Critique de Pioneers

[Pioneers]

Toujours présent sur les étals, parfois de manière discrète, le thème du Far West continue de faire rêver et vendre. Moi-même je ne suis pas insensible aux charmes de ces grandes plaines sauvages d’Amérique. Je suis donc toujours curieux de découvrir un jeu qui propose de se plonger dans ce thème. Si c’est aussi votre cas, je vous invite à me suivre dans cette critique.

Une diligence ce n’est pas un chariot

Le but est simple, obtenir le plus de points en fin de partie en acquérant puis en vidant ses diligences au cours de la partie, tout en reliant les diverses villes sur le plateau. La première phase de votre tour sera de récupérer votre revenu, qui sera de 3 pièces de base et qui pourra augmenter jusqu’à 5. Ensuite vous pourrez faire un achat, vous pourrez faire cette action jusqu’à 3 fois, si vous embauchez par la suite des marchandes, mais sans pouvoir effectuer 2 fois le même achat. Parmi ces achats vous retrouverez la pose d’une voie à votre couleur sur une ligne libre du plateau, entre deux villes pour 2$, l’achat de 2 lignes pour 5$ et enfin l’achat d’une diligence dont le prix variera selon son ordre dans la file, allant du moins cher au plus cher. Une fois acquise vous poserez dessus vos pionniers, qui possèdent tous un pouvoir différent. Enfin, vous terminerez votre tour en déplaçant la diligence commune qui se trouve sur forme de pion en bois sur le plateau, jusqu’à une ville possédant encore une tuile. En payant 1$ par voie ne vous appartenant pas. Dans ce cas vous prenez le personnage en question, que vous posez sur le plateau après avoir retiré la tuile et utilisé le pouvoir en question. Le banquier et la marchande viendront s’ajouter à votre plateau, tandis que le sergent, le barman, le chercheur d’or et le fermier vous permettront d’interagir sur le plateau ou sur vos chariots, de même pour l’hôtel qui est une sorte de joker. Il sera alors possible dans le sens du tour, pour l’un des autres joueurs, de déposer contre 2$ un même personnage, mais sans bénéficier de son pouvoir. Dès qu’un autre joueur a posé son pion plus aucun autre joueur ne pourra le faire, on passe alors au tour du joueur suivant. La partie se poursuivant ainsi jusqu’à que l’un des joueurs ai vidé sa réserve de route ou si la réserve de chariots est vide. On compte alors ses points, les emplacements vides dans ses chariots, ses pépites d’or, et enfin la ligne la plus longue de son réseau relié par ses pionniers, où chaque personnage rapporte 2 points. Le joueur avec le plus de points l’emporte, en cas d’égalité les pièces départageront les joueurs.

Où sont les calages et les sachets

Je me souviens de ces jeux Queen Games où il y avait des sachets à foison (Kingdom Builder) ou des calages en carton bien fichu (Fresco), là, rien, nada. Autant dire que ça fait bizarre de se retrouver avec le vide et le noir du fond de la boite une fois celle-ci ouverte. Pourtant, il y en a des pièces, des jetons, des pions en bois, des targettes, le jeu n’est pas radin sur ce point. Mais une fois la partie terminée, vous serez obligé de vous contenter des deux sachets de base, ou bien d’ajouter les vôtres. Pas cool. Autre point que je n’ai pas très bien compris, le jeu propose des illustrations classiques, assez passe-partout, mais pas laides. Mais le couvercle de la boite nous affiche une scène de rue assez pauvre, sans véritable ambiance et pas vraiment fine, alors que sur le plateau en haut à droite on retrouve une belle illustration sépia, d’une diligence qui aurait été bien plus belle. Drôle de choix. Du coup en terme d’édition le jeu s’en sort plutôt bien, rien ne cloche vraiment avec les nombreux rappels sur les plateaux, les pièces de bonne qualité, mais elle pêche sur l’absence de sachets et des choix graphiques pas toujours bienvenus. C’est vraiment dommage, même si au fond ça ne change rien à l’expérience de jeu en elle-même.

Un voyage tranquille

Si les possibilités sont assez nombreuses, tout comme les pouvoirs des personnages, il sera assez facile de le comprendre et de le prendre en main. Sa passable complexité venant au fur et à mesure que l’on prend en main sa partie. À chaque tour le joueur n’aura que peu de choses à faire, seuls les choix à prendre pourront être un peu plus long, mais rien de bien méchant, sauf à 4. On joue, on s’adapte et l’on tente de faire le meilleur réseau possible. Voilà en gros comment se résume une partie, sans que cela ne soit dénué d’intérêt. Il faudra gérer tous les fronts et ne pas négliger votre réseau sous peine de perdre pas mal de points en fin de partie. Ce qui empêchera d’ailleurs le jeu d’avoir une durée de vie trop faible, avec des combinaisons gagnantes évidentes, même si on ne va pas se mentir, le réseau est très important. Le hasard de la pose des pionniers en début de partie ajoute de la durée de vie, car ils seront centraux dans chaque partie. Le jeu passe très bien, offre assez de choix pour être intéressant et les interactions entre son plateau personnel et le commun permet de ne pas avoir l’impression de jouer chacun dans son coin, ce qui est bien appréciable. Surtout qu’il est possible d’avoir des interactions monétaires entre joueurs et de poser des doubles voies avec le sergent.

La configuration à 2 joueurs sera plus tendue au niveau du score, mais elle sera moins difficile à gérer au niveau du réseau contrairement à la configuration à 4 joueurs. Celle à 3 joueurs est à mes yeux la plus appréciable, avec ce qu’il faut d’équilibre. Les 8 ans indiqués sur la boite me semblent par contre un peu juste, surtout si l’enfant n’est pas un habitué à ce type de jeu, je partirais plus sur 10 ans, pour bien comprendre les subtilités. Enfin, les 60 minutes annoncées peuvent être revues à la baisse sur les parties à 2 joueurs. Le thème n’est pas très présent, même s’il s’adapte bien au genre, mais on se demande où sont passées les attaques de diligences dans un lieu aussi hostile et dangereux ? Pas de bandits ou même d’Indiens à l’horizon. Au niveau du public je le conseillerais tout de même à des joueurs qui ont déjà pratiqué les jeux de société moderne, il fera par exemple un bon Gateway, où une jolie passerelle thématique après un Aventuriers du rail, pour découvrir d’autres mécaniques.

Il faut de tout pour faire une ville

Pioneers est un jeu simple, les actions sont logiques et se suivent bien. Pourtant, il n’est pas dénué d’intérêt loin de là. Il y a de la tension, du calcul, de la tactique, et de la profondeur. C’est un jeu accessible qui sera parfait pour initier au genre, tout en démontrant que les jeux peuvent s’avérer plus complexes qu’il n’y parait au premier abord. Selon que vous y jouiez à 2, à 3 ou 4 il sera plus ou moins facile, de même que la durée de vie sera aussi dépendante de ce critère. Mais les parties sont assez courtes et intéressantes pour y revenir sans mal. Une sympathique surprise, auquel je ne m’attendais pas, un peu cachée par la sortie du dernier Stefan Feld : Merlin, qui pourrait bien vous intéresser si vous recherchez un jeu de gestion simple à prendre en main, mais qui reste malin et intéressant malgré tout.

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