ 3 / 5, tout de même.