PORT ROYAL : y a des marins qui jouent

[PORT ROYAL]

PORT ROYAL : y a des marins qui jouent

Avant d’aller installer leurs locaux dans les Caraïbes, suite au casse du siècle qu’ils ont réalisé en remportant les 2 plus prestigieux prix ludiques en 2014, Pegasus Spiele avait un peu anticipé l’affaire en proposant en début d’année un titre ayant pour cadre la Jamaïque du XVIIe siècle.
Une vision de la Jamaïque tout de même plus germanique que Rastafari - Babylone - System - Rastafari - Zion - Babylone.
Afin de dissiper toute ambigüité ou même toute ambiguïté, il semble opportun de préciser que Port Royal n’a rien à voir avec Port Royal.
En effet, Port Royal est un jeu de carte sur le thème des pirates, tandis que Port Royal est un jeu sur les pirates, dans lequel on trouve des cartes.

Devinant une légère inflexion des sourcils chez certains lecteurs, je m’empresse d’apporter quelques éclaircissements :
En 2000 paraît chez Queen Games un jeu de Wolfgang Panning intitulé Port Royal, qui aura le mérite de figurer dans la liste des recommandations du jury du Spiel des Jahres 2000.

En 2013, Alexander Pfister remporte le Spieleautoren-Wettbewerbs, prix prestigieux décerné par l’Académie du Jeu de Vienne dont j’ignorai l’existence il y a encore 8 minutes, avec Händler der Karibik, par la suite édité par Österreichisches Spiele Museum.

En 2014, Pegasus Spiele (POUÊT le Spiel, POUÊT le Kenner) adapte Händler der Karibik, et l’intitule Port Royal, soit parce qu’ils se sont affranchis de toute recherche d’antériorité, soit parce qu’ils ont décidé de venir foutre la grouille dans la base de données de TricTrac. Toujours est-il que les 2 jeux de Queen Games et de Pegasus Spiele (POUÊT le Spiel, POUÊT le Kenner) n’ont en commun que leur nom.

Port Royal, de Pegasus Spiele (POUÊT le Spiel, POUÊT le Kenner), est donc un jeu de carte de Alexander Pfister, illustré par Klemens Franz (qui avait illustré la version “Händler der Karibik” et qui a un style… ma foi assez différent de Monsieur Dutrait, ou de Monsieur Naïade ou de Monsieur Colette et plus proche de celui de ma nièce de 12 ans), pour 2 à 5 joueurs de 8 ans et plus, qui propose des parties de 20 à 50 minutes (en fait, 10 minutes par joueur), disponible à l’heure actuelle uniquement en version germano-anglaise, voire anglo-germanique, qui n’a pas eu les honneurs d’une nomination sur la liste des jeux conseillés par le jury du Spiel des Jahres 2014 alors qu’il s’agit pourtant d’un jeu Pegasus Spiele (POUÊT le Spiel, POUÊT le Kenner), et dans lequel la carte Gouverneur est quand même vachement forte.

Il s’agit d’un petit jeu de gestion mettant en œuvre le principe toujours efficace de stop ou double ou quitte ou encore ou press your luck.

L’objectif est d’être le premier à obtenir 12 points, soit en recrutant des cartes Personnage (dont les gouverneurs, qui sont bigrement forts), soit en réalisant des expéditions.

Port Royal se compose exclusivement de 120 cartes proposant des illustrations que l’on qualifiera poliment de fonctionnelles (ouh la oui… je n’aime pas dire du mal des illustrations, mais là c’est quand même très fonctionnel).


Ces cartes sont de 4 types :
- des bateaux, de 5 couleurs différentes, caractérisés par un butin en pièce d’or, et une valeur de défense (nombre de symbole Épées),


- des personnages, notamment des gouverneurs, qui sont quand même vachement forts,

- des expéditions, qui rapportent des points,

- des taxes, qui obligent les joueurs à réduire leur trésorerie.


Au verso de chacune des cartes figure une pièce d’or. Chaque carte peut donc servir de monnaie, en plus de son effet indiqué au recto.

