Critique de Picassimo

Dessiner, voici bien une activité quasi innée que nous avons tous pratiquée au moins une fois depuis notre plus tendre enfance. Bien entendu il serait aisé de dire que nous el faisons tous avec plus ou moins de talent. Mais même ainsi nous avons tous la capacité de dessiner. Et c’est autour de cette capacité primaire qu’Haba nous propose son nouveau titre : Picassimo. Une mécanique connue et déjà maintes fois utilisée à travers divers titres, le tout sous couvert d’un clin d’œil à l’un des artistes les plus connus au monde : Picasso. De l’art et des jeux de société, je ne pouvais clairement pas passer à côté.

Le mouvement Cubiste

Avant de vous parler du jeu en lui-même, je me suis dit qu’une petite digression vers l’histoire de l’art ne pouvait faire de mal à personne. Ce mouvement à vu le jour au début du XXe siècle, en 1908 devant le tableau Maisons à Estaque de Georges Braque, Henri Matisse le qualifiera de cubiste. Terme qui restera alors pour désigner les tableaux de ce mouvement, même si le terme mettra plusieurs années avant d’être utilisé officiellement. Même si Braque et Picasso sont souvent associés au mouvement, d’autres artistes proposeront également des œuvres inspirées des codes énoncés par ce style, qui se définit par le fait de représenter des objets ou des personnes en les décomposant par formes géométriques. Comme si on prenant un dé par exemple, qu’on le dépliait afin d’en représenter toutes les faces en une seule fois. Mais dès à présent, revenons à notre jeu.

Chaque joueur s’empare de son matériel et reçoit une carte avec des mots. Il existe 3 niveaux de difficulté. Il faudra donc se mettre d’accord sur le niveau avec lequel jouer (et pourquoi pas les mélanger avec les enfants pour rééquilibrer les chances). Il est temps de dessiner, le premier à terminer son œuvre crie « stop ! ». L’étape du dessin s’arrête après que l’avant-dernier ai dit Stop, le dernier n’a alors plus que 3 secondes pour finir. À plus de joueurs (5 et 6) cela s’arrête lorsqu’il ne reste plus que de joueurs en train de dessiner. On dévoile alors la carte du dessus du paquet qui va déterminer quelles tuiles devront être interverties entre elles. Puis chaque joueur un par un va présenter son œuvre et tenter de la faire deviner. Si la proposition faite par l’un des joueurs, sauf el dessinateur bien entendu, est bonne, celui qui l’a faite et l’artiste obtiennent 3 points, sinon on continue de chercher. Si jamais personne ne trouve, le dessinateur remet les tuiles en place, et la phase de recherche reprend, mais cette fois-ci ça ne sera qu’un point qui sera gagné. Le jeu prend fin lorsque la dernière carte échange est tirée. On réalise cette dernière manche et le joueur avec le plus de points remporte la partie.

Un cube, un dé c’est pareil, sauf lorsqu’il est à plat

Dans la boite vous retrouverez 6 paravents, des cartes pour les échanges et les mots à faire deviner (qui sont écrites en plusieurs langues), des plaquettes de jeux, et enfin des feutres, qui n’ont d’ailleurs pas de gomme au bout, c’est bien dommage. Le style graphique du jeu est très basique, et les illustrations ne sont pas un enchantement pour les yeux. C’est très blanc et vide pour le coup. Après cela ne perturbera pas l’expérience de jeu. Les plaques sont de bonne qualité et se bougent sans souci. Il n’a pas grand-chose à redire sur la qualité du matériel si ce n’est l’absence de gomme, contrairement aux autres jeux de dessin récents. Une édition banale, qui ne met malheureusement pas le jeu en avant et aura du mal, je pense, à attirer l’œil.

Inversion

Si une fois vos œuvres réalisées vous trouvez que ce que vous proposé n’est pas mal, voir assez proche de la réalité, abandonnez assez vite toute cette fierté, sous peine de la voir voler en éclat. Car une fois les pièces de votre zone de jeu mélangés selon la carte, celles-ci ne ressembleront plus à rien ! Disparut cette jolie bague, cet arrosoir ou cet immeuble, ce ne sont plus que des amas de formes où il est bien difficile de discerner quoi que ce soit. Vous pourrez obtenir quelques pistes en essayant de reformer, dans votre tête, l’image de base. Et avec les dessins des enfants, c’est encore pire. On est sans cesse tiraillé entre le fait d’ajouter des détails pour aider ou bien par le fait d’aller au plus simple. Surtout qu’au début on ne sait quelles tuiles seront inversées. C’est drôle, mais c’est souvent un peu le bazar.

Le jeu peut se jouer de 3 à 6 joueurs, à partir de 8 ans, et c’est ici que cela se complique. Car il faut bien l’avouer, les enfants ne savent rarement bien dessiner, les adultes aussi parfois. Si dans d’autres jeux de dessin cela peut passer, ici cela ne fera qu’ajouter de la difficulté. Et cela, malgré la présence de 3 niveaux différents. Les plus mauvaises langues diront, qu’il n’est pas plus difficile de retrouver les objets représentés, que de découvrir ce qu’à voulu dire les artistes cubistes. Et je ne pourrais pas leur donner tort, mais pour un jeu cela pourra être un frein. Au niveau du public, il reste assez large, même si je pense que les joueurs aguerris ne s’adonneront que peu au jeu, mais ce n’est pas, je pense, le public visé.

On ne sait pas si ce sont les demoiselles ou le pont d’Avignon qui figure sur ce dessin

Picassimo est un jeu de dessin qui tente de tirer son épingle du jeu en proposant un thème de base assez peu utilisé, le cubisme, même si celui-ci n’est pas clairement identifié ou parfaitement utilisé, et une mécanique originale. Car il faut bien l’avouer dans le domaine des jeux de dessin, bon nombre de choses ont été tentées. Et c’est normal lorsque l’on voit le nombre important de jeux qui utilisent le dessin, une mécanique devenue assez classique. À ceux qui psychose à l’idée de devoir dessiner, et bien, sachez que si vous n’avez que peu de talent dans le domaine, je ne saurais vous conseiller de passer votre chemin, à moins que vous ne désiriez rire un bon coup, et qu’importe si ce que vous dessinez n’inspirera jamais personne. En famille le jeu fonctionne assez bien, car les enfants adorent dessiner, mais s’ils sont trop jeunes cela risque de créer certaines frustrations, car ici il faudra que l’objet dessiné soit déjà ressemblant dès le départ, car une fois décalé il deviendra très difficile de l’identifier. Je pense avoir fait le tour de la question en indiquant ses forces et ses défauts, pour ma part je lui préfère d’autres jeux de dessin, même si Picassimo propose une alternative intéressante et originale qui plaira, j’en suis sur, aux amateurs de dessin.

Pour moi la référence à Picasso et au cubisme n’est pas du tout restitué dans la mécanique. On est plutôt dans l’idée du Puzzle ou du Taquin; ici, un dessin que l’on doit reconstituer mentalement. Mais passé “l’originalité” de proposer aux joueurs cet effort mental, le jeu me semble assez dépourvu d’intérêt.

Ici les dessins realises ne sont pas cubistes. Ici le terme picasso est employé dans la forme commune et grand public