Illustrer n'est pas jouer... quoique ?!?

Par Monsieur Guillaume

Publié le 19 mars 2015 • Lecture 5 min. •  7323 vues

Illustrer n'est pas jouer... quoique ?!?

Introduction à la page Blanche

C'est un fait, le travail des illustrateurs/trices est de plus en plus important dans notre "petit" monde ludique. Ce peut être même un casse-tête lorsque le parti pris graphique d'une édition est remis en cause pour une ré-édition. Il y a toujours des joueurs pour préférer les illustrations originales, d'autres pour trouver que la nouvelle version est bien plus jolie... C'est particulièrement présent sur les derniers petits jeux comme Love Letter ou Love Letter, Braverats et R ou Welcome to the Dungeon et Dungeon of Mandom !

Autre élément probant, on trouve sur certaines boites, à côté de celles de l'auteur, la photo et une petite biographie des illustrateurs. Hans Im Glück est assez constant dans cette participation à la reconnaissance du travail des illustrateurs. Ce pourrait être le cas pour le futur New York 1901 illustré par Vincent Dutrait chez Blue Orange dont le travail s'étale ici devant nos yeux.

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Ce qu'on trouve à l'intérieur de Carcassonne - Mer du Sud (Hans Im Gluck / Filosofia)

Autre jeu, autre preuve si besoin des lettres de noblesse gagnées par les illustrateurs, certaines illustrations sont tellement époustouflantes qu'elles en deviennent un artbook. C'est le cas pour Abyss où le travail de Xavier Collette est sublimé par des nouvelles écrites à partir des illustrations.

Bien sûr, ceci ne résout pas tout : l'illustration d'un jeu est un travail de commande, plus ou moins dirigé par la maison d'édition qui l'a demandé. De fait, l'illustrateur/trice est-il(elle) parti prenante du succès d'un jeu ? Ce travail doit-il faire envisager des droits d'auteurs, à l'égal de l'auteur du jeu lui-même ? l'exemple est peut-être facile, mais Dixit aurait-il été complètement Dixit sans les talentueuses illustrations de Marie Cardouat en premier lieu ? Bref, il reste des discussions peut-être sans fin, des prises de positions tellement dépendantes d'un point de vue, des argumentations à n'en plus finir et là n'est pas le sens de ce petit texte.

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Car, quoiqu'il en soit, pour apprécier tout cela, il y a nous, les joueurs de tout bord, le "public"... parce qu'une illustration est faite pour être regardée, appréciée... et pour ça, il y a également des festivals, des évènementiels qui s'organisent et laissent une place importante à ce travail d'illustration et qui oeuvrent à cette mise en avant.

Dernièrement viennent d'arriver les sélections pour deux d'entre eux, et il est intéressant de voir également deux façon d'envisager les choses et de comparer les listes !

Le Prix Ludia 2015

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Le prix Ludia est coordonné par le Centre National du Jeu, le Musée Français de la Carte à jouer et les Espaces Ludiques d'Issy les Moulineaux... ce qui n'est pas rien tout de même.

Dix jeux ont été sélectionnés et deux instances de décisions sont mises en place (jury et vote du public) autour de trois critères :

- L’exécution de l’illustration de la boîte ;

- La mise en scène, la composition de la couverture, le lien entre la maquette, le graphisme et l’illustration ;

- La cohérence entre l’illustration d’une part et d’autre part le contenu : les aspects

ludiques, mécaniques et matériels du jeu.

Alors ça peut paraître très "intellectualisant" comme ça, mais ça permet de voir aussi les choses sous un nouvel angle... et puis rien n'empêche de voter en disant juste : "moi, j'préfère celle-là, elle est plus belle !"

Default- Abyss - Xavier Collette / Bombyx

- BugsBeatrix Bohony / Marbushka

- Le Lièvre et la Tortue - Mathieu Leyssenne / Purple Brain

- Lords of Xidit - Naïade et Stéphane Gantiez / Libellud

- Minivilles - Noboru Hotta et Mirko Suzuki / Moonster Games

- La Nuit du Grand poulpe - Jean-Baptiste « Djib » Reynaud / Superlude

- Onirim - Elise Plessis / Filosofia

- Splendor - Pascal Quidault / Space Cowboys

-Tombalo - Gwen Keraval et Véronique Bulteau / Djeco

- Winter Tales - Jocularis et Andrea « Hide Art » Olgiati / Edge

Il y a forcément du beau, il y en a pour tout les goûts et pour tout le monde ou presque.

Le "Coup de Coeur du public" sera remis à l'issue du vote de tout un chacun sur Facebook pendant le festival d'Issy les Moulineaux

► c'est ici pour voter sur le bouc

Le Jury composé de Françoise NIAY, artiste plasticienne, ancienne de la Biennale d'Art contemporain d'Issy ; Lucia CALFAPIETRA, illustratrice de Littérature jeunesse ; Christophe BATAILLON, illustrateur Presse jeunesse ; Stéphane BACHELET, directeur artistique de Just Dance édité chez Ubisoft ; Frédéric WOIRGARD, journaliste freelance et ancien rédacteur-en chef-adjoint de Card Player France ; Christophe PROVOT, Maire-adjoint à la Culture pour la Ville d'Issy les Moulineaux remettra son prix le samedi 11 avril à 18h30 au Musée de la Carte à jouer.