Ce jeu a la particularité de proposer l’un des set-up les plus rapides de l’Histoire :

1. placer le deck complet face “pièce d’or” visible au centre de la table.


2. et bien euh… non, y a pas d’étape 2, vous pouvez dès maintenant essayer de croiser les bras comme Benoît Assou-Ekotto, élu champion du monde de croisement de bras lors de la coupe du monde de football 2014.


C’est prêt.

On peut commencer.

Le tour d’un joueur débute par un “remplissage” du port : il pioche des cartes et place les bateaux ainsi que les personnages en ligne face visible, et s’arrête QUAND il le souhaite.
MAIS ATTENTION !!! Si jamais 2 bateaux de même couleur sont révélés, les cartes du port sont défaussées et le tour du joueur est terminé… “in the ass, the little broomstick” comme disaient les pirates Jamaïcains.


N’ayant pas véritablement trouvé d’explication thématique pertinente à ce point de règle essentiel dans le déroulement du jeu, je vous propose à présent de regarder une poule.

ceci est une poule

Notez qu’il est possible d’éliminer certains bateaux, grâce aux cartes Marin ou Pirate présentant des symboles Épée. Si le joueur dispose parmi ses cartes d’un nombre de symboles Épée supérieur ou égal au nombre de symboles Épée présents sur le bateau, il peut le défausser, ce qui permet ainsi d’échapper au douloureux supplice du little broomstick (par ailleurs non fourni dans la boîte).

un marin (3 pièces; 1 point; 1 Épée)

et un pirate (5 pièces; 1 point; 2 Épées)

Lorsque le joueur a été raisonnable et a échappé au little broomstick, il peut ensuite choisir une carte du port :
- s’il s’agit d’un bateau, il le défausse et pioche autant de “pièce d’or” que la valeur du bateau,
- s’il s’agit d’un personnage (par exemple un gouverneur… très fort le gouverneur), il le recrute en payant autant de “pièces d’or” que la valeur du personnage.

Le joueur actif a la possibilité de choisir une deuxième carte, s’il a réussi au préalable à révéler des bateaux de 4 couleurs différentes dans le port, voire même une troisième carte si les 5 couleurs sont présentes… muchos cojones => muchos cartos.

Les autres joueurs peuvent, s’ils le souhaitent, choisir une carte parmi celles encore disponibles dans le port, mais doivent payer une pièce au joueur actif.

Puis, les cartes du port sont défaussées, et c’est au tour du joueur suivant.

Lors du “remplissage” du port, il arrive parfois que l’on révèle une carte Taxe. Celle-ci impose à tous les joueurs disposant au moins de 12 pièces d’or de réduire leur butin de moitié (“an average broomstick”, comme disaient les pirates Jamaïcains). Il est donc dangereux de thésauriser plus que nécessaire.

Lorsqu’une carte Expédition est révélée, elle est mise de coté (hors du port) et devient disponible jusqu’à ce qu’un joueur s’en empare.

Pour cela, il faudra défausser des cartes Personnage présentant les mêmes symboles que sur la carte Expédition (ancre, maison, crucifix).

un colon, un capitaine et un prêtre

La carte Expédition apporte points et pièce d’or ainsi que santé, joie et félicité, mais quand même surtout des points et des pièces d’or. et pas de little broomstick. non. sauf à ses adversaires. un peu. enfin, dans une certaine mesure.

C’est à peu près tout pour la mécanique, ce sont ensuite les effets des personnages recrutés qui vont venir assaisonner les tours de jeu :
- les marins et les pirates permettent de lutter contre les bateaux,
- les colons, prêtres et capitaines apportent les symboles nécessaires pour compléter des expéditions,
- les marchands, amiraux et bouffons font gagner de l’or,
- les demoiselles sont utiles pour recruter moins cher,
- les gouverneurs super forts (“fucking basterds”, comme disaient les pirates Jamaïcains), qui offre l’avantage de choisir UNE carte supplémentaire à chaque tour. un poil gros bill quand même.

Je pourrais très bien vous expliquer que Port Royal de Pegasus Spiele (POUÊT le Spiel, POUÊT le Kenner) est sympathique et convaincant et mêle habilement une part de gestion très simplifiée avec un aspect de prise de risque enthousiasmant, au cours duquel le joueur est tiraillé entre le souhait de vouloir piocher plus pour gagner plus et le fait de ne pas laisser trop d’opportunité à ses adversaires, en étant toujours menacé de devoir passer son tour pour avoir été trop gourmand, mais où donc se cache la touche “point” sur ce foutu clavier afin que je mette un terme à cette phrase beaucoup trop longue, ah te voilà gredin, viens donc ici que je te tapote dessus.

Je préfère cependant laisser la parole à ma nièce de 12 ans, dont le style graphique s’approche étonnamment de celui de Klemens Franz :


Port Royal de Pegasus Spiele (POUÊT le Spiel, POUÊT le Kenner) est sympathique et convaincant, mais les gouverneurs sont quand même super forts.

Ma nièce de 12 ans


Port Royal
Un jeu de Alexander Pfister
Illustré par Klemens Franz
Publié par Pegasus Spiele
2 à 5 joueurs
A partir de 8 ans
Langue des règles: Allemande, Anglaise
Durée: 25 minutes
Prix: 9,90 €


6 « J'aime »

Merci pour cette explication, qui donne envie d'essayer le jeu rien que pour lancer un championnat du monde de croisement de bras autour de la table.

Et pour la poule, j'ai beaucoup ri, et j'en ai même pas honte!

vivement le prochain article!

Présentation toujours super sympathique et drôle.

Et, je confirme, excellent jeu !

La mise en place est beaucoup plus compliquée qu'annoncée : en plus de la phase 1 parfaitement décrite, il faut distribuer 3 cartes côté "pièces" à chacun : pas loin de 15 secondes à 5 joueurs !!!

Et puis certes le gouverneur est très fort, mais il coûte très cher et ne rapporte aucun point de victoire direct : il faut être sûr de pouvoir le rentabiliser...

Merci pour l'article, Port royal étant, au-delà, de ses qualités ludiques, un excellent jeu pour le voyage : que des cartes, mise en place rapide, pas besoin de beaucoup de place pour jouer, pour un prix ridiculement ridicule...

Excellent :)

Le jeu à l'air sympa, existe t-il une traduction française des règles svp ?

+1

Un bon jeu pour un prix modique.

Mangez-en !

Comme je l'ai si bien écrit sur le Forum :

Pour ceux que ça intéresse, j'avais traduit les règles de la version originelle "Händler der Karibik". Je l'avais mis en ligne sur BGG suite à un échange avec l'illustrateur. Quand Pegasus Spiele est entré dans la danse, Franz Klemens m'a demandé de retirer la traduction pour deux raisons :
1. Pegasus Spiele veut garder le contrôle pour avoir toute la main en cas de partenariat avec un distributeur étranger (français en l'occurrence).
2. Pegasus Spiele a légèrement fait évoluer les règles pour notamment proposer le jeu dans une version pour 2 à 5 joueurs (contre 2 à 4 joueurs à l'origine).

Je ne me suis pas penché sur les nouvelles règles, mais s'il y a des amateurs des règles originelles, un petit MP avec une adresse de messagerie et je l'envoie fissa.

1 « J'aime »

éclairage intéressant sur ce jeu, qui semble le mériter !

Bon, pas facile de lire M. Seito à 2h30 du matin : d'habitude j'attends d'avoir toutes mes capacités :)

Et merci pour le croisement de bras d'Assou-Ekotto, qui est clairement hors norme, stratosphériquement au dessus des autres. J'ai bien ri !

Un très bon jeu... un peu déséquilibré car certains pouvoirs ne semblent pas être intéressant au vue de la rapidité des parties... il manque encore un petit rodage pour en faire un SUBLIME jeu... je vous dit cela après une vingtaine de parties.

Néanmoins, vous pouvez y aller car c'est sympa, rapide (15 minutes) et cela plait à tout le monde...

@Le bretteur moi j'aimerais beaucoup que tu m'envois tes règles françaises. Merci d'avance.