Un jury de professionnels de la partie, en grande majorité... joueurs peut-être pas, mais c'est le double effet kisscool de pouvoir aussi montrer la vitalité et le dynamisme du secteur ludique à d'autres, non ?

L'année dernière, Steam Park de Marie Cardouat avait remporté le prix du jury et Origin de Nephyla gagnait le coup de coeur du jury. Qu'en sera-t-il cette année ?

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Affiche réalisée par Marie Cardouat, dernière lauréate

Grand prix des Z'illus

Finist'aire de jeu 2015

Pour sa quatrième édition, le festival Finist'aire de jeu se tiendra le 18 et 19 avril 2015, soit juste une semaine après le festival précédent.

Pendant ce festival, les jeux sélectionnés par les membres de l'association organisatrice sont présentés et joués par les "visi-joueurs". Ils peuvent ensuite, sur place et à bulletin secret à raison d'un vote par personne, élire celui qui remporte le Grand prix des Z'illus.

Le jeu Takenoko et son trio Nicolas Fructus/Joël Picksel/Yuio l'avait emporté en 2012, suivi en 2013 de Naïade pour Tokaido et enfin Vincent Dutrait l'année dernière pour Lewis & Clark.

Le successeur sera parmi les jeux suivants :

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Bon, là, forcément, il y a 20 sélectionnées... ça donne de suite un peu plus le tournis mais il faut avouer que ça donne plus de latitude pour se faire plaisir. Et puis, remarquons tout de même que 4 jeux sont en communs avec Abyss, La Nuit du Grand Poulpe, Le Lièvre et la Tortue et Lords of Xidit. La sélection semble également un peu plus "joueurs", même si l'effet "masse" doit jouer. De plus, Matagot place deux jeu, ainsi que Purple Brain, Bombyx et Iello monte même jusqu'à trois jeux.

Et puis, est-ce que des jeux comme Hyberborea ou Un Monde Oublié peuvent gagner lorsqu'on connait la durée d'une partie comparée à celle de jeu comme Héros à Louer ou Mange-moi si tu peux ? c'est vrai, comme c'est plus vite joué, on peut plus vite voter. Et puis après tout pourquoi pas ? ne pas y avoir jouer n'empêche pas un jeu d'être trouver magnifiquement illustré, n'est-ce pas ?

Pour avoir toute les informations sur Finist'aire de jeux, cliquez ici

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Illustration réalisée par Vincent Dutrait, dernier lauréat


Monsieur Guillaume

Commentaires (22)

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azds
azds

L'illustrateur bénéficie d'un droit d'auteur sur son oeuvre, contrairement au créateur du jeu puisque le jeu lui-même, au sens abstrait (mécanismes etc....) n'est pas considéré comme une oeuvre (sauf à l'extrême limite le texte littéral des règles - et encore- mais de toutes façons, les règles, dans leur rédaction, sont en général le fruit d'un travail collectif de l'auteur et de l'éditeur).

Après tout dépend du contrat passé entre l'éditeur et l'illustrateur.

En général, le contrat prévoit que l'illustrateur cède à l'éditeur l'usage de son oeuvre, éventuellement pour un temps / un tirage / une zone géographique déterminés, contre une somme forfaitaire, du coup la rémunération de l'illustrateur ne dépend pas des ventes.

rammillica
rammillica

Eine Frage (une question), qu'en est-il en Allemagne (où il y a aussi un réservoir d'illustrateurs assez connus : Michael Menzel, Doris Matthaüs, Harald Lieske....) ? Les illustrateurs touchent-il des droits d'auteurs ou sont-il rémunérés à la pige, sans intéressement sur le jeu quel que soit le nombre de ventes ?

De plus, n'existe t'il pas des clauses du style : si tant de jeux sont vendus, vous obtenez une prime de tant d'euros (plutôt qu'un intérêt fixe sur chaque jeu). En effet, certains jeux à très petit tirage ne peuvent pas résolument se permettre de rémunérer plus l'illustrateur (ou le graphiste) alors que pour les blockbusters, celà me semble quelque chose d'envisageable, non ?

Matthieu.CIP
Matthieu.CIP

Ce que j'apprécie en tous les cas c'est que depuis quelques années la majorité des illustrateurs ont bien compris que l'illustration devait être au service de la mécanique du jeu et pas l'inverse.

pierolalune
pierolalune

Allons allons... Tom... ne remettons pas ça sur le tapis... C'est un peu attaquer le physique... Moi, je dis qu'ils ont quelque chose à compenser... Mais on ne peut pas juger... :)

Pikaraph
Pikaraph

Pour Abyss, on peut également ajouter que le fait de sortir un artbook n'est pas négligeable dans la portée qu'ont eu les illustrations. Abyss aurait été tout autre sans ces illustrations.

pierolalune
pierolalune

Le "vedettariat" du milieu (quel qu'il soit) est il un problème tant que ça n'est pas une finalité ?

Le fait d'avoir des "ambassadeurs" de notre milieu est une bonne chose il me semble. Que cela soit toi (Mops), Phal, Bruno Cathala, Roberto, Croc ou Cyril ou encore des illustrateurs... On a des personnalités qui ont une place auprès des gens qui dépasse un peu leur fonction première et c'est pas un "mal".

L'idée de faire ce métier pour en être une "vedette" ou une "personnalité" du milieu, ça serait bien con... Mais je trouve que ça permet d'incarner un peu mieux un milieu.

Tom Vuarchex
Tom Vuarchex

@pierolalune & Mops

Bah oui,
... D'autant que c'est qui qui était sur les murs du palais à Cannes en 10 mètres de haut ... hmmm ? ^^

Erwan
Erwan

Moi je trouve très dommage de dire qu'un des critère pour le prix Ludia est la couverture et de choisir en image pour Abyss un poster qui n'est pas la couverture sur laquelle nous avions justement fait un travail particulier. C'est à n'y rien comprendre...

pierolalune
pierolalune

Hahaha... Tout à fait d'accord ! Les coloristes... Quel triste métier.. Mais peut on appeler ça vraiment un métier ?

... Pour le coup, c'est pire que ce que tu imagines... On m'appelle pas le coloriste.. Mais le colorieur :)

Tom Vuarchex
Tom Vuarchex

Oui, je suis d'accord avec le gribouilleux ;)
"Imaginons qu'auteur et illustrateur partagent les mêmes statuts. Cela implique qu'on ne plus désormais rééditer un jeu en changeant les illustrations. Cela serait un vrai souci." (dixit Mops)
Oui ... par exemple, ma version de Skull n'aurait jamais vu le jour.
Dans 95% des cas, l'illustrateur/graphiste est là pour "sublimer" le jeu, pas pour le créer. De ce point de vue, le parallèle BD scénariste/dessinateur ne me semble pas pertinent car, dans ce cas, il s'agit d'un élaboration réellement conjointe. Ce qui n'est pas le cas dans le JdS où l'illustrateur à plutôt affaire avec l'éditeur qu'avec l'auteur.
A la rigueur on peut comparer l'illustrateur d'un jeu à un coloriste en BD ... encore que les coloristes soient vraiment au bas de l'échelle :-p *
*Don't shoot ... private joke

pierolalune
pierolalune

Hello,

Déjà, merci Guillaume pour ce chouette article et merci aux deux festivals pour tout ce qu'ils font pour nous.

Le débat sur les notions "d'auteur" pour l'illustrateur me semble compliqué et Mops en parle très justement. Que les illustrateurs touchent un pourcentage sur les ventes en "intéressement", ça me semble logique et je milite pour ça depuis des années. Effectivement, les illustrations jouent un rôle important dans l'édition d'un jeu (de sa création à sa vente). Mais je fais partie de ceux qui pensent que l'illustrateur n'est pas auteur. Si un éditeur me fait illustrer un jeu pour le marché français mais qu'il estime que pour le marché américain ou allemand, il en préfère un autre. J'estime que c'est lui qui connait son marché et c'est son taff. Si j'avais mon mot à dire, intuitivement, je m'y opposerai mais je pense pas que ça serait une bonne chose.

Le quantifier à égalité avec l'auteur... Bah, à part pour le cas Dixit qui est effectivement particulier, je ne pense pas que cela soit que cela se justifie.

Si on doit comparer avec la BD, ce qui se fait communément, aujourd'hui, un dessinateur est à 50 % avec le scénariste dans la majorité des cas mais je trouve ça normal dans un sens comme dans l'autre. Oui, des fois, on achète une BD parce qu'elle est jolie... Mais on ne l'aimera vraiment que si le scénario nous plait vraiment.

Un jeu, c'est pareil. Un jeu qui ne serait que beau n'a que peu d'intérêt car on lui demande de nous apporter des sensations que seule la beauté ne peut fournir.

Quand à la notoriété grandissante des illustrateurs, on ne s'en rend compte vraiment que sur les festivals et les salons... Mais elle parait "normale" car d'abord, il faut reconnaitre qu'il y a avant tout des physiques incroyables... Ensuite, soyons clairs, on est vachement plus sympas... C'est évident... Et surtout, et pour être sérieux, le fait de dédicacer en faisant un petit dessin... Ben ça claque forcément plus et comme on y passe plus de temps, il y a souvent un petit échange qui se crée pendant la dédicace.

Mais bon, c'est surtout une histoire de Physique...

... J'ouvre le débat entre illustrateur et graphiste ? :p